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Ces films impossibles à terminer Part 1
Comment exprimer son dégoût face à certains films ? Pourquoi fuir devant l’incompréhension ? Nous revenons sur quelques expériences foireuses du septième art.
Au programme : 3 films décriés par mois. Continuer la lecture
Tim Dup – La course folle
Une pastille pour l’été, voilà ce dont nous avions besoin. Une pastille sucrée, un bonbon qui dégouline de gourmandise. Tim Dup débarque avec un album hédoniste où son principal terrain d’action s’ancre en Italie. Pas de chichi. Ce pays est parfait pour célébrer l’ivresse de la vie.
L’artiste se lâche alors en délaissant ses tics hip hop. Il dépeint des cadres méditerranéens à travers un chant parfois haut perché. Sa poésie emporte les auditeurs vers les doux souvenirs d’été, à notre amour du voyage.
Ce nouveau disque est singulier car j’y trouve une certaine forme de paix,
de lumière et de Soleil. –Tim Dup Continuer la lecture
La dure à cuire #52
Le Mal contourné par Miyazaki
L’égoïsme est un thème extrêmement fascinant. Peu importe sa nature, l’être humain ne peut échapper à cet état d’esprit.
Le cinéaste Hayao Miyazaki exploite ce sujet à de nombreuses reprises. Là où deux poids, l’Homme et la Nature, tentent de s’équilibrer dans ses productions, une autre parenthèse est à noter. L’artiste nippon expose les mortels et leurs sacrifices.
Ne passons pas en revue toute l’orfèvrerie visuelle du maître de l’animation. Le Vent se lève retient mon attention. Non pas qu’ils soit mon Miyazaki favori. Cependant, il présente bel et bien un récit pertinent. Il s’articule autour d’une histoire vraie : le destin de Jiro Horikoshi (1903-1982). Cette figure conçoit le Mitsubishi A6M Zero. L’appareil est considéré comme l’un des meilleurs de la Seconde Guerre mondiale. Il reste pourtant associé à une sombre période du militarisme japonais, propre aux missions kamikazes de forces aériennes.
Au départ, je ne devine pas ce que veut transmettre l’œuvre. Plus l’histoire avance, plus je comprends mon erreur. Il ne s’agit pas de raconter des batailles historiques. Face à mes yeux se dressent deux histoires d’amours. D’une part, la passion de l’aviation ancré chez un homme depuis son enfance. De l’autre, la flamme amoureuse brûlant chez deux jeunes adultes. Le Vent se lève perturbe l’espace d’un instant. Il ne se limite pas du tout à son aspect documentaire.
Miyazaki ne pointe pas seulement des progrès aéronautiques et les mœurs d’une époque. Il emmène également les spectateurs vers le surnaturel. Jiro partage ses rêves avec son idole Giovanni Battista Caproni. L’importance du rêve se dépeint alors grâce à ces images !
Vu sous cet angle, je construis un début de conviction : Miyazaki contourne le Mal à l’aide de son Art. Le Vent se lève décrit les atrocités de la guerre mais ne s’y focalise pas pendant des heures. Le réalisateur provoque l’oubli des atrocités via ce qu’il conte. Caproni est au service d’un certain Benito Mussolini. Il ne représente pas le Diable à l’écran. Il rappelle plutôt à quel point choisir équivaut à renoncer.
Le cofondateur du Studio Ghibli présente des personnages égoïstes entreprenant leurs souhaits les plus profonds, quel qu’en soit le prix à payer.
Au bout de la course, une séquence vient marquer mon esprit. Des larmes arrivent presque à mes yeux en observant une et une seule relation fusionnelle : Jiro et sa bien-aimée atteinte de tuberculose. Rien ne peut arrêter ces êtres déchirés par leurs obligations. Ils se complètent et symbolisent la persévérance (Disney n’a qu’à se cacher).
Un avion amélioré peut devenir une arme de guerre. Un couple peut se rencontrer malgré des risques maladifs. Dès lors, est-ce que notre passion l’emporte sur notre raison ? Est-ce que l’amour rend aveugle ? Qui sommes-nous pour juger ? Est-ce vraiment correct de s’émouvoir devant un homme participant au chaos mondial ?! Trop de questions avalent le mental… ce qui donne une vraie force aux propos du film.
Les années 30 sont tragiques. Heureusement, quelques rêveurs vivent leurs désirs. Le réalisateur avoue avoir produit une simple mise en scène, celle d’un ingénieur soucieux de concevoir de beaux avions. Nos visions ont beau être manichéennes, parfois, l’égoïsme aussi s’éloigne du Mal.
