Tout le monde a un cœur, c’est ce qu’il croit. Voici la pensée profonde de Deku, héros principal de My Hero Academia. Ces simples mots définissent mon admiration pour Kōhei Horikoshi. Le mangaka développe si bien ses personnages. Même les protagonistes intervenant ponctuellement et rarement dans son œuvre sont aux petits oignons ! Puis, je me mets à la place des gosses découvrant son manga. Quel régal de partager des valeurs aussi belles. Trouver le bon en chacun de nous. Se battre pour la justice. Ne pas abandonner ses vaillants camarades. Oui, le voyage touche à sa fin mais le souvenir reste imprégné. –brunoaleas
J’ai une fantaisie qui me revient de temps en temps. Elle surgissait bien plus souvent autrefois, quand mon espace intérieur était encore empreint de regrets. Peut-être l’avez-vous déjà eue ? C’est assez simple : je rêve de retourner dans le passé, à l’époque où j’étais enfant, tout en conservant mes souvenirs d’adulte. Fort de mes expériences, je réaliserais tous mes rêves : réussir tout ce que j’entreprends, faire preuve d’une assurance ravageuse. J’ose, je fais, je me montre. À moi la vie de génie admiré ! Quel bel endroit que ce rêve.
Mais parfois, une pensée me vient et le brise en mille morceaux. Mon cœur se serre, les larmes me montent aux yeux. Dans ce monde rêvé, en faisant le choix de revenir… n’ai-je pas tué ce petit garçon ? Je ne sais pas. Mais ce que je sais, c’est que je l’ai volé à sa mère.
C’est l’été. Yoshiki et Hikaru sont assis sur un banc. La chaleur étouffante de la campagne japonaise est délicieusement atténuée par ces petits bâtonnets de glace bleue, si froids et sucrés. Les deux adolescents savourent le calme serein des vacances alors que le crépuscule approche. Mais au fond de lui, l’un des deux garçons ressent un profond trouble. Un doute qui le ronge.
Tu n’es pas Hikaru, n’est-ce pas ?
The Summer Hikaru Died est un anime qui traite avec une immense tendresse et beaucoup de patience du deuil. Mais aussi de l’acceptation : de soi, de l’autre, du temps qui passe et du changement. Hikaru nous montre avec élégance et maîtrise la différence, si fine et pourtant fondamentale, entre l’acceptation et la résignation.
Mais au-delà de ces réflexions sur les émotions humaines, cela reste avant tout le récit poignant d’un adolescent dont l’amour est mort. « Hikaru« , en japonais, signifie « lumière ». Pour Yoshiki, c’est l’été où la lumière s’est éteinte. Le désespoir de ce jeune garçon, qui se raccroche à la moindre trace de son amour disparu, vrille les entrailles du lecteur. Une tragédie si douce.
Pour garder près de lui ce substitut fragile, il se lance dans une enquête profonde sur l’histoire funeste de son village, risque sa vie face à divers spectres et se reconnecte avec son père.
Même si le drame et l’intrigue sont au cœur du récit, The Summer Hikaru Died comporte aussi quelques scènes d’horreur. Pas de gore, pas de grotesque : seulement de l’effroi. L’effroi qui naît de l’incompréhensible. Grâce à une direction artistique très efficace, j’ai véritablement frissonné devant certaines scènes. Je n’aurais pas cru qu’une histoire de fantômes animée pourrait me produire un tel effet. Mais quand nos héros sont seuls, dans le noir, dans une forêt réputée dangereuse, et que des formes inhumaines bougent avec ces saccades qui nous signalent instinctivement qu’il ne s’agit pas d’êtres vivants, l’angoisse devient difficile à éviter. Bravo.
Et tout repose sur l’atmosphère. Quand un caveau s’ouvre, quand le mystère plane sur cette petite ville, où tout le monde se connaît mais où les secrets sont bien gardés. Le village qui sert de cadre à cette intrigue nous semble à la fois étrange et familier. Comme l’image d’une ville qu’on connait mais qui a changé, sans qu’on sache mettre le doigt sur ce qui ne nous est plus familier. Un malaise diffus.
Mais au-delà des effets, le véritable effroi réside dans le thème central. Celui qui nous trouble, qui nous fait vaciller : Hikaru et Yoshiki sont semblables en ceci qu’ils ont des pulsions, et doivent lutter pour y résister. La perte de contrôle, non pas due à une manipulation ou au destin, mais à notre propre nature. Cet instant où l’on doit trahir ce qui est au fond de nous ou ce qui est à la surface. Deux facettes de ce que nous sommes qui s’entre-déchirent violemment.
Le simple fait de ne pas blesser ceux qu’on aime demande une force immense, et une grande souffrance. N’est-ce pas terrifiant ?
