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Le Deuxième Acte

4 persos. 1 resto. 1 histoire commune. Il n’en faut pas plus pour Quentin Dupieux. Il a déjà assez pour délirer. Le Deuxième Acte regorge de répliques reflétant l’impertinence créative du réalisateur. Quel bien fou ! Le Français n’en est pas à son premier film choral. Incroyable Mais Vrai entrecroise déjà de curieux protagonistes.

Pour cette treizième œuvre, le cinéaste dépeint un scénario assez banal. Florence est déterminée à présenter l’homme de ses rêves, David, à son père Guillaume. Cependant, David ne partage pas les sentiments de Florence. Dès lors, il concocte un plan pour la dissuader de son affection en la poussant vers son ami Willy.

Encore une fois, je tire mon chapeau. Non pas pour l’effet poupée russe déployé à l’écran, illustrant une histoire dans une histoire. Non pas pour le minimalisme assumé de Quentin Dupieux (peu de décors et personnages, film à la durée très courte, etc.).
Saluons plutôt sa critique d’une société à la fois conformiste et pathétique… car tout le monde y passe ! L’intelligence artificielle. Les acteurs-violeurs. Les artistes moralisateurs et leur hypocrisie.
Bref, Le Deuxième Acte offre un moment de répit. Cette bouffée d’air frais est bien plus subversive que n’importe quel yes man hollywoodien respectant je-ne-sais quel quotas ethnique. Parlons-en. Cette exécrable méthode est taillée pour s’acheter une bonne conscience.
Oui, on peut rire de tout. Sauf que l’humour noir ne peut satisfaire tout le monde. Chaque individu est sensible à sa manière. Et non, la censure n’est pas un nouveau phénomène.

La liberté d’expression, c’est un immense débat. On avait tendance à dire qu’avant c’était mieux, qu’on pouvait dire plus de choses. C’est totalement faux. Renaud avait ses chansons censurées à la radio. Coluche s’est fait virer d’Europe 1. La censure, il y a en toujours eu, il y a en a partout. Tout le monde peut être plus ou moins touché par la censure. Il ne faut pas faire de généralité. Elle peut venir de n’importe où.Jérémy Ferrari

Je partage l’avis de l’humoriste. Ne voyons pas la censure tel un obstacle. Si les artistes souhaitent rester authentiques, autant considérer les censeurs à l’instar de brebis égarées. Le défi est à surmonter, comme le fait Dupieux.
Alfred Hitchcock avait tout compris. Via Psycho, son honorable thriller, il détourne le code Hays, une censure mise en place par l’institution Motion Pictures Producers and Distributors Association (1934-1966). Selon darchinews, la loi interdisait l’apparition de violence, les scènes à connotations sexuelles, ou les antihéros à l’écran. Le Maître du Suspense filme alors une violence et nudité suggérées. Un tueur poignarde une jeune femme sous la douche. Pour éviter qu’on la voit nue, les spectateurs n’aperçoivent pas un plan rapproché. Hitchcock découpe le corps en une série de gros plans, évitant soigneusement la poitrine. Il en va de même pour le couteau touchant la peau de la femme. Le plan fut coupé dans le but de ne pas voir l’arme rentrer dans le corps.

Actuellement, certains artistes se plaignent pourtant d’un climat tendu. Je comprends. Parfois, des voix s’élèvent pour un rien. Emotions et déraisons guident trop d’idiotes personnes.

Depuis les attentats de Charlie Hebdo, force est de constater que la liberté de création est de plus en plus mise en péril.Bastien Vivès

Effectivement, lors de cet attentat, un cap brutal fut franchi. Mais faut-il abandonner ? Faut-il s’avouer vaincu ? Comme si le dissensus valait moins que la doxa… la vie est trop courte pour se laisser malmener. Les caricaturistes de Charlie Hebdo ne méritaient pas de mourir. S’il faut se battre pour qu’on réfléchisse ensemble sur la pratique de l’humour noir, battons-nous.
Le Deuxième Acte est un film au propos intelligent. En cassant le quatrième mur, les personnages questionnent directement notre bienséance, ou plus précisément, le politiquement correct. A nous de savoir ce qui nous dérange, la raison de notre malaise.

brunoaleas

LA DURE A CUIRE #108

La Dure à Cuire est un concept né en 2018. Commentons l’actualité rock de la moins douce, à la plus brutale. Puis, écoutons sa playlist homonyme !

