Quelques événements ont divisé les fanatiques : Star Wars VIII, le final de Game of Thrones, celui de l’Attaque des Titans. Ces fanatiques décident alors de lancer des pétitions. Pourquoi ? Pour tourner ou écrire leurs œuvres fétiches d’une autre manière… quelle bouffonnerie.
Je déteste les ultimes séquences de GoT. Néanmoins, je ne désire pas voler la plume d’un/e auteur/e. Continuer la lecture
Film
Anderson et la perfection
On dit qu’il existe deux types d’artistes : les jardiniers et les architectes. Les premiers créent de manière désorganisée, laissant les idées voyager entre leurs deux oreilles, voguer au gré du vent et, peut-être, germer dans une des terres fertiles de l’imagination.
La méthode des deuxièmes est radicalement différente. L’architecte construit ses œuvres comme on construit une tour : d’une idée viennent les plans, des plans vient la structure, puis seulement, la construction. L’architecte sait où son œuvre va atterrir avant même son instrument. Bien avant l’atterrissage de la plume ou du pinceau sur le support de création.
Bien sûr, une méthode n’est pas supérieure à l’autre. Il ne s’agit-là que de différences dans la façon d’aborder la création. De plus, c’est une division dichotomique, qui n’est à considérer que de manière abstraite dans un milieu aussi vague et riche que la création artistique.
Mais les œuvres, parfois, se retrouvent empruntes d’un style correspondant plus à un extrême qu’à un autre. Là où le style jardinier pourrait être décrit par des termes tels que « vaporeux »,
« vague », ou « déstructuré », le style de l’architecte est synonyme d’un nom : Wes Anderson.
Le lecteur s’est peut-être déjà retrouvé devant un de ces films. Ultra-symétrique, chorégraphié, où chaque geste microscopique a un sens, où chaque plan est articulé avec le suivant dans une danse frénétique.
The Grand Budapest Hotel et plus récemment, L’Île aux chiens sont des exemples d’œuvres du réalisateur américain. Elles ont su charmer le public, tout en jouissant de grands succès critiques.
Mais il peut être pertinent de remonter la chronologie. Découvrons une œuvre plus ancienne qui mérite, elle aussi, de l’intérêt.
En 2009, Wes Anderson est au milieu de sa carrière actuelle. Il sort un film qui restera emblématique de son travail : Fantastic Mr. Fox.
Un livre qui s’ouvre, une immense plaine rousse sous un ciel doré. Tel est le début du film, dont on rentre vite dans l’intrigue. Parcourant la plaine, un couple de renards vole de la nourriture. Soudain, une maladresse les met en mauvaise position, puisqu’ils se retrouvent enfermés, piégés dans une cage.
Après cet incident, Mme Renard fait promettre à monsieur renard qu’à l’avenir, ils ne voleraient plus. Finie la vie de malfrat. C’était sans compter la nature sauvage de son compagnon, qui finira par voir ressurgir ses pulsions bien plus tard, une fois sa vie de famille solidement établie.
À lire ces lignes de synopsis, on pourrait croire que Fantastic Mr. Fox est une histoire banale, plate, sans rien de grandiloquent. Malgré son parti-pris plutôt simple, le film arrive à séduire par son style et son ambiance.
Le plus important dans une histoire, ce n’est pas ce qu’on raconte, mais comment on le raconte.
Cette phrase n’a jamais été aussi vraie que pour les films de Wes Anderson. Le scénario semble à première vue sans intérêt, mais pour peu qu’on se laisse bercer par l’histoire, chaque élément jusqu’au plus simple devient un plaisir. La simplicité n’est qu’une base pour laisser l’ambiance guider nos émotions. Cette simplicité, le cinéaste la traduit par une sorte de « perfection académique ». Tout est millimétré pour respecter les règles cinématographiques de symétrie, d’équilibre, de règle des tiers…
Pourtant, le résultat divise. Là où certains y trouvent de la satisfaction, d’autres y trouvent de la frustration. Car c’est parfait, trop parfait pour que ce soit agréable.