Le Temps scintille et le Songe est savoir. -Paul Valéry
brunoaleas
La dure à cuire #51
Le problème One Piece
1997. Quelle belle époque. Les premiers tomes de One Piece sont publiés à ce moment. On découvre alors le monde laissé par Gol D. Roger. Juste avant sa mort, ce Roi des pirates ouvre une chasse au trésor inspirant Monkey D. Luffy à naviguer sur toutes les mers. En 2011, le manga d’Eiichirō Oda atteint un record : il se vend à plus de 37 millions d’exemplaires !
Aujourd’hui, il est évident que son univers n’est plus le même qu’avant. Malheureusement, un problème devient de plus en plus apparent à sa lecture. Comment est-ce possible ?! Qu’est ce qui dérange ? L’heure du jugement est tombée.
brunoaleas et anti.cons / Illustration ©Eiichirō Oda
Générique Clément Trouveroy
Musique finale Kohei Tanaka & Shirō Hamaguchi – ‘To The Grand Line’
Zoo Baby Interview
Zoo Baby signe un disque où le désamour tient une place centrale. Le Chicoutimien décortique bel et bien ce thème via ses titres dansants. Profitons-en pour le questionner sur la conception de son opus bercé dans l’intimité et baigné dans un groove omniprésent !
N’en as-tu pas marre qu’on te compare à Julian Casablancas ?
Franchement, c’est flatteur. Que ce soit avec The Strokes ou au sein d’autres projets, Julian Casablancas a une vision précise de la musique. Quand j’ai commencé à jouer du punk, c’est un peu la comparaison que je souhaitais avoir. Mais au Québec, on compare surtout les groupes locaux entre eux. Cette comparaison très flatteuse vient de l’Europe. Il n’y a rien d’insultant. Puis, ouais, elle ne me dérange pas encore.
Plus sérieusement, je me questionne beaucoup sur le fond de ton album. Il transmet des images érotiques. Je songe alors à un amour aussi addictif et néfaste qu’une drogue.
Faut-il y voir des descriptions de couples du XXIe siècle ? Ou est-ce encore plus universel ?
Quand j’ai conçu l’album, je vivais une phase de déception face à l’amour. Je le voyais sous un angle froid, en manque d’émotion et d’humanité. J’aborde les relations comme une série de pièges. Si le ton suave et le groove des instrus se mêlent aux textes, c’est pour donner de la beauté aux messages. J’étais juste capable d’écrire des chansons en étant désillusionné.
Cela me rappelle la notion de romantisme, la souffrance est indissociable d’une histoire amoureuse.
Je ne suis pas un romantique. Je ne veux pas généraliser l’amour de cette manière. On ne retrouve même pas la passion d’un romantique dans mes chansons. On est loin du tout-mutilation. Il y a juste une froideur, un retrait face à l’émotion. C’est de l’amour sur le papier.
Il y a une distance entre le narrateur et une interrogation : où l’atome sentimental peut atterrir ? L’amour peut vite devenir une quête assez vide de sens, surtout quand tu accumules les mauvais souvenirs. J’ai essayé d’en faire une thématique. Cette lourdeur textuelle contraste avec la pop léchée et groovy que je propose.
A l’écoute de « Filles gentilles », j’imagine qu’à chaque relation amoureuse, nous nous comportons comme des éternels insatisfaits.
Oui, totalement. Il y a toujours cette peur de manquer quelque chose. Cette façon de toujours suivre le film dans ta tête, de choper ce que tu considères comme les meilleures opportunités de ta vie… c’est comme un sentiment d’imbu de soi-même. Ca éloigne beaucoup de monde. « Filles gentilles » dresse un constat : celui de savoir si l’amour est un schéma où la désillusion se répète en plusieurs cycles.
J’ai eu beaucoup de retours par rapport à cette chanson. Comme si elle reflétait notre génération. Cette même génération qui n’a pas le goût d’arriver à la trentaine.
Une fois l’album digéré, on se dit que nulle recette n’aide à trouver son bonheur. Est-ce une interprétation qu’on peut aussi retrouver pour les chansons de Gazoline ?
Je ne sais pas. Quand j’écrivais pour Gazoline, j’étais vraiment amoureux. Je crois que Gazoline, grâce aussi à son style plus rock, se positionne dans quelque chose de plus humain et sensible. J’ai l’impression que c’était nécessaire de balancer une sensibilité à fleur de peau à assumer complètement. La morale de Gazoline est peut-être de vivre la beauté des émotions, la simplicité des expériences.
