Erudition Sans Complexe

Par.Sek et l’incompréhension

Par.Sek s’inspire de ces derniers mois aux évènements inédits. L’arrivée de la pandémie provoque un chamboulement de nos habitudes, ainsi que 5 nouveaux morceaux du duo ! Aux sonorités dansantes et relaxantes, Les vrais trucs est l’EP qu’il défendra sur scène.
Une espèce de fil rouge se note tout au long de l’écoute. Plusieurs thèmes sont abordés, du climat à l’amour de l’Autre. Une thématique prime au-dessus du reste : notre incompréhension face au monde. Une sensation qui nous suit depuis la naissance.

Même si cela semble trompeur, l’œuvre n’est point un tract militant pour l’écologie, la paix dans le monde ou la fin d’un capitalisme toxique… Par.Sek n’a pas cette prétention.
Leur démarche est bien plus socratique qu’il n’y paraît. Que chacun demeure juge de ses pensées personnelles. Nul besoin d’imposer une morale à tout un chacun.

VISUEL_LIVE2_Crédits Ronan Dore

Ecrire des chansons me fait un bien fou. Cela me permet de comprendre des choses, en tout cas de voir où j’en suis par rapport au monde. S’il y a des gens qui sont touchés par mes textes, c’est très cool. Mais je n’ai pas l’impression d’y montrer la réalité. C’est bien plus de l’ordre du regard. D’où le titre de l’EP qui est une blague.
On ne peut pas prétendre refléter la réalité via un regard très personnel lié à un endroit, à un contexte de vie propre à une personne.
-Simon Padiou, chanteur et claviériste de Par.Sek

Lorsque le flou des mesures sanitaires, la séparation de nos proches et la déprime dictent nos journées, des poètes pointent le bout de leur nez pour poser des mots justes. A une époque où l’on échange sa liberté contre un QR Code, quelques artistes (Vald, Eric Clapton) dénoncent les folies actuelles, sans censure, sans regret.
« RIEN » est né durant le premier confinement. Ce morceau sonne optimiste. Il est important de construire un avis critique, loin des influences malsaines (la biz à Victor Bonnefoy, vidéaste confondant la propagande d’Etat aux discours critiques sur le cinéma).
Les dernières paroles de la chanson m’évoquent une autre pensée : qui nous empêche de considérer les réflexions de notre entourage comme source de sagesse ? Diminuer notre incompréhension journalière commence souvent au moment où l’on écoute les idées d’autrui. Laissons l’art de convaincre aux corrompus, aux moralistes, aux bien-penseurs… la musique est notre cure.

DRAMA  Photos ©Manon Sabatier & ©Ronan Dore

Salmo incendie les étiquettes

Salmo incendie les étiquettes. L’Italien balance un crachat de qualité, au Noël dernier. Plus de deux minutes, c’est le temps qu’il lui faut pour citer quelques angoisses. Les étiquettes sont nombreuses : fascistes, communistes, anti-vax et j’en passe. Xanax, cette foutue merde à supprimer du marché, est un mot si puissant et si révélateur de nos faiblesses, qu’il figure aussi sur la liste.

A force de nommer tout et n’importe quoi, l’être humain divise. Diviser pour mieux régner ? Si ce n’est pas l’objectif de nos dirigeants, comment nier ce fait de créer des espèces de luttes des clans en permanence ?! Pensez aux termes essentiels, non-essentiels. Pensez à cette distinction obligatoire à réduire un être humain à la figure du non-vacciné. Les mots ont une puissance. L’artiste l’a très bien compris. Il se lâche quant à son rôle, lors d’une interview face à l’acteur Alessandro Borghi (Suburra, Sulla mia pelle, Dalida).

