S’ouvrir l’esprit, s’ouvrir les yeux et les oreilles, s’aventurer en terrain inconnu… Cette soif de découverte est l’apanage de l’enfance. A l’âge adulte, ces besoins diminuent, ces envies disparaissent… chez la plupart d’entre nous. La pression sociale, la peur et la fatigue sont généralement à la source de l’effritement de notre curiosité innée.
Heureusement, nous ne nous soumettons pas tous à cette fatalité. Nous pouvons rester éternellement frais. Ma curiosité est mon moteur. Mes découvertes sont mon carburant.
Diamanda Galas fut une magnifique découverte pour moi. Elle nous raconte des histoires, dans une ambiance de Piano-bar sombre, déjanté, voire Gothique (ou même d’Art Gothique, au sens où Fulcanelli l’entendait). Même dans une salle de plusieurs centaines de personnes, on peut ressentir un climat très intime.
Elle ne s’adresse pas à tout le monde, elle s’adresse à ceux qui le désirent! En effet, ce qu’elle exprime n’est pas agréablement reçu par tous. Elle aborde la musique d’une manière très personnelle, très unique. Elle excelle tant au piano qu’au chant, et empreint ces deux disciplines de son univers particulièrement singulier. Nombreux sont les détracteurs d’une telle approche… Je fais partie des amateurs. Soit.
Un concert de cette Artiste est une expérience interpellante. Cela va bien au-delà du simple divertissement, il s’agit d’une invitation à l’éveil. J’ai ressenti quelque chose de mystique pendant son spectacle. Il y a une dimension invisible, habituellement rejetée par notre société. La magie, la transmutation, les Esprits, tout ça n’existe pas, n’est-ce pas ? A moins que… ??? Vous préférez regarder une publicité montrant une jeune femme à moitié nue, lascive, qui semble vous désirer? Elle correspond parfaitement aux critères esthétiques imposés par la société de consommation, pourtant, ne serait-ce pas elle le mirage ?
Etes-vous prêts à regarder, à écouter le monde tel qu’il est? Dans la splendeur secrète de son horrible réalité ? Il semble que ce soit bien là que se situe le peu de libre-arbitre auquel nous pourrions prétendre. Nous avons le choix de croire ce qu’on nous dit, ou de chercher une autre vérité.
Diamanda Galas nous incite à la découverte d’un monde caché, au même titre que Platon, Zarathoustra, ou d’autres… N’ayez pas peur de ça, c’est bien plus enrichissant que la télé-réalité. Ne vous reposez pas. Un homme avisé m’a dit un jour: « Ne te conforte pas dans l’eau chaude de tes problèmes, et plonge-toi dans l’eau froide de la vie! ». Je ne peux pas vous dire qui est à l’origine de cette phrase, mais je vous souhaite de vous approprier cette cinglante sentence!
J’ai adoré le concert de Diamanda Galas au Handelbeurs de Ghent, ce mercredi 20 avril 2016 ! Elle m’a élevé.
60 ans de musique… Essentiellement de musiques de films.
En effet, qui n’a jamais écouté Ennio Morricone, n’a jamais vu les classiques du Cinéma occidental (en particulier européen). On pourrait aller jusqu’à dire qu’Ennio Morricone a créé le concept même de « bande originale ». Il n’est pas le premier à s’y être exercé, mais il est le premier à avoir sublimé l’exercice. D’autres ont suivi naturellement.
Bien qu’il continue d’augmenter sa filmographie (ndlr : récemment avec The Hateful Eight, de Quentin Tarantino. Je vous invite d’ailleurs à lire la critique de Cymophan à ce sujet), le Maître accorde sa préférence à la direction d’orchestre. C’est ainsi que nous avons saisi l’opportunité d’aller le voir à l’œuvre, en concert.
Sa précédente tournée « My Life in Music » avait des odeurs de crépuscule. Concerts annulés ou reportés. En cause, initialement un mal de dos qui deviendra plus tard une thrombose…
Heureusement, un répit lui a été accordé, et nous avons pu assister à un concert magistral au palais 12 du Heysel à Bruxelles, le 3 février 2015 (le show était, à l’origine, programmé le 24 octobre 2013).
Revisitant ses œuvres les plus célèbres, pour le plus grand plaisir des fans, même des plus incultes.
La présence de la Diva Susanna Rigacci est comme une cerise sur le gâteau. Son interprétation de « L’Estasi Dell’Oro » (« Ecstasy of Gold », tiré du film non moins grandiose : Il Buono, Il Brutto, Il Cattivo, plus connu en français sous le titre, Le Bon, La Brute et le Truand), symbolise un peu le point d’Orgue du spectacle. Ce morceau est d’ailleurs rejoué en rappel presque à chaque concert.