Alors que Zoo Baby transpire quelque chose de plus froid. On a affaire à une métaphore de l’amour. La distance se perçoit dans tout. Des sujets ne sont pas tout à fait assumés, des idées ne sont pas conclues. On se retrouve dans une espèce de statu quo, dans un état de non-avancement.
Pourquoi avoir fait appel à Julien Mineau pour l’architecture sonore du projet ?
Au départ, je voulais m’occuper de toutes les parties instrumentales. Puis, je me suis mis à jouer dans une bande. Je savais aussi que Julien Mineau était vraiment un cavalier seul, un ermite, qui allait comprendre cette volonté de travailler dans une chambre en mettant en avant l’isolation et l’introspection. Je voulais qu’il amène l’architecture sonique de l’opus. Ca me plaisait de partager mes idées entre nous deux, sans qu’il n’y ait personne d’autre pour nous interrompre.
Julien n’est jamais satisfait d’un son, ce qui a donné beaucoup de profondeur à Zoo Baby. J’aimais vraiment penser outside the box. J’aimais prendre des risques, enlever des mélodies trop accrocheuses ou évidentes et tenter de nouvelles approches musicales.
Une collaboration avec Fred Fortin serait-elle possible ? Il est fabuleux pour ce qui est de créer des ambiances très intimes.
Des albums comme Planter le décor ont influencé mon écriture et mes compositions. Néanmoins, Fred Fortin baigne dans le folk, le blues. C’est un vocabulaire que je ne connais pas vraiment. Mes démarches et mon bagage artistique se rapprochent plus aux productions de Prince.
J’adorerai travailler avec Fred Fortin, mais il me faudrait un projet qui puisse exploiter au mieux ses forces.
Terminons sur une note d’actualité. Vis-tu cette période Covid comme un étouffoir ou comme une incroyable source d’inspiration ?
Quand cette période a débutée, j’avais beaucoup de morceaux en stock. Je n’avais jamais vraiment le temps de bosser dessus. Ensuite, j’étais en pleine créativité pendant 6 mois.
Pour le moment, j’ai du mal à raconter de nouvelles choses. Il faut que tu vives en amont de ta création pour partager des histoires. Sauf que là, je n’ai pas la sensation d’avoir vécu des folies. Je n’ai pas joué de l’été. Je ne vois pas ma famille. Je n’ai pas rencontré de filles (rire). Je n’ai pris aucune brosse monumentale (ndlr : se saouler).
Interview menée par Drama – Photo ©Jimmi Francoeur
Solo Leveling : l’arrivée triomphante du webtoon en librairie !
Ça y est, ils sont là !
Si vous ne connaissez rien du concept webtoon, il est temps de vous mettre au jus !
Les webtoons sont des bandes dessinées coréennes destinées à la consommation sur internet. Présentés dans un format propice à la lecture sur téléphone ou tablette, ils contiennent souvent des histoires longues assez codées. Ces nouveaux produits culturels asiatiques se font une place de plus en plus dominante dans le marché de la bande dessinée.
C’est pourquoi, je ne suis qu’à moitié surpris de voir Solo Leveling, l’un des porte-étendards de ce nouveau mouvement, dans la vitrine de ma librairie locale. Alors, qu’est-ce que ça vaut ?
Solo Leveling décrit un monde similaire au nôtre. A l’exception que des portails magiques s’ouvrent un peu partout et laissent s’échapper de terribles monstres dans nos villes. Heureusement, une partie de la population s’est vue, lorsque les portails sont apparus, dotée de pouvoirs. Ces nouveaux héros sont capables de pénétrer dans ces portails et de les refermer avant que les monstres n’en sortent. Cependant, tous ne sont pas égaux. Chacun ne reçoit pas la même force et les “chasseurs” sont notés de E à S selon leurs compétences. C’est Sung Jinwoo, chasseur de rang E, faible et trouillard, qui, après un évènement incroyable, deviendra l’un des plus puissants chasseurs de rang S.
Le récit s’inspire de la culture jeux vidéo, que ce soit des ‘gacha games’ téléphoniques (du type à inciter les joueurs à dépenser de la monnaie du jeu pour recevoir un objet virtuel aléatoire) ou des jeux multijoueur en ligne. Son scénario est très classique pour le medium. On a affaire à un héros ordinaire au début, auquel le lecteur lambda peut s’identifier, et à sa montée en puissance. Que ce soit par des retours dans le temps, par une réincarnation ou par de simples hasards, les héros de webtoon obtiennent très vite un moyen de dépasser l’état d’homme ordinaire afin de s’élever au-dessus de la foule. Les exemples dans les webtoons sont à foison, dont les plus populaires : The Gamer, A returner’s magic should be special, The beginning after the end. Du côté manga on prendrait certains isekais comme exemples de ce genre d’histoire : Moi, quand je me réincarne en slime, Rising of the shield hero, Bofuri, etc.