Le problème, c’est que les gens, surtout les rappeurs, portent cette croix de devoir obligatoirement envoyer un message positif. Mais ce sont des conneries : quand tu écris une chanson, tu ne dois pas faire de la rhétorique, tu n’as pas dire aux gens ce qu’ils doivent faire.
Tu dois raconter ton histoire, et si quelqu’un a une histoire similaire à la tienne, alors là se crée la magie.
Salmo

Il révèle aussi ce qu’est le meilleur moyen de réciter devant la caméra. Il suffit de faire abstraction du jugement de soi-même, ainsi que celui d’autrui.
Dans un monde idéal, personne ne poserait de présupposé à chaque rencontre. Malheureusement, hommes et femmes ont besoin de tout expliquer. Ce constat date de la nuit des temps. A l’Antiquité, les Grecs donnent du sens à leur vie à travers leurs nombreuses mythologies.

Aujourd’hui, nos repères deviennent de plus en plus flous. Le rappeur tombe à pic.
« PLOF » traduit peut-être une seule évidence : le consensus ne nourrit pas l’esprit critique. Nous pouvons nous détacher de la novlangue des gouvernements étatiques. Nous pouvons construire un vrai raisonnement, à l’instar du punk Salmo. Il est temps de cultiver son jardin.

DRAMA – Photo ©Nicola Corradino

Gomma et la vieillesse

GOMMA a la rage ! Zombie Cowboys, leur nouvel album, porte au débat. Le groupe de Caserta questionne notre système capitaliste… et il a bien raison !
L’argent appelle l’argent. L’investissement n’est pas synonyme de bonheur. Moins encore l’éternelle augmentation de capitaux.

Le thème n’est point simple à aborder.
Dès lors, comment conclure l’opus ? Les propos de « SENTENZE » s’éloignent du monde de la finance et partagent d’autres constatations. Le morceau apporte une touche de poésie mémorable à l’œuvre. Il fonde un sagace parallèle entre jeunes et vielles générations.

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En tant que jeunes, nous ressentons ce qui est exprimé via « SENTENZE ». On y explore la perspective, et l’envie qui en découle, de vivre la sénilité. Cela reste un mode de vie tout à fait imagé puisque nous ne sommes pas encore vieux. C’est le dernier rempart d’espoir de ceux qui ne peuvent concevoir une idée de l’avenir. C’est-à-dire, se réfugier dans l’idée que lorsqu’on vieillit, le sentiment de résignation prendra le dessus. -Giovanni Fusco, guitariste de GOMMA

La jeunesse a un pouvoir d’action. La vieillesse signe le début de la fin.
« SENTENZE » ne donne pas d’ordre. Le morceau ne se veut pas moralisateur. Il souligne une observation faite sur les générations d’antan. D’ailleurs, ce constat est rempli d’admiration. A un certain âge, ne plus protester devient naturel. Les derniers acteurs de nos sociétés cherchent bien plus souvent à se reposer, en fin de vie. Qui sommes-nous pour les blâmer ?

Le quatuor propose une vraie réflexion sur nos désirs. Ses membres ne se résument pas à de banals punks. Leurs chansons n’ont pas pour unique but d’éclater sa tête contre le Mur de Berlin. Est-ce que notre confort, notre époque, notre indifférence nous éloignent des révolutions ? « SENTENZE », via son ambiance apaisante et son message pertinent, démontre ô combien la bande sait soulever ce type question universelle.

DRAMA – Photos ©voolvox & ©Alessandro Pascolo

Le shamanisme de Léonie Pernet

La musique peut fédérer. La musique peut relaxer. Elle peut surtout consoler.
Après une rupture, une déception, un dégoût inexprimable, ce n’est pas un/e proche qui venait me rassurer à 200%. Euterpe est ma seule partenaire. Elle m’accompagne dans chaque galère. L’équivalent d’une drogue sans ses côtés toxiques.

Léonie Pernet comprend cette vision du quatrième art. On l’aperçoit lorsqu’elle délivre une performance hors-norme sur Radio Nova. Elle rejoint cette force de vouloir englober tout type de public, les enjouées, tout comme les désespérés. Elle fait preuve de shamanisme. A l’inverse de l’effet d’une danse de la pluie, elle invoque le Soleil. Une magie possible grâce à ses sonorités africaines. A coups de derboukas ou de chants liturgiques, l’artiste nous emporte vers un univers très singulier. L’electro y vient apporter une touche de modernité. L’ambiance est parfaite pour la radio française l’invitant dans sa Chambre Noire.

