Décembre 2013. La société avance lentement et parmi elle, la génération Internet hurle de plus en plus fort. Le média est loin de son hégémonie culturelle, mais les stars montent assurément. Toute la vie humaine s’emprunte de références et de mœurs cultivés sur la toile. Jeune encore est la génération de la fin du monde. Son influence artistique se mesure en pas de nains. Nous sommes toujours à l’époque où la télévision s’inspire d’Internet, mais ne se laisse pas phagocyter par le futur géant numérique.
Au milieu de cela, Bo Burnham s’isole depuis trois ans. L’artiste a percé le plafond. Après son premier spectacle, Words Words Words, tous les outils sont entre ses mains pour nous exposer son talent. Ce qu’il a à dire est prêt à être entendu.
En 2013 sort What, deuxième spectacle de l’artiste. Burnham a peaufiné son œuvre de manière plus fine, et l’écriture est bien plus raffinée. Chaque blague est réfléchie plus profondément, placée sur l’équilibre entre le « trop », et le « pas assez ». What sonne juste à bien des niveaux.Continuer la lecture →
Bruno Caruana, aka brunoaleas, publie 3 nouvelles en l’An deuxzérodeuxun. Ce projet voit le jour grâce à l’aide d’Antoine Wathelet (mise en page) et Camille Chautru (illustrations). Une fois au micro de RCF Liège, le jeune écrivain pose quelques mots au sujet de ce rêve d’enfant.
Ses écrits sont-ils trop sombres ? Qu’est-ce que leur format papier a de si unique ? Tendez l’oreille vers cette interview de l’émission Nos auteurs ont la parole. Le récit CROA a droit à une analyse et est brièvement commenté par l’auteure Bernadette Pâques. Merci à Régine Kerzmann, Julien Moës, Adrien Faorlin et Pierre Reynders. Bonne écoute !
Il y a ces jours où un canapé devient une extension d’un corps. Affalé, je zappe les dernières actualités musicales face à ma TV. Un météore pouvait détruire mon salon. L’année dernière fut splendide en termes de découvertes d’artistes.Continuer la lecture →
GOMMA a la rage ! Zombie Cowboys, leur nouvel album, porte au débat. Le groupe de Caserta questionne notre système capitaliste… et il a bien raison ! L’argent appelle l’argent. L’investissement n’est pas synonyme de bonheur. Moins encore l’éternelle augmentation de capitaux.
Le thème n’est point simple à aborder.
Dès lors, comment conclure l’opus ? Les propos de « SENTENZE » s’éloignent du monde de la finance et partagent d’autres constatations. Le morceau apporte une touche de poésie mémorable à l’œuvre. Il fonde un sagace parallèle entre jeunes et vielles générations.
En tant que jeunes, nous ressentons ce qui est exprimé via « SENTENZE ». On y explore la perspective, et l’envie qui en découle, de vivre la sénilité. Cela reste un mode de vie tout à fait imagé puisque nous ne sommes pas encore vieux. C’est le dernier rempart d’espoir de ceux qui ne peuvent concevoir une idée de l’avenir. C’est-à-dire, se réfugier dans l’idée que lorsqu’on vieillit, le sentiment de résignation prendra le dessus. -Giovanni Fusco, guitariste de GOMMA
La jeunesse a un pouvoir d’action. La vieillesse signe le début de la fin. « SENTENZE » ne donne pas d’ordre. Le morceau ne se veut pas moralisateur. Il souligne une observation faite sur les générations d’antan. D’ailleurs, ce constat est rempli d’admiration. A un certain âge, ne plus protester devient naturel. Les derniers acteurs de nos sociétés cherchent bien plus souvent à se reposer, en fin de vie. Qui sommes-nous pour les blâmer ?
Le quatuor propose une vraie réflexion sur nos désirs. Ses membres ne se résument pas à de banals punks. Leurs chansons n’ont pas pour unique but d’éclater sa tête contre le Mur de Berlin. Est-ce que notre confort, notre époque, notre indifférence nous éloignent des révolutions ? « SENTENZE », via son ambiance apaisante et son message pertinent, démontre ô combien la bande sait soulever ce type question universelle.
La musique peut fédérer. La musique peut relaxer. Elle peut surtout consoler.
Après une rupture, une déception, un dégoût inexprimable, ce n’est pas un/e proche qui venait me rassurer à 200%. Euterpe est ma seule partenaire. Elle m’accompagne dans chaque galère. L’équivalent d’une drogue sans ses côtés toxiques.