Personnellement, j’aime qualifier Solo Leveling de power porn. Tout l’intérêt du récit est de jubiler devant la force écrasante du protagoniste. C’est un vrai plaisir de contempler sa façon de vaincre tous ses obstacles grâce à ses avantages. L’œuvre est peut-être la plus exemplaire, classique et comporte bien plus de qualités que de défauts.
Car si le scénario de ce genre d’œuvre est par nature très prévisible (jamais la victoire du protagoniste ne fait de doutes, malgré les efforts de l’auteur pour incorporer un peu de tension), elle n’est pas dénuée d’intérêt. En effet, grâce à des dessins lisses, colorés et spectaculaires, les combats et la progression de notre héros sont on ne peut plus agréables à suivre. Le cerveau ne travaille pas des masses durant la lecture. Les lecteurs se laissent bercer par la douce violence des combats. Ils jouissent en observant Jinwoo tester ses nouveaux pouvoirs, toujours plus craqués, sur des monstres de plus en plus gros.
Au-delà des combats, l’état psychologique du personnage évolue en cœur avec sa puissance, donnant un minimum de profondeur au personnage… ce qui est déjà beaucoup demandé !
Qu’ai-je ensuite le plus préféré dans le scénario de l’œuvre ? Il s’agit de ce moment où l’on agrandit la perspective. Quand on dépasse la simple quête du personnage principal pour voir à quoi ressemble l’univers d’un point de vue plus vaste. L’ampleur de la situation permet à l’auteur d’introduire des intrigues de géopolitiques vraiment intéressantes, comprenant conflits d’intérêts entre nations et chasseurs surpuissants.
Malgré la contrainte d’adaptation due au format original pensé pour les appareils portables, l’édition papier proposée par Delcourt est d’une qualité indéniable. Tenir entre les mains ces grandes images colorées excellemment recadrées pour convenir à leur nouveau format fait grand effet. Surtout avec de tels dessins. Avec ses couleurs chatoyantes, même dans les scènes sombres, et une grande finesse dans son design, ce manhwa coréen mérite bien son édition physique ! Et vous aussi !
Pierre Reynders – Illustrations ©Solo Leveling
La dure à cuire #50
Erase(Her.) Interview
Admiratif devant un Népal, Erase(Her.) signe lui-aussi des textes assez métaphysiques. Le rappeur belge s’exprime via un premier EP. Sa plume ne banalise pas le quotidien mais en fait son terrain de jeu. Prenons le temps d’interroger la mise en scène de ses observations !
T’es-tu surpassé lors de la création de ton premier album ?
Franchement, ouais. Si je devais passer une nuit blanche à taffer sur une instru, je le faisais. A des moments, il suffisait que je sois inspiré pour rester éveillé jusque 3 ou 4h du matin. (rire) Même 2 jours avant la sortie de l’album, je réalisais de nouvelles prises encore et encore… c’était du non-stop.
Le confinement a dû te motiver à terminer convenablement ce projet.
Dès que t’es enfermé, seul avec toi-même et tes idées, tu épouses ta passion. Je n’ai pas vu ça comme une malédiction. J’ai perçu le côté bénéfique et positif de la chose.
J’ai vraiment un tas de question par rapport au fond de tes morceaux. Commençons ! Comment fait-on passer un message intelligent à travers un morceau de rap ?
As-tu une recette à partager ?
C’est une très bonne question. Honnêtement, je ne pense pas avoir de recette. Quand j’écris, j’imagine l’exercice comme une conversation avec moi-même. A partir d’un de mes constats, je vais commencer à disserter. En allant de réponses en réponses, je développe un sujet. A la fin, j’obtiens une sorte de fil conducteur respectant une réflexion de base.
Il peut tout à fait évoluer au fur et à mesure du morceau. Il n’y pas de limite. Je m’inspire à 100% du réel. Je n’ai pas envie de traiter d’expériences que je ne vis pas ou que je ne connais pas.
Ne te sentirais-tu pas légitime pour écrire au sujet d’un thème inconnu à tes yeux ? Il y a des rappeurs qui jouent divers personnages et qui foncent dans leurs délires.