Trop d’informations fusent dans mon cerveau, une fois initié le premier morceau. Les instrus de Léonie Pernet n’ont rien de minimal. Les synthés se fondent à merveille aux différentes atmosphères du Cirque de Consolation : la transe de « A Rebours », la rage planante propre à « Il pleut des Hommes », « Mon amour tu bois trop » et sa ténébreuse poésie.

La scène permet à la multi-instrumentiste de s’évader. Quant à sa dernière œuvre en date, elle symbolise bien plus qu’une simple évasion.

Le titre (NDRL : de son second album) recouvre à la fois l’aspect théâtral de nos vies, le besoin que nous avons d’être ensemble, mais aussi ce second souffle, ce mouvement intérieur qu’est la consolation. -Léonie Pernet (Les Inrocks, novembre 2021)

La musicienne met sa mélancolie de côté et compte célébrer la vie. L’appel aux esprits subsahariens est imminent. Qui est prêt à danser sur son coup d’Etat musical ?

DRAMA – Photo ©Jean-François Robert

OrelSan a tout dit

Quoi ? Qu’est-ce qu’on vient d’entendre ?! Pardon, Aurélien ? OrelSan est de retour ! Ce n’est pas l’instrumentation de ‘L’odeur de l’essence’ qui me ravit. Je n’accroche toujours pas aux délires de Skread. Il livre des sonorités datés, sans grand renouvellement…
qui s’apparentent à du Kanye West de Wish.
Via ce nouveau clip, l’attention est directement portée sur les paroles du rappeur !

Titre politique. Punchlines politiques. Attitude ? Politique, bien sûr ! OrelSan passe le cap de la maturité. Fini le temps où sa pensée se limitait à Les mecs du FN ont la même tête que les méchants dans les films. Son morceau, tiré de Civilisation, dépeint des constats bien plus poignants. L’hypocrisie humaine : critiquer les riches quand on aime posséder de l’argent. L’incompréhension face au système scolaire : on ne forme pas des citoyens, on le devient. L’échec des dirigeants étatiques : le ras-bol se ressent et se ressentira dans les rues. Et surtout (merci Orel d’en parler) : une paranoïa toujours plus grandissante, où tout semble trop sensible.

Une phrase particulière marque l’esprit. Elle symbolise une idée éternelle.

L’histoire appartient à ceux qui l’ont écrite.

Je vous laisse interpréter ce passage. Pour ma part, je crois qu’il souffle un vent d’optimisme, malgré la noirceur de ‘L’odeur de l’essence’. Il n’est jamais trop tard pour faire valoir son dégoût de la société. OrelSan le fait à travers son art. Il passe au scanner nos actualités, nos peurs et nos problématiques.
Certes, son instru ne casse pas trois pattes à un canard. Néanmoins, ‘L’odeur de l’essence’ donne une sacrée envie de découvrir
le quatrième album de l’artiste !

brunoaleas – Photo ©OrelSan

Damon Albarn et l’importance du voyage

L’exil est parfois une étape obligatoire pour les êtres vivants. Quoi de mieux pour se confronter au réel ? Se déplacer d’un territoire à une autre demande de l’investissement moral. L’écoute, le dialogue et la curiosité sont souvent à favoriser.
Si un homme apprend énormément au sujet des bienfaits du voyage, c’est bien Michel de Montaigne (1533-1592).

Faire des voyages me semble un exercice profitable. L’esprit y a une activité continuelle pour remarquer les choses inconnues et nouvelles, et je ne connais pas de meilleure école pour former la vie que de mettre sans cesse devant nos yeux la diversité de tant d’autres vies, opinions et usages. -Extrait de Les Essais

Le philosophe, une fois atteint de maladie, entame des pérégrinations en Europe. Il tient même un journal, ayant un intérêt plus médical que littéraire. Aujourd’hui, un autre artiste sort de ses terres natales, en quête de nouvelles créations : Damon Albarn. 