L’Attaque des Titans est un manga écrit par Hajime Isayama en 2009 et adapté en animé en 2013. Cette œuvre a directement été un coup de cœur pour les fans de manga, grâce à son histoire originale et touchante. On débute donc l’histoire avec Eren, le personnage principal et Armin et Mikasa ses meilleurs amis. Ils ont seulement un problème avec le reste de la population, les titans. On va donc, tout au long de l’œuvre, les voir évoluer, vivre des situations atroces, se battre et souffrir. Le récit débute avec l’irruption soudaine du Titan Colossal. La créature détruit le Mur Maria. Cette catastrophe permet aux titans d’envahir le district de Shiganshina. Eren, Mikasa, et Armin assistent impuissants à la mort de la mère d’Eren. Ce traumatisme pousse Eren à rejoindre le Bataillon d’Exploration pour éradiquer les Titans. L’Attaque des Titans reste tout de même plus complexe que ça, car plus on avance dans le récit, plus on va découvrir qu’en fait, c’est l’égoïsme humain qui se cache derrière tout ça.
Nos trois personnages se lient d’amitié avec d’autres jeunes victimes qui sont également assoiffées de vengeance envers ces créatures destructrices. Les jeunes vont se recueillir à cause de leur chagrin et devenir une équipe de confiance plus forte que jamais. Au fur et à mesure de l’œuvre, on va découvrir que tout n’est pas si beau car plusieurs personnes sont en réalité des traitres et sont des personnes du camp adverse qui leur fait subir tous ces malheurs, depuis des milliers d’années. L’œuvre montre donc plusieurs aspects de la société car dans le manga il y a, en réalité, des énormes divisions des peuples et pouvoirs politiques, ce qui peut être relié à notre monde actuel. En explorant les différents personnages, les différentes trahisons et liaisons, on découvre toute sorte de facette de leurs personnalités. On finit parfois par s’attacher vu qu’on les suit pendant leurs moments de détresse, joie, gentillesse, etc. Donc, inconsciemment, on les justifie et on se dit qu’il n’y a pas réellement de gentils ou de méchants. On se fait alors, en quelque sorte, emparer par une empathie. On les défend, eux et leurs actes extrêmes ou leurs raisons d’agir. Selon moi, le manga illustre surtout la complexité des humains. Très souvent, les problèmes de conflits sont reliés au passé, et les soldats, sont juste des pantins du système.
L’Attaque des Titans fait comprendre beaucoup de choses sur les guerres. Lire le manga peut aider à se remettre en question sur les sujets sensibles, comme la division des peuples. Hajime Isayama a, selon moi, voulu faire passer un message sur les différentes convictions qui animent chaque personne/peuple. Il a surtout voulu mettre à l’épreuve notre empathie (chose qui fonctionne pour la plupart des fans). Mais justement, parlons-en. Pour les fans, leur empathie a été remise en question. Est-ce réellement une bonne chose ? Peut-on réellement avoir de l’empathie pour tout le monde ? A mon avis, cet état d’âme ne peut pas être appliqué à notre monde actuel. Tous les gouvernements ne méritent pas de l’empathie. L’œuvre reste une fiction et c’est pour cela que c’est un sujet discutable.
Je recommande donc de vous jeter sur l’œuvre. Une fois la série terminée, si vous avez un avis tranché sur les personnages, alors, il est temps de questionner votre empathie.
Dans un pays moyenâgeux, la population est séparée au nom de la magie. Les ignorants et les sorciers se côtoient mais ne se mélangent pas. Mais tout bascule le jour où Coco, une ignorante, lance un sort interdit qui pétrifie sa mère pour toujours. Pour pouvoir la sauver, elle se voit donc obligée d’intégrer la société des sorciers, en répétant des normes et des savoirs que les autres individus maitrisent depuis la naissance.
Sous son prisme et ceux des autres élèves de l’atelier, l’autrice met en évidence différentes façons d’apprendre dans un monde où chaque citoyen se doit d’être utile. Sans peine de se faire exclure de celui-ci.
Cette histoire met en lumière comment un enfant se positionne avec de telles exigences pour tenter d’avoir sa place auprès des adultes. Le voici victime d’une société qui veut que l’enfant soit un outil prêt à l’emploi, on ne laisse pas la place à ce qu’il soit un enfant.
Avec du recul, on peut faire un beau parallèle avec l’école japonaise où a baigné l’autrice. Mais aussi avec notre éducation belge qui ne cesse de se faire remodéliser pour viser la performance, alors qu’elle ne fait que se dégrader.
Dans de telles conditions scolaires, ne serait-ce pas le moment d’avoir d’autres modèles d’apprentissage pour que les enfants continuent d’apprendre toute leur vie ?