Et c’est là le principal reproche qu’on pourrait faire à Wes Anderson. Le travail est si propre qu’on a du mal à le considérer comme cohérent. On attend que la gaffe survienne. Et puisqu’aucune œuvre est exempte de défauts, lorsqu’elle survient, sa puissance est décuplée. Dès lors, on y fait beaucoup plus attention. A travers Fanstastic Mr. Fox, la moindre maladresse ou sortie volontaire des codes classiques est visible telle une rugueuse paroi voulue lisse.
Pour prendre un exemple, parlons du scénario. Contrairement à la réalisation, celui-ci est très peu structuré. L’élément déclencheur est divisé en plusieurs rebondissements : la promesse de M. Renard, le déménagement, l’arrivée du cousin Kristofferson…
La plupart des histoires classiques se seraient contentées d’un déclencheur simple et précis, surtout les contes.
De nombreux autres éléments de narration sont démantelés comme celui de la psychologie des personnages. Cela n’est pas un problème en soi. Les règles narratologiques ne sont que les sentiers battus que tout auteur choisit ou non d’emprunter, pour une raison ou une autre.
Cependant, dans le contexte d’une œuvre aussi académiquement parfaite que Fantastic Mr. Fox, il renvoie une impression étrange que cette discipline soit hétérogène, présente dans certains aspects du film, mais pas d’autres.
Fantastic Mr. Fox est une adaptation du livre éponyme de Roald Dahl. Il est donc logique que les styles divergent entre le récit de base et la réalisation. Néanmoins, il est de la responsabilité de l’équipe du film de rendre le tout cohérent. Et si Anderson est du côté des architectes, c’est un choix étrange d’utiliser une matière de base déstructurée sans la transformer davantage.
Jardinier ? Architecte ? Un peu des deux ? Chaque auteur choisit sa voie. Nous attendons tout de même que les divers corps du récit s’accordent dans un style plus ou moins commun. Il n’existe qu’un maître-mot : la cohérence.
Dans le cas de Fantastic Mr. Fox, la volonté de perfection visuelle fait ressortir chaque rugosité scénaristique. La mélodie est belle, trop belle. Si bien qu’en profondeur, on l’entend dissoner.
Lou
Perdu dans Le Labyrinthe de Pan
ATTENTION SPOILERS
Sombre. Le Labyrinthe de Pan est une œuvre très noire. Peu après la guerre d’Espagne, la jeune Ofelia rencontre un faune. La créature lui déclare qu’elle est la princesse d’un monde souterrain. Elle doit alors réussir trois épreuves pour obtenir son titre.
Cette création hispano-mexicaine partage des propos et un visuel frôlant les ténèbres. Elle développe 2 thèmes : la joie finie de l’imaginaire infantile et la tristesse infinie d’une guerre civile. Continuer la lecture
Soul : dialogue d’âmes
Quoi de mieux que la compagnie à la lampe pour éclairer ces temps obscurs ?
Après de nombreux succès qui ont fait sa renommée, Pixar revient à la charge avec un nouveau long métrage : Soul. Une fois encore, c’est Pete Docter qui est aux commandes. La-haut, Monstres&cie, Toy Story, Wall-E… Le studio d’animation doit beaucoup au réalisateur américain, signant de son nom ses films les plus emblématiques.
Joe Gardner, professeur de musique dans un collège de New York, saisit l’opportunité de sa vie. Aspirant pianiste de jazz, il a l’occasion de jouer avec une star locale. Mais alors qu’il s’apprête à réaliser son rêve, il chute et tombe… Dans le coma.
Dans cet état de mort partielle, il aura un avant-goût de l’au-delà (« great beyond » en anglais), et surtout du « great before », l’endroit où nos âmes se trouvent avant notre naissance. Il y fait la connaissance de nombreuses entités étranges. Parmi elles, 22, une âme sans but dans la vie, qui cherche sa voie.