Vampire Weekend

Only God was Above Us est un album à poncer. Vampire Weekend mêle mille instruments sans aboutir à la cacophonie. La bande livre là un nouvel origami auditif !

Causa Sui

Causa Sui se donne depuis 2005. Leurs instrus offrent un rock sophistiqué impossible à nier !

Tacoblaster

Comment prolonger l’ambiance des années 90 ? Ecoutez Tacoblaster. Le jeune groupe balance son premier album qui ravira les fans d’une autre époque !

brunoaleas

Porco Rosso

En Italie, durant l’entre-deux-guerres, Marco Pagot, un ancien pilote émérite de l’armée royale italienne, se voit transformé en cochon. Il se reconvertit ensuite en chasseur de primes sous le nom de Porco Rosso. Vivant sur une île déserte perdue dans l’Adriatique, il écoute à la radio son air préféré, ‘Le Temps des Cerises’, en lisant une revue de cinéma. Un jour, les Mamma Aiuto, des pirates de l’air, comptent attaquer un paquebot transportant de l’or. Marco décide d’intervenir pour sauver un groupe d’écolières à bord. S’ensuivent une série d’aventures, de combats aériens et de rencontres avec d’autres personnages hauts en couleur. Le film explore des thèmes tels que la bravoure, l’amitié et l’amour.

La transformation de Marco en Porco

Le réalisateur Hayao Miyazaki choisit de ne pas donner une explication à cette transformation. Néanmoins, les circonstances de la transformation de Marco sont celles évoquées dans la scène clé du film, où Porco raconte une histoire à Fio pour l’endormir. En faisant cela, l’auteur nous invite à imaginer notre propre interprétation des causes de cette transformation.

Dans une interview de 1992, Miyazaki partage des éléments intéressants qui permettent de plus ou moins comprendre les raisons de cette transformation.
Pourquoi donc avoir choisi un cochon comme personnage principal ? Pourquoi illustrer le symbole du capitalisme ? Il l’explique franco.

Il [le cochon] nous ressemble beaucoup ! Quand on est jeune, on est plein d’espoir et l’on pense que l’on sera un héros. Avec l’âge, on se rend compte que l’on n’a pas accompli ce but à cause de l’orgueil, des caprices, des désirs, du goût de la possession.

Revenons à l’instant précis de la transformation. Marco est pilote d’hydravion durant la Première Guerre mondiale. Un jour, avec ses camarades aviateurs, ils se retrouvent à livrer une bataille féroce au-dessus de la mer Adriatique. Durant cette bataille, il perd son équipe ainsi que son ami d’enfance, Berlini. Il se refuse à accepter la perte de son ami qui venait de se marier. C’est à cet instant qu’il a une vision.

Dans cette étrange vision, il contemple les avions ennemis et amis monter au ciel pour rejoindre une étrange procession composée d’avions tombés aux combats. Ce cortège funèbre est si important qu’il forme une véritable Voie lactée.
Quant à Marco, malgré le fait qu’il souhaite échanger sa vie avec celui de son ami, le sort ne le permet pas. Il survit alors à cette terrible bataille. Cet épisode traumatisant peut être considéré comme le tournant de sa vie.

En me référençant aux diverses interviews du cinéaste, concluons une hypothèse. La transformation de Marco en Porco Rosso cause en lui une prise de conscience brutale. En d’autres mots, mourir pour son pays n’a pas de sens. Marco était bel et bien porté par un idéal : tuer et mourir pour son pays. Selon moi, en observant tous ces avions, il s’est rendu compte que toute cette violence n’avait pas de sens.