Dandadan ! La série vient tout juste de terminer sa deuxième saison. Quant au manga, il approche déjà de sa conclusion. Sur Netflix, Dandadan est clairement dans le vent ! On y suit deux lycéens aux croyances opposées. Momo Ayase croit aux fantômes mais pas aux extraterrestres, Ken Takakura, lui, pense le contraire. Ils se lancent dans un pari où chacun explore un lieu réputé surnaturel, découvrant rapidement que les deux mondes, l’un des esprits, l’autre des aliens, existent réellement. Leur rencontre déclenche une série d’événements paranormaux, mêlant surnaturel, romance et comédie.
Ce n’est pas rien : des couleurs flashy, une prémisse complètement déjantée qui attire le regard, et surtout un opening de première saison qui a grandement contribué à la popularité de la série en devenant viral sur les réseaux.
Sans oublier un fait, Dandadan se paie le luxe d’être animée par Science Saru ! C’est l’un de mes studios d’animation préférés : tout ce qu’ils produisent devient culte. Leur catalogue est court, mais chaque œuvre est un concentré de créativité. Pensons à Devilman Crybaby, Ping Pong the Animation, Keep Your Hands Off Eizouken!, etc. Ces classiques, je vous encourage à les découvrir.
Côté animation, on a du très lourd. Je suis toujours épaté par la palette de couleurs qu’ils utilisent : des néons qui se mélangent dans une harmonie presque instable. Les phénomènes surnaturels et les éléments futuristes sont sublimés par cette distorsion constante des couleurs et des proportions.
La vitesse est aussi un thème central : chaque impact est travaillé au point que chaque pause dans un échange de coups devient un véritable feu d’artifice visuel. Franchement, ils m’épatent. Il fallait bien une animation de cette qualité pour rendre l’œuvre plus que passable, car le scénario prend plusieurs partis pris radicaux qui feront soit des heureux, soit des écœurés.
Misant tout sur l’originalité de ses thèmes, mêlant, peut-être pour la première fois, des histoires de fantômes et rencontres du troisième type, Dandadan peine cependant à offrir plus qu’un fil rouge très plat. On alterne entre des scènes de flirt lycéen (certes touchantes, mais perdant un peu de l’originalité de la prémisse) et des combats au déroulement souvent prévisible.
Puis, la série mise beaucoup sur son humour, et je dois dire, avec regret, que je n’y ai pas été très réceptif. C’est de l’humour pipi-caca-zizi… difficile de faire plus bas du front, même dans certains ecchi médiocres. Si c’est votre came, vous serez servis : le nombre d’allusions au phallus par minute rivalise avec les comédies universitaires américaines des années 2000. Pénis = *Rire général* Malgré tout, les personnages sont attachants, les designs sont superbes, les combats magnifiques, et la musique incroyable.
Même si je ne suis pas le public idéal, j’ai tout de même apprécié l’œuvre. L’intrigue n’est pas exceptionnelle, mais parfois, ça fait du bien de revenir aux bases, peut-être que c’est justement l’idée. Après tout, l’auteur de Dandadan a été assistant sur Chainsaw Man et Hell’s Paradise. Peut-être qu’à force de voir des anti-héros torturés et des subversions de genre, on a juste envie de quelque chose de plus simple : une histoire d’underdog (celui qui part perdant), puis, son perso s’améliore, chope des super-pouvoirs, bat le méchant, finit avec la fille… tout ça sans se prendre trop au sérieux.
Je te laisser lécher mes nibards… si tu me laisse te pomper le dard.
Vous rêvez d’aller au Japon ? Mais comme moi, vous n’avez pas un rond ? On a LA solution ! La Cité Ardente regorge d’endroits où, le temps d’un instant, vous serez téléportés dans vos mangas ou animés favoris. Bienvenue dans notre tour, au Pays du Soleil Levant made in Liège.
Nos rêves se réalisent parfois grâce à des personnes ayant l’audace de réaliser les leurs.
Il y a cinq ans, je me baladais sur les réseaux sociaux lorsque, soudain, mon œil fut attiré par une nouvelle folle… un manga café venait d’ouvrir ses portes. Je n’en revenais pas. Un de mes rêves s’était réalisé : un endroit où ma passion prenait vie, venait de naître.
En 2020, Mehdi et Abdelmajid ouvrent un manga café : L’Ōtakafé. Une capsule japonaise voit ainsi le jour, pour notre plus grand bonheur, au 34 rue de la Régence.
Aujourd’hui, leur institution fait toujours battre ardemment le cœur des Liégeois.
Notre motivation est de donner la sensation de voyager sans quitter Liège ! Lorsqu’on rappelle à quelqu’un son voyage au Japon, c’est magnifique !
Mehdi
Pari plus que réussi.