Si Soul a des airs de Vice-versa dans sa concrétisation de concepts abstraits, il va bien plus loin. Toute une mythologie merveilleusement cohérente est construite pour servir le propos du scénario.
La force de Pixar ? Sa capacité à parler de thèmes difficiles de manière pertinente, et compréhensible, pour tous les publics. Après l’apocalypse (Wall-E), les rêves brisés (Là-haut) et la mort (Coco), la compagnie à la lampe s’attaque au plus difficile des thèmes…
Le sens de la vie.
©SF Weekly
Ce sujet ridiculement vaste et abstrait pourrait sonner comme une mauvaise parodie métaphysique, mais c’est pourtant le sujet de Soul. Que faisons-nous sur cette terre ? Sommes-nous nés pour réaliser nos rêves, ou pour suivre notre destin ?
Le film ne répond pas à ces questions. Il les pose, et laisse les personnages et l’intrigue débattre entre eux, bien qu’une vague conclusion en ressorte.
Ce débat complexe est prétexte à un spectacle visuel époustouflant. Les concepts illustrés sont si abstraits qu’on peut les représenter de mille façons différentes. Les décrire avec des mots serait une tâche complexe. Comment décrire les « Jerry », ces personnages filiformes, qui sont des sortes de fonctionnaires de l’au-delà ? Soul utilise le langage visuel, bien plus direct que le langage littéraire, pour rendre ces concepts intelligibles. L’illustration est réalisée avec brio, et le film est l’un des plus visuellement créatifs de la compagnie.
Lorsque Joe tombe dans l’au-delà, le « paradis » est illustré tel une sorte de trou noir inversé, d’où la lumière sort, éclairant les âmes des défunts sur un immense tapis roulant. Le « great before » quant à lui, est un immense pré bleuâtre baigné d’une lumière onirique et de bâtiments à l’architecture impossible.
Soul est une grande histoire. C’est probablement un des meilleurs Pixar, et son propos est important. Qui plus est, sa structure narrative est novatrice. Certaines règles du scénario sont brisées magnifiquement pour servir le message de l’œuvre. Il n’y a pas de climax. Le héros atteint ses objectifs, mais il n’en éprouve que peu de satisfaction. Pourquoi ? Le film démontre par son histoire et sa structure que le plus important dans une vie n’est pas la réalisation de ses rêves, ni même le chemin que nous avons utilisé pour y parvenir. Ce qui est important dans une vie, c’est la vie elle-même. C’est chacun des microéléments qui la compose. Un bruissement de feuilles, une brise au visage, le goût, le toucher, l’odorat.
Si la vie est une histoire, alors son intérêt ne réside pas dans son climax, dans ses objectifs, dans l’accomplissement. Si la vie est une histoire, alors son intérêt se trouve dans les effluves du monde qui nous entoure, et dans son dialogue avec notre âme.
Lou
TOP FILMS 2020
Quelle année.
Pour ce qui est du cinéma, 2019 a marqué les esprits avec pléthore de films plus passionnants les uns que les autres. Joker, Parasite, Little Women…
2020 a donc un rôle étrange à jouer. Comment succéder à une telle année en plein milieu d’une pandémie mondiale, qui arrête toute l’industrie ?
En termes de cinéma, dire que 2020 a été une année riche serait mentir. Mais une erreur odieuse serait de dire que rien d’intéressant n’a vu le jour.
Car quelques pépites brillent sous la couche de crasse de cette année difficile.
Citons les plus belles d’entre elles.
En avant n’est pas le meilleur des Pixar. Mais il n’en est pas moins extraordinaire.
Touchant, visuellement somptueux, et doté d’un scénario qui fonctionne à merveille, il n’y a pas à douter. La dernière œuvre de la compagnie à la lampe mérite la première place parmi les films de 2020.