Léonie Pernet comprend cette vision du quatrième art. On l’aperçoit lorsqu’elle délivre une performance hors-norme sur Radio Nova. Elle rejoint cette force de vouloir englober tout type de public, les enjouées, tout comme les désespérés. Elle fait preuve de shamanisme. A l’inverse de l’effet d’une danse de la pluie, elle invoque le Soleil. Une magie possible grâce à ses sonorités africaines. A coups de derboukas ou de chants liturgiques, l’artiste nous emporte vers un univers très singulier. L’electro y vient apporter une touche de modernité. L’ambiance est parfaite pour la radio française l’invitant dans sa Chambre Noire.
Trop d’informations fusent dans mon cerveau, une fois initié le premier morceau. Les instrus de Léonie Pernet n’ont rien de minimal. Les synthés se fondent à merveille aux différentes atmosphères du Cirque de Consolation : la transe de « A Rebours », la rage planante propre à « Il pleut des Hommes », « Mon amour tu bois trop » et sa ténébreuse poésie.
La scène permet à la multi-instrumentiste de s’évader. Quant à sa dernière œuvre en date, elle symbolise bien plus qu’une simple évasion.
Le titre (NDRL : de son second album) recouvre à la fois l’aspect théâtral de nos vies, le besoin que nous avons d’être ensemble, mais aussi ce second souffle, ce mouvement intérieur qu’est la consolation. -Léonie Pernet (Les Inrocks, novembre 2021)
La musicienne met sa mélancolie de côté et compte célébrer la vie. L’appel aux esprits subsahariens est imminent. Qui est prêt à danser sur son coup d’Etat musical ?
Je souhaitais disparaître des radars. Notre société et les réseaux sociaux sont source d’angoisse, de colère. Trop de discours, peu d’idées. Soudain, un évènement permet de relativiser. Un miracle bouleverse mon train-train quotidien. Odezenne est de retour via un cinquième album, 1200 mètres en tout. Les Bordelais régalent en partageant 16 morceaux !
Une question pend à mes lèvres : vont-ils encore nous emporter au-delà des cieux ?
Leur ambiance nous propulse bel et bien dans les nuages. « Mr. Fétis » ouvre le bal, de quoi assumer une couleur électro, du début à la fin. Dès les premiers sons, on sniffe du kérosène, on voltige près des hirondelles.
Les propos de l’opus attirent bien plus mon attention. Ils sont à la fois solaires et sinistres. Ils décrivent une palette d’émotions, mais aussi les hommes, les femmes et leurs complexités. L’amour incommensurable envers une personne incomparable (« Caprice »). Le mépris face à d’inutiles gamineries (« Bitch »). Notre éternel optimisme (« Vu d’Ici »). C’est à se demander si ces chansons ne furent pas trop difficiles à rédiger. Quoi qu’il en soit, saluons ce travail d’auteur.
Mattia enrichit cet accomplissement grâce à ses instrus planantes. Elles servent à merveille la langue de Molière. Les jeux de mots, les métaphores imprévisibles et nos vieilles expressions déformées font la part belle de ce disque !
Que retenir à la fin de l’écoute ? O2ZEN souhaite peut-être se cacher dans le silence. Une manière de grandir pour un mieux, à des kilomètres d’un champ de flammes. Loin de la montée des extrêmes en politique. Loin d’une pandémie définissant l’avenir des peuples.
Toutefois, du silence jaillit une tonne de mots salvateurs. Leurs paroles affables inspirent à écrire, sans aucune peur de partager quelconque malheur. L’exercice de l’écriture a d’ailleurs des vertus thérapeutiques. Marichela Vargas, Docteur en psychologie, clarifie cette observation.
L’écriture, comme la parole orale, participe à un processus de symbolisation, c’est-à-dire, à un processus de représentation. Ce qui est pure souffrance devient mise en mots. Mettre de mots sur sa peine procure le fait de nommer les choses, les structurer et les ordonner, leur donner un sens. Les psys appellent ceci élaboration. Il s’agit d’une sorte de digestion de la souffrance, de métabolisation. L’écriture amène à ce que la souffrance soit déposée sur le papier, extériorisée.
Nommer sa souffrance implique déjà de s’en séparer, de la mettre en perspective.
Le groupe signe son projet le plus profond. Certes, au niveau des textes, plusieurs passages résultent très abstraits. Néanmoins, leur poésie touche à des thèmes universels : combattre la maladie, l’insomnie, la haine. Qui veut absolument synthétiser nos pensées noires, suite à ces dernières années merdiques ? L’enjeu est tout autre. Gardons espoir. Dansons avec nos proches. Distribuons des confettis tel un Jaco sur « Géranium ».
Nos vies ne sont que des montagnes russes émotionnelles. Rien n’interdit de le chanter.