La première pièce vous accueille dans une ambiance boisée, feutrée, presque méditative, faisant écho au côté traditionnel du Japon. La dernière salle, quant à elle, plonge directement dans un manga. 900 planches ont été assemblées pour former un tout percutant et émouvant, rappelant les meilleures séquences de vos shōjo, shōnen et seinen préférés ! Le choix des planches ne s’est pas fait uniquement entre les deux propriétaires : ils ont demandé des avis pour être certains de représenter au mieux la diversité des goûts présents, au sein de leur future clientèle.
En plus d’être immergé dans cet univers, vous aurez l’occasion de vivre mille émotions… culinaires ! J’ai eu la chance de goûter leurs melonpans, onigarazus, mochis et délicieux thés. Une fringale vous prend ? N’hésitez plus, vous savez où aller !
D’ailleurs, si Mehdi avait une machine inter-univers, où les personnages de nos animés préférés pouvaient lui rendre visite, il souhaiterait voir Luffy débarquer, pour son côté bon vivant et drôle. Mais il aimerait aussi que Mugen, de Samurai Champloo, passionné de dango, vienne goûter ceux qu’ils préparent pour qu’ensuite, il donne son avis. –Je ne doute pas qu’il en serait fier ! –.
Mais le Japon, ce n’est pas que les mangas et les animés… qu’est-ce qui touche le plus Mehdi dans cette culture ?
La mentalité Bushido qui signifie « la voie du guerrier». C’est un code d’honneur, un code martial samouraï : justice, courage, bienveillance… c’est comme la mentalité shōnen. C’est mon leitmotiv !
Et je peux vous confirmer que Mehdi et Abdelmajid incarnent cette mentalité avec force et justesse ! Leur initiative coche toutes les cases : un endroit merveilleux, des mets succulents, et surtout, un accueil généreux, rempli de sourires.
Vous savez ce qu’il vous reste à faire : foncez à L’Ōtakafé, dès que vous en avez l’occasion. Et… on me souffle dans l’oreillette qu’ils vont déménager dans un lieu encore plus fabuleux. Suivez leur aventure de près, ça promet !
Actuellement, l’animation atteint des niveaux impressionnants. Demon Slayer, L’Attaque des Titans, Jujutsu Kaisen marquent la rétine. Même si on déteste ces univers, on ne peut le nier. Pensez à leurs scènes de tension. Naruto demeure le meilleur anime de baston.
Ordre vs chaos
Quatrième Grande Guerre. Ninjas désemparés, enragés ou de nouveau à la vie. Voici le dernier arc de l’œuvre. Bien sûr, il ne sera pas retenu comme le plus incroyable (final raté + personnages souvent bâclés). Néanmoins, les combats de cette partie ne passent pas inaperçus. Vient alors un duel assez attendu : Kakashi se frittant à Obito. Ordre et chaos. Mesure contre démesure. L’histoire d’une amitié brisée. Elodie Verheyden, animatrice chez Camera-etc, décrit la beauté de la scène.
Nous sommes à un point de la série, bien après le combat entre Naruto et Pain. Les animateurs se sont retenus, cette fois. Il n’y a plus l’animation de l’extrême, composée de ralentis ou d’accélérés. Les artistes se sont nourris des critiques qu’on leur adressait. Là, tout est clair et lisible. Ils ont mis l’argent. Il y a très peu d’arrêt et le combat est super bien chorégraphié. J’aurais tout de même aimé voir plus de déformation. On ne sent pas la force des coups. Les animateurs auraient pu réaliser des séquences plus violentes.
Altruisme vs égoïsme
Une bagarre marque une génération, les enfants des années 2000. Naruto versus Sasuke. L’altruisme pur contre l’égoïsme dur. Un nouveau chapitre s’affiche devant nos yeux. Dès lors, on admire deux gamins, influencés par leur solitude. L’un souhaite devenir chef du village, même après les moqueries subies. L’autre s’éloigne du village, afin d’assouvir sa soif de vengeance. Les voici prêts à s’arracher la face. L’animation, si dynamique de ce passage, n’a pas pris une ride. Elodie l’affirme, sans hésitation.
Les animations en 2D, dessinées à la main, vieillissent très lentement. Contrairement à la 3D, une technique vieillissant très mal. Ici, les enfants bougent bien. Quand on regarde cet affrontement aujourd’hui, on contemple une animation toujours aussi bien rythmée.Lorsque cette séquence apparait au Japon, on voit arriver une nouvelle génération d’animateurs. Ils posent des codes quant aux mouvements, au rythme, sans avoir peur de tester. Ils vont inspirer les futurs animateurs de la série. Plus tard, ces personnes, inspirées par leurs pairs, s’occuperont de la lutte entre Pain et Naruto.
Rien n’est gratuit. Surtout pas le sang et les larmes. Au-delà d’être un illustrateur talentueux, Masashi Kishimoto est un excellent scénariste. Vraiment ? Ne retenons pas la fin d’un manga qui se termine en queue de boudin. Naruto livre réflexions et émotions !
