L’exil est parfois une étape obligatoire pour les êtres vivants. Quoi de mieux pour se confronter au réel ? Se déplacer d’un territoire à une autre demande de l’investissement moral. L’écoute, le dialogue et la curiosité sont souvent à favoriser.
Si un homme apprend énormément au sujet des bienfaits du voyage, c’est bien Michel de Montaigne (1533-1592).
Faire des voyages me semble un exercice profitable. L’esprit y a une activité continuelle pour remarquer les choses inconnues et nouvelles, et je ne connais pas de meilleure école pour former la vie que de mettre sans cesse devant nos yeux la diversité de tant d’autres vies, opinions et usages. -Extrait de Les Essais
Le philosophe, une fois atteint de maladie, entame des pérégrinations en Europe. Il tient même un journal, ayant un intérêt plus médical que littéraire. Aujourd’hui, un autre artiste sort de ses terres natales, en quête de nouvelles créations : Damon Albarn.
En Islande, il se concentre sur un ensemble de morceaux formant The Nearer the Fountain, More Pure the stream flows. L’œuvre sera la démonstration de l’importance des voyages. Entouré des centaines de volcans et de gigantesques glaciers, l’Anglais honore un pays à la nature grandiose. Pour ce faire, il apparaît aux côtés de moult musiciens performants, aussi bien des violonistes qu’un saxophoniste. Initialement, ce nouveau disque est pensé pour être une pièce orchestrale dépeignant les paysages islandais. La crise covid et l’enfermement déclenchent l’écriture de cet projet, de quoi chanter de légères paroles.
Le leader de Blur est également en deuil, son ami Tony Allen nous ayant quitté l’an passé. Sa renaissance s’exprime en musique. L’ouverture de Royal Morning Blue illustre en partie ce constat : Rain turning into snow.
Son couplet final fait penser à une lutte, l’humain contre un vide permanent. Comme si nous étions toujours en recherche de contact social. Damon Albarn livre une autre raison de voyager : vivre des expériences parmi plusieurs personnes ! Partager ses savoirs n’a rien d’insensé. L’enfer n’est pas les autres.
Alors voyagez ! Comment comprendre les notions de liberté et d’égalité, si l’on voit uniquement le monde à travers nos traditions et croyances ? Fuguer amène bel et bien à se connecter vers d’autres réalités. Du haut de sa tour, Damon Albarn ne se plaint pas bêtement de la disparition d’un ancien monde (Once, there was cinema, and we had parties. And the light at the top of the tower could reach Argentina). Il joue un air latino, content de troquer sa souffrance contre la poésie.
brunoaleas – Photo ©Matt Cronin & Nathan Prince