En Islande, il se concentre sur un ensemble de morceaux formant The Nearer the Fountain, More Pure the stream flows. L’œuvre sera la démonstration de l’importance des voyages. Entouré des centaines de volcans et de gigantesques glaciers, l’Anglais honore un pays à la nature grandiose. Pour ce faire, il apparaît aux côtés de moult musiciens performants, aussi bien des violonistes qu’un saxophoniste. Initialement, ce nouveau disque est pensé pour être une pièce orchestrale dépeignant les paysages islandais. La crise covid et l’enfermement déclenchent l’écriture de cet projet, de quoi chanter de légères paroles.
Le leader de Blur est également en deuil, son ami Tony Allen nous ayant quitté l’an passé. Sa renaissance s’exprime en musique. L’ouverture de Royal Morning Blue illustre en partie ce constat : Rain turning into snow.

Son couplet final fait penser à une lutte, l’humain contre un vide permanent. Comme si nous étions toujours en recherche de contact social. Damon Albarn livre une autre raison de voyager : vivre des expériences parmi plusieurs personnes ! Partager ses savoirs n’a rien d’insensé. L’enfer n’est pas les autres.

Alors voyagez ! Comment comprendre les notions de liberté et d’égalité, si l’on voit uniquement le monde à travers nos traditions et croyances ? Fuguer amène bel et bien à se connecter vers d’autres réalités. Du haut de sa tour, Damon Albarn ne se plaint pas bêtement de la disparition d’un ancien monde (Once, there was cinema, and we had parties. And the light at the top of the tower could reach Argentina). Il joue un air latino, content de troquer sa souffrance contre la poésie.

brunoaleas  Photo ©Matt Cronin & Nathan Prince

BadBadNotGood en place publique

Encore un article engagé ?! Soyons francs. Nous vivons un moment historique qui sera conté dans les manuels scolaires… même si l’envie d’oublier est tentante. Les mesures sanitaires dictent l’avenir de nos sociétés. Il est presque impossible d’éviter le sujet aux diners de famille, en terrasse ou face à son médecin.
Il y a quelques semaines, BadBadNotGood dévoile ‘Signal from the Noise’. Je n’ai effectué aucune recherche quant au message des séquences filmées. De cet article résulte mon humble interprétation. La vidéo de leur morceau semble refléter les changements de notre quotidien.

Duncan Loudon filme un homme qui s’attache un casque à la tête. Serait-ce la figure de l’artiste drogué par sa propre musique ? Qui sait ? En tout cas, il trace à la craie son espace de jeu, situé sur une place publique. L’individu est quasiment incompris par la société. Ensuite, un policier intervient pour l’interrompre et l’éloigner. Notre protagoniste continue pourtant d’exercer son art.

Ce clip est sûrement la meilleure métaphore des derniers évènements européens. Des Gilets Jaunes violentés par les forces de l’ordre. Des mesures sanitaires empêchant tout un chacun de vivre. Des politiciens qui ne donnent jamais la parole aux citoyens, vu que le referendum est un concept inimaginable en Belgique. En d’autres mots, le clip expose un manque de contact, une invisible communication. Comme si le cinéaste mettait en image un grand malaise. Celui ressenti par moult artistes, séparés de leur public. Ces séquences amènent également à une autre problématique.