Porco et Miyazaki

Lors d’une interview, après la sortie du film, Miyazaki décrit clairement Porco Rosso : C’est un film né seulement d’une passion. Puis, il confirme une précision. C’est son seul et unique film personnel. C’est un film qu’il a principalement fait pour lui. Ainsi, il est normal de voir des similitudes entre le personnage principal et le réalisateur.

Le choix de l’Italie sous Benito Mussolini n’est pas non plus anodin. Rappelons que l’artiste était marxiste. Faire en sorte que l’intrigue ait lieu dans l’Italie des années 1929, laisse de la place pour parler du fascisme. Cette thématique est initialement abordée en toile de fond. Le voile est levé lorsque Porco prononce une phrase devenue culte : Je préfère encore être un cochon décadent qu’un fasciste.

Un film aux multiples facettes

Porco Rosso n’est pas simplement un film qui explore l’être humain. C’est aussi un film d’action, d’aventure et d’humour.

L’humour se note à travers le Boss et le gang des Mamma Aiuto. Ces pirates de l’air, plus maladroits que menaçants, rajoutent une touche d’humour à cette œuvre. Que ce soit par leur comportement burlesque ou le fait qu’ils n’arrivent jamais à leur fin, cette bande peu chanceuse arrive majestueusement à faire rire le spectateur.

Le film aborde également la situation des femmes dans l’Italie du début du XXe siècle. On y voit des femmes qui rejoignent les usines pour travailler. Ces dernières sont une main d’œuvre à bas coût. En 1929, l’Italie, tout comme le monde entier, vit une crise économique à la suite du krach boursier de 1929. Miyazaki, via le personnage de Paolo Piccolo, met en évidence l’exploitation des femmes durant cette période. Paolo justifie l’emploi des femmes à la place des hommes par des considérations économiques. En effet, il exploite les femmes car ces dernières perçoivent un salaire moindre par rapport aux hommes pour le même travail. Il prend prétexte de la crise économique pour justifier cette pratique prédatrice, mais en réalité, on est dans la continuité de l’exploitation du prolétariat.

Fortuné Beya Kabala

Vampire Weekend et son nouvel origami

Origami auditif. Ces termes ne viennent pas de moi. Thibaut de Goûte Mes Disques pond ces mots pour définir le nouveau disque de Vampire Weekend, Only God was Above Us. Franchement, le qualificatif est parfait. Les musiciens n’en sont pas à leur première réussite. De fait, leur discographie transpire plusieurs influences : rock, afropop, jazz, baroque… bref, un tas de dingueries sur scène ! Le groupe revendique donc 2 influences : la musique populaire d’Afrique et la zic classique occidentale.

A la base, la bande menée par Ezra Koenig se compose d’étudiants en musicologie. Comme quoi, rester sur un banc et écouter un gus parler encore et encore, ça sert ! Ils décident d’auto-produire leur premier opus, dès l’obtention de leur diplôme. Ce premier album éponyme sort en 2008. Qu’en est-il 16 ans plus tard ? Les New-Yorkais réalisent des chansons ambitieuses, inspirantes et… matures.

Peut-être qu’avec cet album, il s’agit à la fois d’atteindre une vraie maturité, en termes de vision du monde et d’attitude, mais aussi d’aller plus loin dans l’espièglerie. Il y a un amateurisme juvénile en même temps que certains de nos mouvements les plus ambitieux. –Ezra Koenig

La premier titre annonce l’ambiance. ‘Ice Cream Piano’ résume, en plus de 3 minutes, la politique merdique des USA. Ezra Koenig pense sûrement à l’état actuel du monde.
L’Oncle Sam n’est pas très loin. Une idée martèle mon crâne. Une phrase synthétise une volonté américaine, préserver le chaos.