L’intelligence artificielle… vaste sujet. Progrès scientifique pour certains, malédiction du siècle pour d’autres. Petite clause de non-responsabilité : je ne suis ni pour, ni contre cette nouvelle technologie.
Constatons tout de même la pertinence de l’IA dans la médecine. L’Institut national de la santé et de la recherche médicale de France nous éclaire. Tentons d’expliquer le rôle des applications de deep learning. Ces réseaux neuronaux artificiels forment de nombreuses couches pour résoudre des tâches complexes. Elles traitent des images. Ensuite, elles repèrent de possibles mélanomes sur les photos de peau ou dépistent des rétinopathies diabétiques, sur des images de rétines. Leur mise au point nécessite de grands échantillons d’apprentissage. 50 000 images dans le cas des mélanomes, et 128 000 dans celui des rétinopathies. Elles ont été nécessaires pour entraîner l’algorithme à identifier les signes de pathologies. Pour chacune de ces images, on lui indique si elle présente ou non des signes pathologiques. A la fin de l’apprentissage, l’algorithme reconnaît, avec performance, de nouvelles images présentant une anomalie !
Là où l’IA fait mal, se situe en dehors du secteur médical. C’est honteux de l’utiliser pour un vol de données. Par après, les dérives sont nombreuses. Ainsi, combien de personnes clament haut et fort que les robots remplaceront les artistes ?! Trop. Est-ce audible ? Non. Il y en a marre. La force d’un artiste réside dans sa singularité. Personne ne remplacera les aquarelles de Gipi. Personne ne peindra comme Jean-Michel Basquiat. Leur patte est unique. Puis, la machine ne captera pas les subtiles sensibilités des humains, de l’ironie à la tristesse pure.
Un autre artiste me rappelle à quel point un univers ne sera jamais copié à la perfection. L’imaginaire de Yoshitaka Amano est fou ! Il est honoré au Museo di Roma. Je découvre alors l’exposition nommée Amano Corpus Animae (visible jusqu’en octobre). Le dessinateur naît en 1952, au Japon. En 1987, les créateurs de Final Fantasy, Squaresoft, font appel à lui pour donner corps à leur grande saga. Le but ? Etre un franc concurrent à Akira Toriyama. Ce mangaka, connu pour être le papa de Dragon Ball, fut aussi character designer de Dragon Quest.
Mais Amano ne s’arrête pas là ! Une expo lui est dédiée à New York, où il ouvre d’ailleurs un studio, en 1997. En 2019, il réalise une couverture pour Vogue. Il surprend encore, en introduisant un nouveau perso dans Fortnite, en 2023. Un an plus tard, le Japonais fait une halte à Lucca Comics, le plus grand festival de BD d’Europe.
Avril 2025. Me voici donc à une exposition dans le centre romain, inspirée par le festival de Lucca. J’y suis par hasard. Coïncidence de malade. Chance inouïe. Est-ce une expérience inoubliable ? Assurément. Je reste bouche bée, à chaque pièce. Les installations m’impressionnent. Les œuvres sont aux murs, en aluminium, et la musique rythme la promenade. L’ambiance est si agréable. Fabio Viola, curateur de l’expo, résume parfaitement l’une des forces d’Amano. En se penchant sur ses illustrations, on y découvre leur complexité. On y aperçoit un dualisme prononcé. A savoir, le mélange entre des œuvres lisibles à distance et complexes de plus près.
Désormais, posons la vraie question. Pourquoi l’intelligence artificielle ne rivalisera jamais avec un artiste de cet acabit ?
Primo, sa patte est ultra reconnaissable, la marque des génies. Secundo, les meilleurs musiciens, peintres, écrivains ou autres esthètes, suivent souvent une seule volonté : savoir se réinventer. Yoshitaka Amano ne se voile pas la face. Il témoigne pour un livre splendide, The Art of Yoshitaka Amano. A Visionary Master (2025) : « J’ai vu de nombreux artistes piégés dans leur propre style et je crains toujours ce piège ».
Il ajoute une pensée merveilleuse à ce constat. D’année en année, le maître ne se décourage pas. Il continue à tendre vers des mondes inexplorés. Il travaille obstinément sur de nouveaux défis.
Le voyage de l’art, avec ses infinies possibilités, m’inspirent à explorer encore et à pousser les confins de l’imagination collective.
Qui n’a jamais rêvé de se faire la malle ? Qui n’a jamais souhaité abandonner ses terres natales pour réaliser ses rêves ? Amer Béton synthétise cette envie de fuir. Mais Noiro et Blanko, nos protagonistes, ne désirent pas l’exil. Pas directement. Ils restent dans leur ville, en luttant contre tout et tout le monde… en luttant contre eux-mêmes.