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L’épidémie a été l’accélérateur d’une organisation policière du monde qui était déjà en germe. Le fait que tout se passe à distance, le télétravail, le télé-enseignement : tout cela est homogène avec la vision du monde des puissances dominantes. Je ne crois pas que cela constitue un contrôle absolu de nos vies par l’informatique. C’est plutôt un monde où les rapports sociaux n’impliquent plus le partage d’un même espace. Or, la politique nécessite des rencontres entre des gens qui vivent dans des espaces et visibilités séparés. L’utopie dominante n’est pas tant le contrôle que le fait que chacun soit bien à sa place : l’enseignant, l’élève, et ainsi de suite. -Le philosophe Jacques Rancière (Les Inrocks, n° 1316)

Que ce soit à travers des spectacles, ou bien même sur les bancs d’écoles, des professions rendent les interactions indispensables. Le journalisme pratiqué sur Teams est une vaste blague. Des leçons données par e-mail ne riment à rien. L’être humain a besoin de partager son humanité.
En outre, si on ne critique plus notre système en place publique, autant laisser nos dirigeants foncer dans le mur. Il n’est jamais trop tard pour réfléchir sur ces questions… les images de ‘Signal from the Noise’ parlent d’elles-mêmes.

Non à une société où l’on a besoin d’un ticket pour assister à un concert. Non à une réalité dans laquelle le droit de manifester est bafoué. Ne plus exister dans un lieu commun relève de la dystopie. Même si nos causes sont vides de sens, nos expressions artistiques illustrent souvent nos convictions et couleurs politiques… parfois, cela vaut tout l’or du monde.

Mon conseil ? Il n’y a pas de bonne façon de faire quoi que ce soit.Duncan Loudon

brunoales – Photos ©Duncan Loudon

Et la reprise musicale fut…

Lors de la réouverture de La Zone (Liège), une sensation particulière a dû traverser bon nombre de sauvageons autour de moi. La rage de vivre est parfois indescriptible. La soif d’adrénaline est tout à fait compréhensible. Ce soir-là, tout un chacun a sué de la tête aux pieds, en écoutant des morceaux punk/metal. Ce soir-là, la joie a explosé à travers la danse et les chants.

IMG_8276Down To Dust à La Zone (04/09/2021)

Les mesures covid de notre gouvernement nous plongent dans une espèce de science-fiction sans nom. Mais durant l’évènement musical, tout le monde était dans un Ailleurs.
Il est temps de comprendre que les artistes ne sont pas de simples vendeurs de rêves. Cette expression est assez ignoble et n’est qu’un dixième de leur objectif. Les artistes permettent d’accéder à de nouveaux questionnements, à de nouvelles perspectives sur notre monde. Certes, certains croient que les artistes ne servent qu’à divertir… néanmoins, d’autres déclarent fermement qu’une société sans culture est vouée à mourir.

Liège bouillonne et bouillonnera encore de créativité ! De jeunes groupes naissent pour revenir à ce que nous aimons : s’évader d’un système anxiogène ! Empty Head, Karma Nova et Naked Passion ne se gêneront pas pour défiler dans les salles liégeoises. Dès lors, comment partager toute son énergie sur scène ?

Notre but en live n’est pas de recréer nos morceaux tels quels. Nous voulons profiter de la magie du concert pour traduire l’énergie qu’il y a dans nos titres. Chaque membre apportera de l’authenticité et de la spontanéité dans son jeu, vu que l’improvisation n’est pas proscrite sur scène. Puis, le groupe est d’accord sur le fait qu’il est important de repenser notre style de musique, une fois en spectacle. -Gilles Vermeyen

Le jeune chanteur/guitariste de Sonic Tides va bien plus loin dans son raisonnement. Il expose un point important du quatrième art.

Quelle est la raison première de notre implication musicale ? C’est de faire du live.
Pour nous, c’est ultra important. C’est notre motivation principale : jouer un max, en essayant d’emmener les spectateurs pendant un instant, avec nous, dans notre univers. C’est l’essence même des musiciens : transmettre et encapsuler une émotion, une ambiance, ou un état d’esprit dans une chanson.
Ensuite, c’est communiquer et susciter cet état d’esprit au public, en concert. Peu importe si cela signifie assourdir leurs oreilles avec des larsens désagréables et angoissants, ou si c’est jouer sur une basse dynamique avec des harmonies vocales douces et mélancoliques !

Si son argumentaire vous paraît trop flou, savourez « Throught My Bones ». Ce morceau est calibré pour la scène. A la fois ravagée et relaxante, la chanson fera bondir tout mélomane.