You don’t want to win this war, ’cause you don’t want the peace

Des mots prononcés dans le plus grand des calmes. Ils nous invitent à danser et certifie le caractère philosophique du groupe. La sagesse des vampires se ressent sur quelques morceaux. Et si finalement, en écoutant ‘Hope’, on ne se laisserait pas aller à un faux fatalisme ? The prophet said we’d disappear. The prophet’s gone, but we’re still here, prononce Ezra. Les paroles donnent à réfléchir. Comme si Ezra éclipsait nos doutes, craintes et prises de têtes.

N’oublions pas les instrus de l’album ! Elles sont mémorables. Les minimes et superbes touches de violons sur ‘Capricorn’. L’énergie solaire de ‘Prep-School Gangsters’. ‘Mary Boone’ et son rythme réunissant hip hop et sonorités orientales.
Quant à ‘Connect’, comment nier la succulente et pétillante performance ? Je ne m’ennuie jamais. J’en redemande. Le piano me propulse vers une contrée riche en émotions !

L’origami continue de surprendre. Si Only God was Above Us devient le dernier album du groupe, alors, il peut s’offrir les lauriers d’Euterpe.
Ecouter leurs chansons donne envie de jouer de la musique. En faut-il plus pour aimer une formation aux fascinantes facettes musicales ?

brunoaleas

CySev et l’aliénation

L’avenir appartient aux plus pessimistes ? Les rapports du Groupe d’Experts Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat, la montée de l’extrême droite, le capitalisme fou de notre époque… on sue du sang.

Les plus cyniques se moqueront de celles et ceux en plein déni de la réalité. Ils préparent leur plus belle voix. Il suffisait de lire la politologue Hannah Arendt, le linguiste Noam Chomsky ou bien, Aurélien Barrau. Cet astrophysicien ne pense pas pour rien dire. En 2022, il publie Il faut une révolution politique, poétique et philosophique. Il s’entretient alors avec une professeure de lettres nommée Carole Guilbaud.
Ses mots résument l’une de mes convictions. Il faut cesser d’être pessimiste. Imaginons des alternatives à notre système politico-économique !

Il ne s’agit plus de commenter ou de comprendre le réel : il s’agit de produire du réel. Ce qui tue aujourd’hui et avant tout, c’est notre manque d’imagination. L’art, la littérature, la poésie sont des armes de précision. Il va falloir les dégainer. Et n’avoir pas peur de ceux qui crieront au scandale et à la trahison.

Cette citation me rappelle un groupe, plus précisément, une chanson. ‘Takata’ est interprétée par le duo CySev. Son clip affiche les nombreux outils d’aliénation de notre ère : drone, casque virtuel, robots… pourtant, on y contemple une course, embrassade, danse, ainsi que des sourires. C’est en écoutant les paroles qu’on se focalise sur une et une seule question.

Faut-il mettre notre société sur pause pour que tout le monde se rende compte des catastrophes à venir ?

brunoaleas

Le Comte de Monte-Cristo

Un miracle advient ! Un film français est un souffle épique ! Le Comte de Monte-Cristo est réalisé par Matthieu Delaporte et Alexandre de la Patellière. L’adaptation du classique de la littérature force le respect. Les cinéastes s’éloignent quelques fois du roman. Mais, ils présentent toujours un protagoniste qui renaît de ses cendres. Edmond Dantès, jeune marin, débarque à Marseille pour s’y fiancer avec Mercédès Herrera. À la suite d’un exploit en pleine mer, on lui promet la place de capitaine. Trahi, il est dénoncé comme conspirateur bonapartiste. Il est alors enfermé au château d’If. La souffrance est au rendez-vous. Son mental sombre petit à petit. Soudain, il s’évade et prend possession d’un trésor caché sur l’île de Montecristo. Il va désormais se venger et retrouver ses accusateurs.  

Comment ne pas ressentir un ennui profond devant une histoire de vengeance ? L’œuvre propose une relecture foutrement bien filmée, affichant des actrices et acteurs talentueux.

