Ping Pong The Animation

« Simple et complexe » est une formule sonnant contradictoire, voire absurde mais demeure la seule que j’ai pu trouver afin de qualifier le travail de Masaaki Yuasa. Kemonozume est resté dans ma mémoire comme une sombre histoire d’amour : une trame à la Belle et la bête version darkside, des dessins à des kilomètres du traditionnel anime et surtout une qualité visuelle et narrative sans faille.

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Vous reconnaîtrez le héros de Kemonozume car c’est le seul à avoir un vrai visage.

Friand de croquer le reste de son travail, je me lançai à corps perdu sur Ping Pong the Animation. L’anime raconte l’histoire et l’évolution de deux amis, Peco et Smile, étoiles montantes du ping-pong nippon. Ces deux protagonistes aux caractères décidément opposés rappellent la dualité entre Muggen (le sauvage) et Jin (le sage) dans Samurai Champloo. Mais à l’inverse de ce dernier, l’anime qui nous intéresse va vraiment très loin dans l’exploration psychologique des personnages, laquelle ne tient parfois qu’à une simple réminiscence lors d’un échange de balle.

Contrairement à ce qu’indique le titre, l’anime repose plutôt sur des gens jouant au ping-pong qu’autre chose. Ils ont tous une chance : certains la saisissent, travaillent beaucoup, mais pas assez et décident alors d’arrêter le ping-pong ; certains la saisissent et s’entraînent jusqu’à devenir de véritables machines. D’autres ont un talent qu’ils n’arrive pas à mettre à profit, notamment Smile, qui est certes très fort mais ne joue pas pour gagner, et encore moins pour humilier son adversaire.

Ping Pong the Animation est également un anime très humain. Les multiples personnages ne sont ni gentils, ni méchants. On apprend tour à tour à les aimer, car on sait ce qu’ils ont endurés, on les comprend. Prenons ici l’exemple de Démon, personnage secondaire (ce qui limite le spoil): dans son enfance, Démon s’entraînait avec Peco et Smile à la salle de ping-pong. Peco étant le plus fort, Démon a toujours voulu lui ressembler et le battre. Il rejoint alors l’équipe de Kaio, connue pour ses hautes avancées technologiques et l’ordre militaire y régnant, et s’entraîne comme jamais dans la seule optique de gagner sa prochaine rencontre avec Peco – rencontre qu’il perdra. Dégoûté, il comprit que, malgré son très lourd entraînement, une chose encore lui manquait : le talent. Ensuite, on peut le voir travailler dans la nuit de Noel et revenir plus tard à la salle où lui et Peco jouaient autrefois. Il a compris qu’il aimait juste jouer pour jouer.. Il y croise Peco, qui avait abandonné le ping-pong suite à une difficile défaite. Démon va essayer de le remotiver à jouer, en disant qu’il a du talent et que lui n’en a jamais eu. Il le sauvera ensuite de sa tentative de suicide avec un seul mot à la bouche : réinscris toi au club de ping-pong. Et c’est l’instant où tout le monde pleure, non ?

Mais Ping Pong the Animation, c’est aussi une grande qualité « cinématographique ». Les transitions sont toujours soignées ; les presque freudiens flash-backs, utilisés avec parcimonie, et les split-screens – clin d’œil à la version manga –, rajoutent beaucoup de dynamique à l’image. Ces matchs sont présentés, comme une amie me l’a récemment dit, à la manière d’un match de catch. Le mouvement de la balle n’est plus qu’un détail dans le mouvement de l’image tellement les split-screens et le montage font le gros du travail. Les émotions du spectateur passent du malaise à la joie la plus totale en un clin d’œil.

Combien de concepts pourriez-vous trouver dans cet extrait ?

En conclusion, l’anime est, à mes yeux, parfait. Il part d’une histoire a priori simple pour nous plonger dans les méandres psychologiques des personnages. La qualité visuelle est excellente, autant que la palette des sentiments par lesquels le réalisateur nous fait passer à sa guise. Au final, ce n’est même plus l’histoire de personnes pratiquant le ping-pong. Si on oublie ce sport et le remplace par la vraie vie, tout en gardant la psychologie des protagonistes ainsi que leurs motivations, on obtiendrait le même anime. Mais ce raisonnement ne tient qu’à moi. En tout cas, ça fait plaisir de regarder un anime joyeux et humain, de temps en temps.

Maxime Leys

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