Je respecte entièrement cela. Je ne sais pas si c’est une question de légitimité. C’est une question d’authenticité. Je sais que si on parle d’évènements vécus, on sera fatalement bien plus en train de vivre un sujet. On sera par ailleurs plus à l’aise pour en parler. Alors que si on rappe sur un sujet qu’on ne connait pas, on n’est pas à l’abri d’une erreur ou l’autre. Ca casserait l’effet d’immersion que j’aimerais transmettre autour de moi.
Dans « Yeux ouverts », tu déclares : Le Paradis réside en nos entrailles. Perds pas ton temps à le chercher. Ces mots sont-ils optimistes ? Veux-tu dire par là qu’il ne tient qu’à nous de modeler notre bonheur ?
Exactement. Plusieurs personnes croient que le bonheur équivaut à posséder telle ou telle chose. Que ce soit une maison, une voiture, une copine, un chien, peu importe. Au fond, le bonheur n’a rien de matérialiste. C’est vraiment une façon de penser. Le ciel sera moins nuageux si tu sais rester positif, pendant que tu affrontes de nombreux problèmes dans ta vie. Cette attitude n’a rien de religieux chez moi. Elle est en accord avec mes valeurs.
Certains désirent définir le bonheur alors qu’ils ne savent point prononcer Je t’aime. Comme si c’était tabou.
Je pense que c’est tabou. C’est vu comme une phrase qui peut être mal interprétée. Il faut éviter des embrouilles ou l’incompréhension alors qu’on ne le dit pas assez. Même si parfois, je l’exprime pleinement à des potes qui se comportent comme des frères.
Quand tu es prêt à l’avouer, il y a souvent un truc qui freine l’initiative. Et c’est trop tard pour revenir là-dessus. Le pire, c’est vraiment de vivre avec des regrets. S’il y a une chose à dire, il faut la dire. Il ne faut pas perdre son temps à avoir peur d’être soi-même.
Tes morceaux se centrent sur l’introspection. Tu t’inscris dans une démarche remarquée chez Swing. Comptes-tu rester sur des thèmes très personnels pour tes prochains projets ?
J’aime écrire de cette façon. C’est vraiment une source d’inspiration intarissable. J’aimerais bien essayer par après de me diversifier vers des sujets plus politiques. Les inégalités est une thématique qui ne m’est pas invisible. Puis, j’aimerais me focaliser tant sur les relations humaines que sur nos visions du monde. Je crois que ça peut être intéressant.
J’ai souvent observé des fans de rap qui analysent de fond en comble des thèmes musicaux. Je suppose que tu passes également des heures sur des textes d’autres artistes.
C’est quelque chose que je fais régulièrement. Ca arrive par exemple pour les albums de Dinos ou ceux de Népal. Je les écoute en boucle. Je m’interroge toujours sur l’essence d’un texte de rap. Au final, c’est juste une personne en face de sa feuille qui rédige pendant des heures sur un sujet. Ensuite, on peut en tirer de grandes leçons de sagesse. C’est aussi la beauté de raconter un vécu ou une histoire particulière.
J’aimerais te parler d’une problématique plus universelle et globale. Un jour, tu m’as déclaré que le plus gros souci de l’humanité est de ne pas savoir penser au bien commun.
Y fais-tu référence dans ton EP ?
Cela s’écoute notamment dans « Poltergeist » : Certains cachent leurs crochets vénéneux dans le silence, cachent les phrases trash qu’ils ne disent pas mais pensent, crachent dans le dos puis plaident leur innocence, disparaissent en flash au premier coup de vent.
Je cite ces gens qui ne pensent qu’à leurs intérêts personnels au lieu de comprendre que leurs actes auront des répercussions sur les autres. La vie est comme un jeu d’échec : chacune de nos actions à sa conséquence. Tu ne peux pas l’omettre. Chaque pièce jouée aura son importance. La volonté de dénoncer des problèmes sociaux repose dans les racines du rap.
Eloignons-nous des problèmes. Au final, qu’est-ce que le rap t’a apporté de meilleur ?
Son aspect propre à l’écriture. Cela m’est très thérapeutique. Le fait de coucher mes hantises sur le papier, ça me fait du bien. Une fois écrites, elles sont matérialisées et tu t’en fais une idée plus concrète. Le rap m’apporte une sérénité d’esprit.
DRAMA – Illustration ©Kevin Popescu / Interview réalisée le 23/01/2021
Inside
La sagacité de Bo Burnham l’amène à composer une fresque de notre époque. L’artiste passe en revue les absurdités actuelles avec un humour qui pique. Il n’est pas pour autant violent dans ses propos. Inside propose vraiment de sages paroles. Quelle est l’arme principale de ses mots ? L’ironie. Continuer la lecture