Laurent Lafitte incarne la crasse. Ce procureur du roi symbolise un adage clair et net : la fin justifie les moyens. Encore une fois, l’artiste n’a rien à prouver. Son dédain, mépris et indifférence frôlent l’excellence. Son personnage s’observe comme un être abject qu’on aimerait condamner dans les flammes de l’Enfer.

Anaïs Demoustier joue Mercédès, une dame fascinante. Elle semblait être la dernière lueur d’espoir d’Edmond. Malheureusement, lors de son retour à la civilisation, il découvre qu’elle est mariée à un homme peu vertueux.
Lire Dumas, c’est découvrir les nombreuses nuances des passions et relations humaines. Face à sa bien-aimée, Edmond se perd dans la confusion et le doute… des sentiments vécus tout au long de notre vie. Le caractère universel de l’œuvre se résume bel et bien aux dialogues entre Mercédès et Edmond.

Enfin, Pierre Niney porte le rôle principal de main de maître. J’aurais souhaité le voir partager plus de moments avec l’abbé Faria, son mentor et aide divine. Alexandre Dumas rédige des instants poétiques, d’une sagesse folle, lors de leur rencontre à la forteresse. Le film met de côté ces passages si beaux.
Le scénario demeure tout de même pertinent. La transformation d’Edmond en Monte-Cristo. Ses alliés et ennemis. Sa soif de justice. Tant d’éléments font de ce personnage l’un des meilleurs, toute fiction confondue !

Monte­-Cristo n’est pas un Robin des bois, c’est quelqu’un qui a tout l’argent du monde, mais il ne le donne pas. Il le consacre à sa vengeance. C’est un héros totalement moderne dans cette dimension individualiste, égoïste. Matthieu Delaporte

brunoaleas

LA DURE A CUIRE #107

La Dure à Cuire est un concept né en 2018. Commentons l’actualité rock de la moins douce, à la plus brutale. Puis, écoutons sa playlist homonyme !

Idles

Idles a su fédérer via ses textes engagés. Aujourd’hui, de nombreux mélomanes critiquent un message trop simpliste se résumant à love is the thing… je m’en bats les couilles ! Le quintet livre des textes toujours audibles, sublimés par des instrus de malade.

Slomosa

Pleased to meet you, I hope you find your head. Come around dog, this is not what I am.

Raketkanon

La disparition de Steve Albini ne laisse pas indifférent. On pourrait écrire des pages et des pages au sujet de l’ingé son. Mais du son vaut mieux que 1000 mots. C’est pourquoi, le second album de Raketkanon rappele à quel point le personnage mixait du lourd.

brunoaleas

LA DURE A CUIRE #106

La Dure à Cuire est un concept né en 2018. Commentons l’actualité rock de la moins douce, à la plus brutale. Puis, écoutons sa playlist homonyme !

Habibi

Your words playing in my head. It feels just like a dream, one I can’t let go.

Sir Edward

À la croisée, du krautrock et de la pop, la formation rennaise envoûte et offre une transe énergisante. Voici ce qu’on lit dans le dossier de presse de Sir Edward. Nous, on plane.

Porches

Ambiance MTV. Accords accrocheurs. Voix saturée et décomplexée. Porches défonce tout, sans aucun doute. Merci à Julian Casablancas de l’avoir mis en avant sur sa page Insta !

brunoaleas

L’aide des Beatles

Tonnerre de Brest ! J’ai 27 piges. Toujours présent. Il m’arrive de blaguer sur mon âge. Je croyais rejoindre la liste des 27, comme tant d’artistes que j’admire. Me voici, toujours vivant, toujours la banane, arborant des cheveux blancs démultipliés par cent. Maintenant, j’aimerais savoir… que reste-t-il de l’enfant que je fus ?