Le choix a été cornélien, puisque c’est The Platform qui arrive en seconde position. Ce film d’horreur espagnol ayant eu un franc succès sur Netflix a parfaitement su capter l’essence de son genre. Imaginez un monde dans lequel votre quantité de nourriture est aléatoire. Qui n’aurait pas peur de se retrouver, un jour, enfermé à mourir de faim, et pratiquer le cannibalisme pour ne pas y rester ? The Platform est à mourir d’angoisse, palpitant à souhait. Il ne mérite cependant pas la première place à cause de sa conclusion, trop vaporeuse et vide de sens. Elle nous laisse un peu… sur notre faim.
Plus horrifique mais moins angoissant : Invisible Man. Scénariste du premier Saw, Leigh Whanell est aux commandes de cet hybride horreur/science-fiction.
Invisble Man reprend bien sûr son concept de base au célèbre roman de HG Wells. Mais Whanell modernise ce mythe connu. Cette soupe étrange de science-fiction et d’horreur psychologique produit une œuvre riche, et intéressante.
Dernier film d’horreur de la liste, Vivarium arrive en quatrième. Surréaliste et étrange, l’œuvre raconte l’histoire d’un couple enfermé dans un monde qui se répète sur lui-même.
Si on admet que la répétition sans but est le propre de la folie, alors Vivarium offre un monde fou et déstabilisant. Le spectateur sera franchement perturbé par l’univers du film, qui est sa grande force.
Enfin, en dernier se trouve Le cas Richard Jewell, du grand Clint Eastwood. A l’âge de 90 ans, le réalisateur de Gran Torino (2008) n’a pas fini de nous surprendre.
Il partage une effroyable vision de la société américaine. Un homme, faussement accusé de terrorisme, se voit complètement détruit par les médias, qui n’ont pas fini de le persécuter. Le film suivra le point de vue effroyable de cet inadapté social. Quelle angoisse.
Difficile de résumer 2020 autrement que « l’année de l’angoisse ». Partout, les films jettent un regard désespéré sur le monde.
Et si le confinement n’a rien amélioré à cette « culture de la claustrophobie », il s’agit bien là d’un courant esthétique puissant qui émerge. Durera-t-il ? Quelle sera sa puissance ? Quels seront les chefs d’œuvres qui le marqueront ?
Nous verrons cela en 2021. –Lou
TOP 5
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En avant – Dan Scanlon
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The Platform – Galder Gaztelu-Urrutia
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Invisible Man – Leigh Whanell
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Vivarium – Lorcan Finnegan
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Le cas Richard Jewell – Clint Eastwood
Dans une année 2020, où les grosses sorties ont été reportées, ce sont les films originaux qui triomphent. Des œuvres qui assument leur radicalité de forme et/ou de fond et qui font confiance à l’intelligence du public… un comble pour une année de confinements.
Et s’il y a bien un réalisateur qui construit une œuvre en dehors de tout standard, c’est bien Terrence Malick (Badlands, La Ligne Rouge, Tree of Life). Toujours en quête de moments de grâce, il filme dans Une vie cachée le parcours d’un agriculteur autrichien qui sacrifie sa vie, en renonçant au service dans l’armée d’Hitler. Le cinéaste nous offre un film fleuve d’une poésie, d’une spiritualité, d’une conviction et d’une beauté formelle absolument incroyable. –AS
TOP 5
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Une vie cachée – Terrence Malick
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Madre – Rodrigo Sorogoyen
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Tenet – Christopher Nolan
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Les choses qu’on dit, les choses qu’on fait – Emmanuel Mouret
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Drunk – Thomas Vinterberg
J’ai triché. J’avoue ne pas respecter l’exercice. L’œuvre filmique la plus bouleversante de l’année est un court, et non un long métrage. Tim Dup s’allie à Hugo Pillard. Le résultat ? 16 minutes de questionnements universels. Le genre de métaphysique qui torture soit à l’adolescence, soit à l’âge adulte. A quoi bon faire ce que l’on fait ? Tim Dup tente d’y répondre, tout en exposant les coulisses de son second album. Qu’en restera-t-il ? évoque tout simplement la beauté de la vie.