DRAMA – Photos ©DRAMA (La Zone, 04/09/2021)

Tounu et le corps libre

La France compte son lot d’artistes surfant sur de la techno hilarante. Salut C’est Cool remporte peut-être la palme d’or de l’humour stellaire. Tounu débarque ensuite avec sa version des faits : acceptons la nudité pour s’affranchir des règles et des préoccupations ! Le clip farfelu de leur deuxième single annonce du lourd. Un ton bon enfant et des sonorités dansantes sont au rendez-vous. Le duo donne envie de brûler des vêtements.

C’est à se demander si ces Français sont inspirés par les traditions allemandes. Sont-ils les enfants du Freikörperkultur (FKK), fruit d’une longue tradition outre-Rhin ? Ce concept du XIXe siècle signifie ‘la culture du corps libre’.

En Allemagne de l’Est communiste, la FKK constituait une véritable échappatoire dans un pays où les restrictions et les privations étaient nombreuses. Se dénuder représentait une façon de se sentir libre dans une période tourmentée et face à un État répressif. –Robin Tutenges

Qui sait si la nudité est l’ultime stade à atteindre pour s’éloigner des normes ? Méditons en bougeant notre derrière à l’écoute de facéties tounesques !

DRAMA  Illustration ©Tounu

Danser avant l’Apocalypse

La fin du monde est un vaste sujet. Loin de moi l’idée de jouer les Greta Thunberg du dimanche. Notre chute n’est pas à nier. Pas besoin de balancer des chiffres menant à une déprime certaine afin de le comprendre. Parmi les fléaux terriens, citons les feux de forêts, les tsunamis et les trous dans la couche d’ozone. Sans compter les nombreux ouragans qui s’abattront sur nos territoires. Le réchauffement climatique réserve bel et bien des catastrophes. A quoi s’ajoutent des foules capitalistes qui consomment trop et trop vite.

Les confinements imposés par diverses nations freinent-ils les dangers environnementaux ?
La course à la mondialisation semble bien plus difficile à arrêter. Dernièrement, le navire coincé au canal de Suez le prouve sans nul doute. D’ailleurs, les humains ont une sacrée envie de survivre dans leur petit confort. Comme si nous devenions les putes des GAFAM.

Le confinement, c’est la grande victoire du monde virtuel. Il fait beau dehors, il n’y a pas d’avion, les oiseaux s’en donnent à cœur joie, le potager attend, et je reste cloîtré comme un con dans l’électronique, à tapoter sur un clavier. -Pablo Servigne (Wilfried n°12)

L’auteur oublie un point important : on peut s’en sortir à l’aide de la musique !
Découvrons trois tueries spatiales qui donneront envie de danser avant l’Apocalypse.

Rone – Rone & Friends

Pour l’amour de la drogue.
J’ai du flair. J’avais rédigé un article sur la scène electro de France qui bouillonne ces derniers temps. Une œuvre confirme encore ce constat.
Rone arrive pile poil au moment où les artistes de Molière sont au top de leur forme. Via son nouvel album, il réunit la crème de la crème : la punk Jehnny Beth, les poètes d’Odezenne, l’écrivain Alain Damasio et j’en passe ! Chaque morceau s’enchaîne extrêmement bien. Erwan Castex pose ses tripes sur ce projet aux multiples facettes. A l’instar des personnages de sa pochette, nous planons vers d’autres cieux plus radieux.

De La Groove – EQUILIBRIUM

Pour l’amour de la danse.
Souhaites-tu enflammer la piste de danse ? Savoure la compilation du label français De La Groove ! Elle s’écoute notamment sur Soundcloud et Spotify. De quoi sauter de joie, porté par la zic de 6 artistes internationaux, au carrefour de la house et du funk.
Avec plus de 2.000 vinyles vendus en 3 ans et plus d’une cinquantaine de soirées, De La Groove est à suivre de près. Je vous laisse avec « Kissin’ (Club) », parfait pour les fans de Modjo et Crystal Waters !