Je ne le cache pas. Certains musiciens marquent mon esprit à jamais. Nirvana, Muse, Calogero, Damon Albarn, Elliott Smith, Jovanotti, The Mars Volta, Verdena, The Strokes, Arctic Monkeys, King Krule, Mike Patton, Radiohead, Mina, Jeff Buckley, Coldplay, Matthieu Chedid, Lucio Battisti, The Cranberries, Jack White, etc. La liste est longue.

Mais un quatuor berce mes oreilles chaque année. J’aime redécouvrir leur discographie, à n’importe quel moment. The Beatles est l’un des meilleurs groupes au monde. J’écris la phrase au présent car leur musique est toujours d’actualité.
Doit-on encore prouver à quel point leur influence est incommensurable ?! Plusieurs éléments inspirent encore aujourd’hui de nombreux artistes : leur carrière prolifique, leurs changements artistiques, leur soif de curiosité !

Comment aborder cette richesse musicale ? Help! est leur cinquième disque. Ses morceaux fêteront bientôt 60 ans. Citons-le comme l’album des premières fois : ‘Ticket to Ride’, premier morceau à durer plus de 3 minutes, ou bien même, ‘Yesterday’, où l’on entend enfin plus de 4 instruments. Chaque morceau est empli d’une énergie joviale. Chaque morceau rappelle la fougue des Scarabées. La critique signe et valide.

Je garantis que ce LP est le remède idéal contre la dépression. -New Musical Express (1965)

Ces mots sonnent vrais. Certes, la première chanson est un cri de détresse. Néanmoins, la particularité propre à ‘Help!’, et à l’opus éponyme, se résume à son ambiance joyeuse. Les Britanniques posent leur douleur sur le papier, en déployant une énergie solaire. Le producteur George Martin – souvent considéré comme le cinquième membre du groupe avoue pourtant sa crainte. Il redoute que la bande soit à plat, que la recette ne peut durer. Une peur aperçue dans ses mémoires. Une peur très vite éclipsée : Ils m’ont donné tant de grandes choses que je ne dois pas m’attendre à ce qu’ils continuent. Mais ils l’ont fait. Leur fertilité m’a stupéfié.

Le plus frappant se remarque quand la fiction dépasse la réalité. John Lennon déclare le fond de sa pensée : J’ai écrit ‘Help!’ parce qu’on me l’a demandé pour le film (ndr : une comédie musicale réalisée par Richard Lester, 1965). Mais ensuite, j’ai vraiment su que j’appelais à l’aide… cette folie des Beatles dépassait la compréhension. Je mangeais et je buvais comme un cochon… j’étais un porc, pas satisfait de moi-même, et inconsciemment, c’était un appel à l’aide. C’était ma période gros Elvis.

Antonio Gramsci serait fier ! L’auteur écrit qu’il faut avoir une parfaite conscience de ses propres limites, surtout si on veut les élargir. Faut-il applaudir les artistes capables de se livrer, doués pour casser le monde des strasses et paillettes ? Sûrement. Encore plus lorsqu’on connaît le parcours du guitariste, une fois The Fab Four séparés.

Alors, que reste-t-il d’hier ? Un album indémodable ? Un mélomane indétrônable ? Il subsiste une époque touchée par la grâce d’une mère. Une mère prête à laisser tourner les chansons des Beatles, pour accueillir joie et bonheur dans un salon. Si les cultures ont tendance à me sauver, cette personne ne s’effacera jamais de mon cœur. Grazie mamma !

brunoaleas – Photo ©Alamy

Idles et son ossature

Mon meilleur ami est alien. Lui-aussi porte sa croix. Mais rien ne l’arrête ! Il participe aux manifestations et élève sa voix. Bizarrement, il aime charmer un peuple, même s’il ressent des difficultés pour se débrouiller, à cause des barrières linguistiques, du manque d’argent, de sa couleur de peau. Il capte très vite le fonctionnement du système. Pour l’instant, la vie se résume à 2 actions : amasser de l’argent et trouver un emploi. Bref, se faire chier.