Par contre, s’il fallait absolument retenir un et un seul long métrage, il se nomme Felicità. (allez le voir, c’est tout)
Drunk est également un coup de cœur inoubliable. L’être humain ne peut se défaire de certains vices. Les drogues n’ont rien de miraculeux. Thomas Vinterberg le démontre d’ailleurs à l’écran. Danser. Boire. Mourir. Renaître. Ce film est à voir et revoir.
L’humour efficace n’était pas non plus absent. Borat 2 illustre une Amérique malade. Malgré la réussite du nouveau projet de Sacha Baron Cohen, c’est l’imagination Taika Waititi qui occupe ce classement. Ce dernier réalise un drame et une comédie mémorable, Jojo Rabbit. Se moquer d’Hitler n’est peut-être plus si subversif qu’avant. Néanmoins, il est toujours possible de sensibiliser à des thèmes tragiques via l’ironie.
Quant à Uncut Gems et 1917, je n’aimerais pas vraiment les voir à nouveau. Sauf que leurs propositions cinématographiques sont vraiment pertinentes. L’un synonyme d’une course malsaine, dont le climax final traumatise. L’autre, signe des performances techniques qui font vivre la guerre aux spectateurs.
Nulle science-fiction pour ce top. C’est bien atypique de ma part !
Une seule évidence apparaît claire et nette : cette année, des artistes sacralisent des tranches de vie grâce à un œil critique et créatif. –brunoaleas
TOP 5
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Qu’en restera-t-il ? – Hugo Pillard
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Felicità – Bruno Merle
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Drunk – Thomas Vinterberg
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Jojo Rabbit – Taika Waititi
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Uncut Gems – Joshua et Ben Safdie
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TOP/FLOP 2019 – TOP/FLOP FILMS 2018 – TOP FILMS 2017
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MEILLEURES SERIES 2020
2020, c’est la bancale, mais charmante, histoire de The Eddy. Un retour assez décevant de La Casa de Papel. Ou une saison 2 moyennement appréciée de Brassic. Quant à The Umbrella Academy, elle revient avec des protagonistes toujours plus développés et charismatiques !
C’est également les adieux exprimés à moult séries. Mon abandon de la dixième saison de Walking Dead, au scénario pathétique à souhait. Un au revoir rattrapé par rapport au chef d’œuvre nommé Mr. Robot (2015-2019). L’arrivée et départ de Unorthodox. L’annulation de I Am Not Okay With This…
Puis, un ultime rendez-vous avec la dernière saison de Dark. Ce délire allemand complète trois volets maîtrisés de bout en bout. Sans compter qu’il illustre la science-fiction dans ce qu’elle a de plus fascinant à offrir.
Cette année clôt bel et bien un chapitre du petit écran. De formidables idées visuelles quittent nos yeux de spectateurs. –DRAMA
Romy : le cinéma belge du futur ?
La Belgique a aussi son cinéma.
États-Unis, France, Japon, Corée… Partout, les salles sont remplies de films étrangers. Ce n’est pas une mauvaise chose. Les idées du monde circulent, les pépites d’ailleurs se partagent, et l’échange s’enrichit.
Mais une fois n’est pas coutume, penchons-nous sur le cinéma belge. Voyons quelles œuvres du septième art se trouvent sur les seuils de nos portes. Récemment, une partie de notre rédaction à eu l’occasion de se rendre au festival des Enfants terribles, à Huy. Là, une sélection de courts-métrages, en partie belges, étaient présentés.
L’un d’eux, Romy, a attiré notre attention. Car ce film de 19 minutes, réalisé par Marie Mc Court et Ilya Jacob, sonne comme une véritable catastrophe.
Quatre jeunes filles rentrent dans un hôtel un soir d’hiver et négocient une chambre. Après cette petite victoire, le groupe fait rentrer en douce d’autres personnes. Une fête commence et se décline vite en une grande orgie qui durera toute la nuit.