Shlohmo – Dark Red

Pour l’amour de la collapsologie.
Dark Red de Shlohmo ne date pas d’hier. L’opus de 2015 est un must pour tout passionné d’électro. Un classique pour certains, un indémodable pour d’autres. L’instru est lourde. Elle manipule énormément des graves sonorités tout en étant… quasi démoniaque. Le jeune Américain signe peut-être son œuvre la plus complète. Celle-même qui a fédéré plusieurs personnes prêtes à se faire tatouer l’illustration de l’album. 
Ces 11 titres suffisent à nous baigner en eaux troubles. Non pas à cause de la fonte des glaces, mais bien grâce à une homogénéité instrumentale qui sonne de façon unique. 

DRAMA  Illustration ©_ogygie
Notre playlist PAX pour les amoureux du genre

Les saintes paroles artistiques

Natacha Polony parle d’épistocratie. Lors de son interview chez Sputnik, la journaliste tient un discours raisonné sur le système en place. Les plein pouvoirs sont aux mains des scientifiques. Le citoyen n’a rien à dire.

En dépit de son analyse pointue, n’ayons pas peur des mots… on subit une espèce de dictature. Promenade sans masque, amende. Grosse fête chez toi, amende. Les matchs de foot illustrant des joueurs démasqués, possible. Les attroupements dans les transports en commun, possible. L’absurde dépasse la raison. On nous entube jusqu’à l’os (politesse ++ activée). 

Il est temps d’écouter les oubliés. C’est pourquoi, au lieu de donner la parole aux Saints Virologues, le micro passe aux artistes ! Ces derniers pèsent leurs mots. Ils remettent en question la musique actuelle. Ce même domaine cadenassé par des foutues mesures à la con (fuck politesse).

Quelques irréductibles Gaulois vivent encore en Belgique. De quoi se rassurer. Saule a un avis très prononcé quant aux alternatives remplaçant les concerts réels. Le live streaming apparaît comme un outil grandiose. Cependant, un musicien n’en est pas un autre. Afin de réaliser un spectacle filmé de façon professionnelle, le savoir technique n’est point à la portée de tout le monde. Le budget permettant de s’offrir un bon matériel son/image peut être une autre contrainte. Saule préfère attendre un retour à la normale.
Qui veut vendre son âme au capitalisme, moteur d’une culture d’écrans ?

J’ai refusé toutes les sollicitations pour du live streaming. J’ai dû en recevoir plus d’une cinquantaine. Ce n’est pas mon truc. Comme spectateur et artiste, je suis dingue de vraie musique live. Je préfère me réserver pour les concerts publics. Le live streaming, c’est un sparadrap.
Hormis chez -M-, Cali ou Aubert, le résultat est nul. Tu es un artiste dans sa bulle dont les yeux deviennent globuleux, lorsqu’il se rapproche de son écran pour voir si les suiveurs mettent des emojis ou des pouces levés. Moi, j’ai besoin de la réaction physique des gens, des cris, des regards, du contact, des mouvements de foule, des applaudissement, bref tout ce qui fait l’intensité d’un art vivant.
 -SAULE (Larsen n°39)

L’ancien chanteur de Dillinger Escape Plan partage une approche visionnaire. Il sait travailler sur ses envies, quand les médias traditionnels se foutent royalement de l’industrie musicale. A l’image de Mike Patton et de son Ipecac Recordings, il fonde son propre label nommé Federal Prisoner. Ce type d’initiative annonce une nouvelle ère. Saluons ces artistes qui se dédient à une véritable musique indépendante. Aucune maison de disque pour dicter des ordres. Aucun public à satisfaire. D’après le musicien, inutile de se soucier du genre lorsqu’on assume une identité.
Greg Puciato ne sera jamais aveugle.