Que raconte précisément le manga de Taiyō Matsumoto ? Blanko et Noiro, des orphelins, sèment la terreur dans les rues de Takara. Rackettant bandits, yakuzas et fanatiques, les gamins, surnommés « les chats », sont agiles et prêts à vivre de périlleuses expériences. Ont-il le même caractère ? Noiro apparaît dur et enragé et Blanko, innocent et lunaire.
Le mangaka installe ce duo, au centre de l’intrigue. Pourtant, nos yeux peuvent vite se perdre, au milieu d’une ville surchargée de détails, allant des multiples panneaux publicitaires et maisons collées-serrées, au croissant de Lune, dont le visage s’affiche serein. Sakamoto Days n’est pas la seule BD à soigner ses décors. Taiyō Matsumoto illustre des environnements extrêmement beaux et créatifs. Il sublime le chaos. Mais l’attention se porte sur Noiro et Blanko. Ils courent, volent, s’incrustent dans une ambiance survitaminée, ressentie à chaque coin de rue. D’ailleurs, la lutte est au rendez-vous, comme le cite Louis-Julien Nicolaou, dans un numéro spécial des Inrocks (mars 2017).
Dans l’œuvre de l’artiste, les jeux et élans d’invention que s’échangent les gamins se heurtent aux codes mortifères du monde adulte. Les lois absurdes des yakuzas dans Amer Béton, celles de la compétition sportive dansPing Pong, les unes comme les autres déclinant une philosophie martiale du bushido, le code d’honneur des samouraïs. Il brise toute liberté individuelle, au profit d’un idéal de performance suprême. Cette confrontation fait de l’enfance un temps de lutte et de souffrance, où peut naître une vocation à l’insoumission perpétuelle.
Le conflit inspire donc l’auteur-dessinateur. Il va plus loin. Chaque personnage cherche sa vérité. L’homme à la fois yakuza et père de famille. Le grand-père, aimant et sage. Des enfants liés par le même destin.
Une vérité parfois interrogée, critiquée, voire malmenée.
Vers la fin du manga, un enfant fort énigmatique entre en scène pour sauver Noiro, attaqué par ses ennemis. L’étranger ne cesse de répéter les mêmes phrases. Comme si son mantra devait s’imprimer sur la couverture du livre.
C’est dans l’obscurité, et dans l’obscurité seule, qu’existe la vérité.
A-t-il raison ? Et si, finalement, les personnes ayant vécu les pires drames savent ce qu’est la vie, la vraie… ne résumons pas Amer Béton à ce simple principe philosophique. Néanmoins, Taiyō Matsumoto a le mérite de poser les bases d’une interrogation existentielle. Une fois la lecture terminée, posez-vous sur l’herbe, admirez le ciel et interrogez-vous. Comment trouver sa place dans la société ? En la fuyant ou en la combattant ?
Je respire. Je n’entends que le bruit du vent. Comme si j’étais un coquillage et que l’air me traversait entièrement. Quand je peux m’allonger à même le sol et que je peux fermer les yeux, baisser ma garde, c’est là que je me sens vraiment libre. Dans la vacuité, mon âme trouve le repos.
Dans un immense internat pour jeunes filles, la vie suit son cours paisiblement. Entre la cantine, les activités sportives et les cours, le quotidien monotone de Margot n’est troublé que par quelques escapades dans une aile abandonnée de l’établissement, qui l’attire irrésistiblement. C’est justement alors qu’elle s’y aventure qu’un événement inattendu se produit : le Phénomène. Une alarme retentit, et l’internat entier est évacué dans la panique. Margot, isolée, n’a pas le temps de fuir. Coincée à l’intérieur avec d’autres élèves restées sur place, elle devra apprendre à survivre face aux dangers mystérieux que recèle ce phénomène.
Yon est une œuvre construite sur une prémisse, certes déjà vue, mais que j’adore : des enfants plongés dans une situation extraordinaire, coupés de leurs repères, forcés de s’adapter pour survivre. Ce thème a déjà été brillamment exploré dans des œuvres comme Seuls, L’École emportée, Dragon Head ou encore The Promised Neverland — toutes héritières, de près ou de loin, de Sa Majesté des Mouches.
Les récits d’exode sont toujours fascinants. Ils permettent d’introduire mystère et tension à travers des problématiques de survie et d’organisation collective. Ce qui les rend particulièrement puissants, c’est le choix de jeunes protagonistes. Là où des adultes pourraient structurer la survie selon leurs compétences, leur métier ou leur statut, les enfants, eux, doivent faire émerger un ordre nouveau. Et cette dynamique est naturellement riche en conflits, en drames… donc en récits captivants.