Le 20 Février 2016, pour la tournée « 60 years of Music », Monsieur Morricone se produit à nouveau au plat pays. Cette fois, c’est le Sportpaleis d’Anvers qui l’accueille. Nous ne pouvions manquer cela! Cette tournée est annoncée comme étant différente des précédentes. Nous pourrons écouter ses nouvelles œuvres. La sortie récente du dernier Tarantino (dont le seul intérêt est justement la participation d’Ennio Morricone… J’aime la critique facile et gratuite) lui donne l’occasion de diriger ses nouvelles pièces en public.
Quel délice.
Mes compagnons et moi-même aurons régulièrement la chair de poule.
La musique d’Ennio Morricone est subtilement saupoudrée d’envolées lyriques flamboyantes qui vous submergent. Et c’est encore plus vrai en concert.
Ajoutez à cela que, pour beaucoup d’entre nous, ces musiques rappellent aussi des œuvres cinématographiques majeures. Vous seriez, très certainement, plongé dans une atmosphère pouvant provoquer l’effet « Madeleine de Proust ».
Ce concert du Sportpaleis était sublime. Susanna Rigacci fait montre d’un talent exceptionnel et d’une technique incroyable. En la regardant, en l’écoutant surtout, j’ai mesuré à quel point le chant est le sommet de l’expression musicale. L’instrument le plus mystique, le plus précis, et le plus magique. On ne triche pas avec le chant. On ne se cache pas.
Ennio Morricone a, comme tous les génies, toujours su choisir ses collaborateurs. Il a longtemps travaillé avec la Soprano Edda Dell’Orso, mais aussi avec le virtuose de la Flûte de Pan Gheorge Zamphir, notablement. Il a collaboré avec Sergio Leone, Pier Paolo Pasolini, Giuseppe Tornatore, Roland Joffé, Brian De Palma, Georges Lautner pour les réalisateurs…
Son approche de la composition était assez novatrice (Elle l’est toujours, mais c’est moins flagrant aujourd’hui, tellement il a inspiré d’autres artistes).
Sans rentrer dans des développements de théorie musicale, Ennio Morricone est un champion de « variation sur un même thème pour orchestre ». Par exemple, le thème joué par les violons, pendant que le reste de l’orchestre accompagne, sera repris par les cuivres, alors qu’à leur tour les violons accompagnent, ensuite ce sera le tour du piano, et ainsi de suite.
Ennio Morricone joue aussi beaucoup sur les décompositions d’accords par différents instruments. Là où le violon jouera la tonique de l’accord, le violoncelle jouera la tierce, la trompette la quinte, et la guitare la 7ème, par exemple.
Enfin (et surtout), il est à l’écoute de la nature, dont il s’inspire judicieusement. Les différents bruits, bruissements, bruits de vent, cris d’animaux sont une source inépuisable dans laquelle le compositeur va se servir. Il a déclaré, dans une interview accordée à L’express :
(…) Même le banal tapotement d’un stylo sur une table, isolé de son contexte, peut se réincarner en musique. Le cri du coyote, si on l’écoute bien, est éminemment musical. Pour le traduire en musique dans Le Bon, la brute et le truand, j’ai demandé à deux chanteurs de crier ensemble, puis j’ai mixé leurs deux voix en ajoutant de l’écho. (…)
Il y a peu de « spectacle » lors de ce genre de concert. ce n’est pas pour cela qu’on se déplace. Les concerts s’écoutent, et se ressentent dans le chair (les poursuiteurs sont au chômage, les lampistes au repos, les danseuses au vestiaire, et le Signor Morricone ne fera pas de « Stage-Diving »).
J’encourage tous les amateurs de musique, qui n’en auraient pas encore eu l’occasion, à assister au concert d’un orchestre philharmonique. Le son produit par 6 violons, 4 contrebasses, plus de 70 choristes, un piano, des dizaines de cuivres et de bois, une basse électrique, une guitare électrique, une batterie, des percussions, un piano, une Harpe, une Soprano… C’est véritablement envoûtant. (par contre, je n’encourage pas les cinéphiles à aller voir le dernier Tarantino… D’ailleurs je n’encourage pas les cinéphiles, tout court).
Sans vouloir faire l’oiseau de mauvaise augure, si vous en avez la possibilité, allez voir Ennio Morricone, tant qu’il est encore parmi nous.
C’est un des compositeurs contemporains les plus intéressant et productif, bien qu’il se considère comme un « chômeur » en comparaison avec Johan-Sebastian Bach.