Je sens qu’on a atteint un point critique dans l’évolution humaine, un moment où on choisit ce qui va être important ou non pour nous dans le futur.
A chaque fois qu’une société n’a pas accordé d’importance à l’art ou à la culture, c’était durant une période sombre de l’Histoire. 
-Greg Puciato (New Noise Magazine n°55)

Stuart Braithwaite note une obsession au Royaume-Uni : sauver l’industrie de la pêche. Le compositeur de Mogwai affirme que le secteur culturel rapporte bien plus d’argent. Pourtant, personne ne mentionne cette donnée… Sans oublier qu’après un pénible Brexit, le Covid va déclencher la fin de moult formations musicales.
Pendant ce temps, les gouvernements mondiaux n’ont aucun scrupule à confiner les peuples. Désirent-ils vraiment que l’on développe un esprit critique ?!
Ces dernières années effacent l’importance de la culture. Il ne reste plus qu’à proposer une révolution dont la bande-son serait 
As The Love Continues.

Durant de telles périodes, les gens ont besoin de l’art, de livres, de musique,
de films, de la télévision. C’est plutôt le moment de mesurer l’importance de la culture plutôt que de l’oublier. 
-Stuart Braithwaite (New Noise Magazine n°56)

DRAMA  Illustration ©François Boucher

Le meilleur hymne de notre époque

Le meilleur hymne de notre époque n’est pas sorti cette année. Il y a 22 ans, Subsonica révèle « Liberi Tutti ». Ce morceau prône toute libération mentale des asphyxies sociales. Il provient de l’album Microship Emozionale. Moult mélomanes considèrent ce second album comme l’apogée artistique des Turinois.

N’oublions pas que l’œuvre est au carrefour des genres : electro, rock, funk et… pop ! La bande détient la force la force de se distancier des standards méditerranéens, tout en produisant des titres radiophoniques. De « Tutti i miei sbagli », présenté au Festival de Sanremo, à « Discolabirintho », écrit en partie par Morgan, leader des Bluvertigo, autre tuerie de l’espace !

En plus de livrer des tubes ultra accessibles, l’opus transpire une rage juvénile. Ce n’est pas hasardeux si le guitariste Max Casacci avoue que l’album a bercé l’adolescence de plusieurs personnes !

Centrons-nous sur « Liberi Tutti » afin de comprendre cette envie de vivre en brisant ses chaînes.

Liberi, liberi, liberi, liberi tutti.
Dai virus della mediocrità.
Dai dogmi e dalle televisioni.
Dalle bugie, dai debiti.
Da gerarchie, dagli obblighi e dai pulpiti.
Squagliamocela.

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La chanson cite une série de préoccupations. Des problèmes à ne pas éviter, mais dont il faut se libérer. Loin de la débile et ringarde TV. Ou hors des hiérarchies pesantes, des dogmes scolaires. A vous de définir si le ton est engagé ou dérisoire. En tout cas, il ausculte notre société malade et sa catastrophique évolution. Je n’en peux plus des virologues considérés comme des messies sur les plateaux télévisuels. Je me demande ce qui freine les étudiants à créer un blocage massif au vu du manque de contacts, de respect et d’aide à l’enseignement belge.

Nous manque-t-il un Joker version Todd Phillips pour bousculer les mentalités ?

« Liberi Tutti » apparaît presque comme une prophétie. Il suffisait de ne plus donner de crédit aux plus puissants. Arrêtons de nous voiler la face : les hautes sphères préparent une nouvelle économie mondiale. Peut-être que les concerts, les cinémas et les spectacles d’antan n’auront plus lieu d’être. La culture, dite non-essentielle, coûte sûrement trop chère aux dirigeants… Quelle tristesse, alors que le secteur culturel propose des solutions : nombre de personnes limitées selon les tailles des salles et installation de machines faisant circuler l’air sans arrêt. Mais non. On préfère rester assis dans la plus grande parano…

Subsonica semble loin de son message initial, inscrit sur tous les réseaux et dont Microship Emozionale voit sa réédition (toujours plus de money dans le biz ?). Pourtant, « Liberi Tutti » ne perd pas son charme ! A écouter encore et encore, en dansant jusqu’au bout de la nuit.

Drama – Illustration bannière ©Youtube