Ici, cependant, le ton est tout autre. Du moins, dans ce premier tome. Le danger est bien présent, palpable, mais jamais écrasant ni terrifiant. Il y a moins de tension que dans d’autres récits du même genre, et bien plus d’atmosphère. Une ambiance étrange, presque onirique, où le suspense s’installe doucement.
Le contexte semble d’abord très banal, presque rassurant, mais le monde se révèle peu à peu plus étrange qu’il n’y paraît. Subtilement, détail après détail, une inquiétante étrangeté s’installe. On remarque, par exemple, une rouille omniprésente, des salles de classe aux dimensions inhabituelles… une ambiance trouble et brumeuse se dégage de cette école, comme si elle appartenait à un autre monde.
Margot, notre héroïne, est profondément antisociale. Décrite comme morose par ses professeurs et « pas nette » par ses camarades, elle cherche constamment l’isolement. Ce n’est pas qu’elle est rejetée ; au contraire, Margot exprime clairement son besoin de solitude. De nombreuses planches la montrent seule : elle mange seule, reste à l’écart sur le terrain de sport, et erre dans l’aile abandonnée.
Ces moments de silence et de calme sont magnifiquement rendus. Ils contrastent fortement avec les scènes de groupe, où les élèves parlent toutes en même temps, dans une cacophonie presque étouffante. L’œuvre m’a mis dans un état presque méditatif, où je ressentais chaque onomatopée, et où chaque silence semblait peser.
C’est une œuvre vraiment réussie, à la fois relaxante et haletante. On a autant envie d’en apprendre davantage sur ce monde étrange et les créatures qui y rôdent que sur les personnages eux-mêmes. C’est fluide, accessible, et porté par une ambiance unique.
La série comptera quatre tomes, et le deuxième est prévu pour septembre. Une petite pépite francophone à ne pas manquer.
En trois minutes, le monde s’est retourné comme un gant.
Regarde ton ennemi dans les yeux et comprends ceci : toi et lui êtes semblables. Vous souvenez-vous d’une époque où vous saviez avec clarté ce qui était bien et ce qui était mal ? D’une époque où vos choix étaient clairs et limpides ? Une autre question intéressante dont j’adore débattre : combien d’épisodes, de chapitres ou de tomes donnez-vous à un manga avant de décider si vous allez le poursuivre jusqu’au bout ou non ?
Personnellement, il me semble qu’on peut se faire une bonne idée en trois épisodes ou chapitres. Ce laps de temps permet généralement de cerner l’atmosphère et les thèmes abordés. L’aventure est lancée, et il est tout de même rare qu’une œuvre change radicalement en termes de qualité.
Mais il y a bien sûr des exceptions. Je citerai par exemple Mob Psycho 100, qui devient un manga très différent (et bien meilleur, selon moi) à partir du sixième épisode. Et bien sûr, celui de cette critique : Magi : The Labyrinth of Magic.
Nous sommes dans un monde qui rappelle notre Moyen Âge, avec quelques différences notables. Les noms des nations sont légèrement modifiés (Balbad au lieu de Bagdad, l’Empire de Kô au lieu de la Chine, etc.), la magie existe, et surtout, de gigantesques bâtiments peuvent apparaître un peu partout dans le monde : les labyrinthes.
Il est dit que quiconque pénètre dans un labyrinthe et parvient à le conquérir obtiendra le pouvoir de devenir roi. Dans cet univers, nous suivons l’aventure d’Ali Baba, un jeune prince déchu rêvant de conquérir un labyrinthe. Nos yeux sont aussi rivés sur Aladdin, un petit garçon mystérieux portant une étrange flûte magique autour du cou. Une grande amitié naît entre les deux, alors que le destin les propulse au cœur d’un labyrinthe.
Sur 37 tomes, la série connaît le plus grand crescendo que j’aie jamais vu. Les premiers volumes ne paient vraiment pas de mine. On a une petite aventure shōnen avec une esthétique Mille et Une Nuits. Les héros sont un peu agaçants et les enjeux, pas très palpitants. Mais au fil des chapitres, à mesure que les secrets du monde se dévoilent et que nos héros gagnent en maturité, l’œuvre évolue de manière spectaculaire. Tout s’améliore, sans exception. On passe progressivement d’un simple manga d’aventure sympathique à l’un des meilleurs mangas de sa catégorie. Il faut juste persévérer !
Deux aspects rendent Magi absolument unique.
Un world-building exceptionnel
Plus l’histoire avance, plus on découvre des nations et personnages issus de cultures variées. Petit à petit, on se retrouve face à un monde foisonnant de détails et de richesse. Certains tomes entiers sont consacrés à raconter l’histoire du monde depuis ses origines, offrant ainsi une profondeur rarement atteinte dans un manga. Seul One Piecepeut espérer surpasser Magi sur ce point.