Tout d’abord, ce serait mentir de désavouer la beauté de l’image. Comme souvent dans ce genre de projet, la réalisation et la photographie sont très abouties.
Romy est techniquement très réussi. Mais son scénario est effroyable. C’est simple, il ne se passe pratiquement rien pendant toute la durée du film.
Au diable la structure narrative, acquise presque universellement depuis l’Antiquité ! Ce récit-là ne va nulle part. La situation du début est la même que celle de la fin. Aucun rebondissement. Ni surprise, ni risque. Nulle décision importante. L’intrigue est si plate que le visionnage de Romy n’est finalement qu’une longue attente vers la fin. On s’y ennuie comme dans un ascenseur, à regarder distraitement les alentours, sans que rien ne semble avoir l’intention de susciter quelques émotions.
Les personnages sont relativement nombreux. Mais leur nombre aurait pu être de trois, de vingt, ou de mille, la donne aurait été strictement la même. Aucun d’eux, ou presque, n’a de personnalité propre. Ils sont des coquilles vides voyageant dans l’histoire sans aucune transformation. Ne prenant aucune décision importante, ils se laissent simplement porter par le flot lent du récit comme une barque vide sur une mer calme. Ennuyeux à mourir.
Alors, on est en droit de se questionner. Comment raconter une bonne histoire ? Des centaines de pages sont écrites chaque année sur la théorie scénaristique. Des règles innées existent depuis la nuit des temps, écrites dans le seul but de prodiguer un certain dynamisme aux récits. Mais Romy se croit au-dessus de tout cela.
On dit qu’accompli est l’artiste qui brise les règles. Mais encore faut-il en construire des nouvelles, garder une certaine structure, un certain but, un objectif. Romy ne fait, a priori, rien de tout cela.
Quelle est l’intention du court métrage ? Quel est le but de son existence ? Puisque la seule chose qu’il montre, finalement, est une orgie à moitié assumée au sein d’un groupe de jeunes, on peut imaginer que son intention est de parler de sexualité. Il s’agit là d’un thème riche qui peut donner source à de bonnes histoires.
Mais il ne suffit pas de filmer un paquet de macaronis sur fond blanc pendant vingt minutes pour parler de macaronis. Il faut voir plus loin que ça. Où est le point de vue moral ? Le sexe est-il une bonne chose ? Ou pas ? Ou dans certaines conditions ? Mais Romy ne répond à aucune de ces questions. Le film se contente de voguer sans but vers l’inconnu. Il illustre sans rien orienter.
On pourrait rétorquer que le simple fait de montrer des relations sexuelles de manière aussi libérée est en soi une morale. Le sexe est si libre qu’il n’y a même plus besoin d’un récit pour l’enchaîner. Et cette réflexion prend sens. Nous irons même plus loin. Il existe un genre cinématographique entièrement dédié à ce genre de récits : la pornographie.
La pornographie n’est pas une mauvaise chose en soi. Son intention est même louable puisqu’elle a comme but de satisfaire un besoin primaire. Là où les autres catégories de films se contentent de chercher dans les besoins plus abstraits. De plus, elle a comme avantage l’absence consentie de véritable structure narrative, puisque son but peut être atteint avec une unique action narrative précise.
Mais quelle émotion notre film veut-il stimuler ? L’excitation ? Non. Sinon le film aurait été entièrement pornographique, ou au moins centré davantage sur la volonté d’exciter, ce qui ne semble pas être le cas. Or, Romy ne semble vouloir initier aucune autre forme d’émotion. Et un film de fiction qui ne suscite aucune émotion, ça ne sert à rien. Autant regarder un mur.
Mais peut-être que l’intention de ce film dépasse l’esprit de notre rédaction. Peut-être n’est-elle perceptible que par l’élite de l’élite des cinéphiles, ou par une tranche particulière de la population. Pardonnez cette critique si ses lignes sont écrites sous l’impulsion de la colère. Cette ire découle peut-être de la frustration de ne pas comprendre le sens du récit.
