Réalité

Je ne suis pas cinéphile, je suis mélomane -Il m’aura d’ailleurs fallu plus d’une année avant de me plonger dans Réalité. Est-ce un hasard si je considère Quentin Dupieux comme le cinéaste le plus intéressant du moment ?

Dupieux: l’Edika du cinéma. Physicien quantique, Alchimiste, et humoriste absolu (-273.15°).

Un des principes fondamentaux de la physique quantique est que toutes les réalités coexistent. Ce que vous n’avez pas expérimenté dans ce monde, vous l’avez vécu dans un autre, parallèle. Tout est possible, tout existe: vous êtes la plus adulée des stars du rock; vous êtes aussi un tétraplégique anonyme, pauvre et… avec trois tétons…

Non-sens ? Vraiment ? L’analyse est assez simpliste.

Une vérité transpire du film Réalité, sans prétendre savoir précisément ce que l’Artiste a voulu nous transmettre. En effet, rien n’indique, lorsque l’on aborde les symboles, que celui qui les utilise est pleinement conscient de leurs portées (encore moins celui qui les observe). Ce n’est d’ailleurs absolument pas le but. Un symbole est un message tronqué que vous devez compléter. Son interprétation n’est jamais vraie ou fausse, elle est.

Dans cet (sic) œuvre, Dupieux pose une question: Qu’est-ce que la réalité ? Ensuite, il apporte sa réponse, énigmatique. Je dirais même, sa réponse ésotérique et néanmoins humoristique.

Réalité repousse les limites habituelles du cinéma. Vous êtes bousculé, et surpris en permanence. Il est impossible que le spectateur ne gamberge pas, même (surtout ?) le plus stupide. Un film hautement intellectuel, un film d’érudit qui ne se prend pas au sérieux.

Contrairement à la plupart des critiques, je suis convaincu que rien n’est laissé au hasard dans le travail de ce musicien de l’image. Il ne s’agit pas d’un film absurde. L’absurdité est un instrument parmi d’autres dans cet orchestre de mirages.

L’œuvre de Dupieux s’intègre parfaitement dans le surréalisme. A vous d’investiguer. A vous de vous interroger sur votre niveau de compréhension. Dupieux vous stimule, vous oblige à réfléchir (fait rarissime dans l’univers audiovisuel contemporain), et glisse, discrètement, des réponses existentielles, à la manière d’un Adepte d’Hermès Trismégiste qui parsème ses ouvrages d’énigmes, de fausses pistes, et de vérités subtiles. A vous de trouver. A vous de remettre de l’ordre.

Le langage humain est trop pauvre pour transmettre certaines informations fondamentales de manière linguistiquement claire. Le symbolisme est le seul moyen. Comprenne qui peut, comprenne qui doit, comprenne qui ose. Ce n’est pas un élitisme de connaissance, mais un élitisme de courage.

Cet ouvrage est labellisé « comédie ». Pourquoi pas ?

Vincent Halin

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