Un traitement magistral des antagonistes
Au départ, l’histoire présente des méchants très caricaturaux : des tyrans impitoyables, des cultistes nihilistes… mais grâce à une écriture brillante, la mangaka parvient à développer des motivations extrêmement complexes et fascinantes pour chaque camp. Il n’est pas rare que les héros eux-mêmes remettent en question l’ensemble de leur système de valeurs après une simple discussion avec un adversaire. Si vous aimez les conflits philosophiques où la force morale a plus de poids que la force physique, alors Magi est une œuvre incontournable.
L’ensemble est sublimé par le trait délicat de la mangaka. Ce ne sont pas les dessins les plus détaillés qui soient, mais ils dégagent une grâce et une fluidité remarquables. Le design efféminé de nombreux personnages apporte une touche originale, et les costumes bénéficient d’un travail soigné. Je tiens aussi à souligner un point surprenant : Magi contient des scènes d’une violence inattendue. Certains événements tragiques sont représentés avec une brutalité saisissante. L’effet de choc est redoutablement efficace.
Magi n’est pas un shōnen comme les autres. Si je l’ai commencé en pensant y trouver un divertissement léger, je l’ai terminé en étant complètement soufflé.
C’est une œuvre qui regorge de passion et d’idées. Elle respecte tant l’intelligence de ses lecteurs qu’il est impossible d’en ressortir inchangé.
Dédicace spéciale à Sindbad, qui est sans doute l’un des personnages les plus charismatiques et badass jamais vus !
Les mangas ? Pourquoi faire ? Ca se mange ? Posons la bonne question.Souhaites-tu lire d’incroyables bédés japonaises ? Même si tu n’y connais rien, même si tu ne sais pas où commencer, découvre nos livres, ou plutôt, des œuvres cultes.
Mauvaise Herbe– Keigo Shinzô
L’An dernier, j’affirme clair et net un fait : j’adore les œuvres dont la portée est sociale. Mauvaise Herbe de Keigo Shinzo ne me laisse donc pas indifférent. Au cours d’une descente de police dans une maison close, le lieutenant Yamada rencontre Shiori, une lycéenne fugueuse. Elle lui rappelle sa propre fille décédée et désire la protéger. Pourquoi ? À peine raccompagnée chez elle par la police, Shiori disparaît de nouveau.
Ce manga devrait être lu par les personnes fantasmant le Japon. La culture japonaise est certes fascinante, mais certaines pratiques demeurent incompréhensibles. Selon la police de Tokyo, en 2023, environ 43% des femmes arrêtées dans la rue pour prostitution ont commencé à vendre leur corps pour payer ce qu’elles devaient aux bars à hôtesses et aux proxénètes. Le plus déprimant est de savoir ce qui se passe au centre de Tokyo. Dans le quartier de Kabukicho, le proxénétisme implique parfois des mineures dans des relations sexuelles non protégées !
Mauvaise Herbe n’est pas un livre aux propos moralisateurs, ni un reportage pénible à digérer. La lecture est intense mais il s’agit, avant tout, d’une rencontre inédite. Découvrez deux âmes en peine, ayant besoin d’une aide mutuelle pour guérir et aller de l’avant.
Quartier Lointain – Jirô Taniguchi
L’absence, la fuite ou la mort d’un parent, les regrets, l’incompréhension face au monde des adultes. Dans les pages d’un hors-série des Inrocks, Vincent Brunner énumère ces thèmes qui jalonnent l’univers de Jirô Taniguchi.
Pour mieux le comprendre, évoquons Quartier Lointain. Il s’agit là d’un classique de la littérature. Ce récit universel questionne le cocon familial et amical de tout un chacun. Un homme redécouvre son adolescence, à travers un regard d’adulte. De fait, nous suivons les pas de Hiroshi. L’homme d’âge mûr fait un détour involontaire par sa ville natale, où il perd connaissance. À son réveil, il retrouve son corps d’ado. Comment rester calme ? Comment éviter la déprime ? Comment profiter de la situation ? Jirô Taniguchi y répond sans problème.
Faut-il citer l’œuvre culte d’Akira Toriyama ? Bien sûr ! Porte d’entrée parfaite pour s’aventurer vers un monde divertissant, Dragon Ball berce et anime une flopée d’enfants. Comment l’expliquer ? Le manga présente un héros authentique nommé San Goku. Parfois, ses ennemis deviennent ses amis. Souvent, il fait confiance aux forces et qualités de ses proches.
Il y a tant à dire sur Dragon Ball ! Résumons un autre point fort. Le ton burlesque de l’auteur rythme ses histoires. Les bains de sang ne sont pas au centre de ses préoccupations. L’humour grivois et absurde des divers personnages est mémorable. Même lors du dernier arc, quand les protagonistes affrontent le terrifiant Super Buu, la bédé ne perd rien de sa légèreté !