Romy a été réalisé par deux étudiantes d’une célèbre école de cinéma belge. Celles-ci sortent à priori de quatre ans au moins de formation liée à la réalisation cinématographique. Il a été accepté dans de nombreux festivals à travers toute l’Europe et ses auteurs continuent de produire des films récompensés. On pourrait donc comprendre Romy comme un contenu belge typiquement apprécié par les sphères cinéphiles du pays. D’autres seraient tentés de l’imiter, et nous aurions ici un aperçu de ce à quoi ressemble le court-métrage belge de 2020.
Une question se pose donc. Intentions ou pas, voulons-nous des films comme Romy pour représenter le cinéma belge dans les prochaines années ?
Lou – Illustrations ©Romy
Un pays qui se tient sage
Un pays qui se tient sage est un documentaire d’une heure trente. Il revient sur les violences entre policiers et manifestants en France, entre novembre 2018 et février 2020, et il vaut assurément le détour.
D’abord, même si nous avons vu certains de ces extraits lors de JT ou sur les réseaux sociaux, vivre ces images réelles de violences, d’explosions, de cris, de pleurs, de façon compilée et dans les conditions visuelles et sonores d’une salle de cinéma est une expérience puissante.
Drunk
Et si on parlait de réalisme ?
Non pas de la froideur des frères Dardenne, ou de l’intouchable Ken Loach.
Via Drunk, Thomas Vinterberg signe une œuvre réaliste où des astuces cinématographiques ne sont pas à l’écart pour privilégier le silence ou la nature. Quatre amis, profs d’un même lycée, mettent en pratique la théorie d’un psychologue norvégien. L’homme aurait dès la naissance un déficit d’alcool dans le sang. Soudain, leur quotidien change du tout au tout lorsqu’ils enchaînent les verres. Ils se désinhibent jusqu’à charmer leur entourage et… tomber dans les déboires d’une surconsommation d’alcools. Continuer la lecture
Le Grand Bain
Deux ans après la sortie du Grand Bain, on ne se questionne plus afin de savoir si un rond entre dans un carré. Il dépeint la vie sur plusieurs angles. Tout commence via des personnes déprimées et souvent déprimantes. Elles évoluent dans un cadre qui changera leur vision du monde : des cours de natation synchronisée. Continuer la lecture
Tenet… que devient Christopher Nolan ?
Pour résumer, « Le dernier Christopher Nolan » n’est pas un navet en soi, mais le réalisateur nous a habitué à beaucoup mieux. Espérons que ses prochaines œuvres seront davantage à la hauteur de son génie.
Les voitures qui explosent sont trop nombreuses et les moments de calme rarissimes. Le film ne respire jamais. On a l’impression de vivre une perpétuelle descente de montagnes russes qui efface toute contemplation. La beauté d’un sujet puissant en devient presque secondaire.
Tenet aurait pu être une grande histoire. Son sujet est riche, original, et se prête à un océan de possibilités. Mais la manière dont il est exploité ne lui rend pas honneur. Souvent, on a l’impression que le film se prête à de l’action gratuite sans rien apporter au scénario.
Certes l’inversement du temps n’est pas un thème léger. Il est nécessaire de construire toute une cathédrale scénaristique pour le faire tenir debout. Mais cette cathédrale-ci est de loin la moins esthétique du réalisateur.
Si l’intrigue est difficile à résumer, c’est parce qu’elle est peu compréhensible. Même si Nolan nous a habitué à de grandes histoires denses, celle-ci reste d’une éprouvante opacité. Il est complexe de comprendre les liens entre les différents évènements, à suivre l’histoire sans effort. En résulte un casse-tête peu cohérent.

Pour contrer la menace que représente ces objets surréels, le héros parcoure le temps à l’envers, combattant les évènements du passé.