L’alien nous accepte. Il sait que l’envie de profit n’effacera pas son empathie. Autour de lui, les gens ne pensent qu’au pognon. Il peut comprendre… mais personne ne veut le comprendre. Il sait juste qu’il doit faire face à un ennemi plus creux qu’une coquille vide. Nous ne nommerons pas ses ennemis. Définissons une réalité, voici l’Europe gangrénée par un venin vieux comme le monde.

L’extra-terrestre s’en bat les couilles. Il préfère écouter des chansons punk. Il assiste alors à un concert mémorable. Les mélodies sont plutôt sophistiquées. Les musiciens sonnent vachement bien. Ils possèdent du beau matos sur scène. L’alien entre dans un pogo et sniffe sa sueur. Il endosse l’ossature d’Idles. Qu’est-ce que ça signifie ? Qu’il embrasse la philosophie du groupe. Elle pousse à réfléchir. Leurs paroles ne sont pas complexes. Elles décrivent ce qui mène au chaos. Comment le prouver ? Ecoutez ‘Danny Nedelko’.

Fear leads to panic. Panic leads to pain. Pain leads to anger. Anger leads to hate.

Le petit homme vert retourne chez les siens. Il sait désormais qu’il faut assumer une évidence… les politiciens ne sauveront rien, tant qu’ils mêleront la peur à leur propagande. Puis, ça se sait, les illuminés respectent une stratégie : diviser pour mieux régner. Des mots terrifiants. Des actes inacceptables. Néanmoins, restons optimistes ! La vie ne se résume pas à 2 actions. Ne perdons pas le goût de la confrontation, le désir de dialoguer. Là-bas, dans l’espace, ils chantent déjà comme Joe Talbot.

He’s made of bones, he’s made of blood. He’s made of flesh, he’s made of love. He’s made of you, he’s made of me. Unity.

brunoaleas – Illustration ©Selçuk Mutlu / Il faut que tu respires (2011), 70 x 100cm, huile sur papier (courtesy of Espace 251 Nord)

We Hate You Please Die, parlons émotions

Quand on devient sensible, quand on aimerait exprimer ce que traverse le cerveau… mettre des mots sur ses émotions est salvateur. Ensuite, la vie serait vraiment plus simple ? Réponses d’un groupe de Rouen.

We Hate You Please Die est une bande punk, active depuis 2017. Lorsque je découvre leur titre ‘Adrenaline’, mes yeux s’arrêtent sur les paroles. Euphorie, âme, ces sujets chantés sont souvent fascinants. La première question frappant mon esprit se réfère à l’adrénaline. L’hormone parfois recherchée lors de situations tendues. Je contacte alors le trio pour savoir si c’est une bonne chose de ressentir l’adrénaline sur scène. La réponse fut franche et directe.

Evidemment. Ça aide à se déstresser, à se motiver, à donner le meilleur de soi-même à chaque concert. Si on ne sait pas trop la gérer, ça peut nous faire accélérer les tempos des morceaux mais c’est intéressant d’apprendre à gérer ça au fur et à mesure. Et puis, globalement, si on avait jamais d’adrénaline, la vie serait bien triste.

Pour les personnes trop paumées, trop larguées, en inadéquation avec leur époque, dialoguer n’est parfois pas l’action la plus aisée. Dès lors, une interrogation se pose. S’exprimer au sujet de ses émotions, ça s’apprend ou pas ?

Oui, mais ça ne devrait pas. Quand on est enfant, on nous apprend les émotions simples, à mettre des noms dessus. Puis, en grandissant on est de plus en plus contraint.e à garder tout ce qu’on ressent pour soi-même, à paraître en permanence maitre.sse de ses émotions et à ne pas avoir de faille. Du coup, il faut désapprendre cette pudeur, parce qu’elle nous bloque et nous renferme sur nous-mêmes, alors qu’en vrai, il faut dire aux gens qu’on aime qu’on les aime, et aux connards, de rester loin.

brunoaleas – Photo ©Charlotte Romer