De quoi n’y rien comprendre pour l’agent. Il découvre vite que cette technologie est dans les mains d’un parrain russe, Sator. Véritable caricature digne de la guerre froide qui semble être la source de différentes catastrophes.
Un agent secret anonyme est, un jour, confronté à un étrange phénomène. On découvre de plus en plus d’objets ayant la capacité de parcourir le temps… à l’envers. Des balles qui retournent à leurs fusils, ou des objets jetés qui reviennent à la main.
Mais maintenant que l’attente est redescendue, il est temps de se poser la question ; que vaut vraiment le dernier Christopher Nolan ?
Or, la crise sanitaire a mis à mal l’industrie cinématographique. La production avait alors besoin d’un sauveur, d’un messie financier pour remplir les salles. Quoi de mieux qu’un nouveau Inception pour nous sortir de cette misère ? Ainsi, depuis des semaines, la critique se rongeait les ongles, attendant la sortie du fameux Tenet.
Memento, Le prestige, Inception, The Dark Knight, Interstellar, Dunkerque… Il va sans dire que Christopher Nolan figure comme l’un des grands noms du cinéma actuel. Et chaque nouveau film du réalisateur fait frissonner d’attente.
Lou
Les Parfums
Dans le paysage cinématographique actuel, lorsqu’on parle de « comédie française », un frisson parcourt la critique.
Sans analyse détaillée, il est évident que depuis quelques années, une certaine ambiance parcourt le comique de l’hexagone. Même si des réalisateurs comme Quentin Dupieux (Rubber, Le Daim, Réalité) ont su la contester, une mode subsiste.
Le ressort comique actuel, c’est la moquerie sociale. Méchante et gratuite, elle s’attaque aux minorités ethniques et religieuses (Qu’est-ce qu’on a fait au Bon Dieu ?), aux Roms (A bras ouverts), et cetera. Mais jamais ou presque, le Français blanc privilégié n’est moqué.
Comme si l’attaque raciste, bête et facile était devenue l’ingrédient secret sublimant n’importe quel travail du genre subtil qu’est la comédie.
Mais malgré cette vague, certaines œuvres subsistent, et prouvent que oui, on peut faire de la comédie sans moquer l’identité de nos pairs. Les Parfums de Grégory Magne fait partie de ces œuvres-là.
Le moral de Guillaume est au plus bas. Chauffeur, il a manqué de perdre son travail à la suite d’un excès de vitesse. Habitant un minuscule appartement, la juge daigne lui donner la garde de sa fille, avec qui les liens disparaissent peu à peu.
C’est au bout du rouleau que Guillaume est envoyé en mission. Il devient le chauffeur privé d’une certaine Anne Walberg, diva hautaine au métier hors du commun.
En effet, Anne est « nez ». Son travail consiste à concevoir des parfums. Mais sa carrière stagne. Elle utilise son art au service de travaux peu prestigieux : ambiances de supermarchés, masques d’odeurs d’usine…
Au départ opposés, les deux protagonistes vont finir par nouer une relation. Ils vont apprendre énormément l’un de l’autre, jusqu’à s’affranchir de leurs problèmes respectifs.
L’œuvre est légère, innocente, sans prétention. Ce n’est pas une grande histoire, ni une comédie débordant de gags à se plier de rire. Aucune situation n’est artificiellement créée dans un but comique. Les blagues arrivent quand elles sont les bienvenues, lorsque le récit les attend.
Le métrage est paisible, d’une tendresse simple. Aucun personnage n’est moqué ou jugé par le film. Il garde de fait un respect profond pour chacun d’entre eux.
On pourrait dès lors lui attribuer une absence de conflit clair. D’action, peut-être. Et il est vrai que le scénario est un peu bancal et ne semble aller nulle part. Cependant, l’intrigue retombe sur ses pattes dans les dernières minutes, vers une fin mémorable.
Si on souhaite rire aux éclats, oublions Les Parfums. Mais si on veut se laisser bercer par une comédie simple et innocente, on y trouvera son bonheur.
Lou