Great Mountain Fire Interview

UNE CLAQUE D’AUTODIDACTES

La convivialité et la bonne humeur régnaient dans le local des Great Mountain Fire, avant leur concert, au Reflektor, lorsque Drama était avec eux pour un entretien spécial JCCLM. Cette interview brasse des sujets voués à attirer l’attention de tout mélomane: style, acoustique, scène, originalité, écriture, etc.

Comment est né Great Mountain Fire ?

Alexis : Avant, on avait un autre groupe. Ça fait longtemps qu’on joue ensemble. On a eu plusieurs projets avant Great Mountain Fire. Puis, tout est venu à nous lors de l’enregistrement de Canopy. A la base, Great Mountain Fire était le nom d’une chanson qu’on devait mettre dans cet album et après, on a décidé de ne pas la rajouter dessus. On a juste garder le nom de cette chanson pour nommer notre groupe. C’était une chanson qu’on avait écrit sous la forme d’un cadavre exquis. Au sinon, on joue depuis qu’on est jeune. On a commencé d’abord vers 12 ans puis vers 17 et 18 ans.

Thomas : En gros, Great Montain Fire est né à Linkebeek, un bled à côté de Bruxelles. Le groupe est né dans une petite vallée. Aujourd’hui, il a dix ans. C’est un p’tit ket qui continue de courir sur la route. (rire)

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Entre vos albums Canopy et Sundogs, il y a 4 ans d’écart. Est-ce que vous avez continuer à pratiquer la musique non-stop ou avez-vous juste fait une grande pause ?

Thomas : Après Canopy, on a fait sa version acoustique. Ça été une autre aventure. Avec Canopy, on a tourné 1 an et demi, 2 ans. On a tourné quelques mois sa version acoustique. Puis, ça été le moment de sortir de nouvelles choses.

Alexis : Il y a eu 3 ans d’écart.

Thomas : En fait, parfois on s’en rend pas compte que le temps de sortir un disque prend autant de temps que de l’écrire. C’est juste une question technique. Canopy a été un peu créé différemment vu qu’on avait déjà tout à portée de main. On a envie que le temps d’écart entre les opus soient plus courts dans le futur.

Avez-vous découverts de nouveaux artistes qui vous ont inspiré, pendant ces années là ?

Thomas : On en découvre tout le temps.

Alexis : Pour répondre à ta question de base, il n’y a pas eu de pause. On a au moins passé un an et demie à composer et il y avait plus ou moins une cinquantaine de maquettes. On en a retenu onze sur le disque. Si tu veux, le temps de l’écriture a mis plus de temps qu’il n’y parait forcément.

Thomas : Canopy était notre premier album donc on avait envie de le défendre, d’aller à l’étranger et de rencontrer de nouvelles personnes. On s’est un peu laisser partir là-dedans. Puis on s’est dit qu’on devait un peu se poser. Mais j’ai l’impression que beaucoup de groupes laissent 3 à 4 ans entre deux disques car ça laisse le temps de grandir aussi. Faire un disque, ça demande du temps et avoir un peu d’isolement, ça aide. On essaye de faire plus vite parce que c’est agréable aussi. Après 80 dates, t’as envie d’autres choses en tant que musicien.

Pour ne pas faire dans la routine…

Thomas : Voilà, c’est ça.

Quel est votre meilleur souvenir sur scène ?

Thomas : Il y en a beaucoup.

Alexis : On a fait un festival en Suisse qui s’appelle Paléo. On a joué là à une heure de l’après-midi…

Thomas : Nan, 1h du mat’.

Alexis : Aaah oui pardon, à 1h du mat’. C’était parti d’une panne de van. Un pneu de notre van avait crevé sur la route. Du coup, on a eu droit à un énorme temps d’attente puis, on est arrivé là complètement fatigué. Une fois arrivé là-bas, avec rien sauf une seule chaise, c’était impossible de faire une sieste. Avant de jouer un concert, il faut garder une certaine énergie donc tu ne peux pas dépenser ton énergie comme dans une journée normale où petit à petit il est 6h puis 7h et où t’as le temps de recharger. Là, on ne pouvait pas recharger avant minuit.

Thomas : On avait jouer après Bloc Party.

Alexis : Il y avait un des synthés qui avait valsé sur scène car il y avait des phénomènes d’ondulations.

Thomas : Paléo est vraiment un festival de dingues. On est arrivé là avec le tapis rouge. On a joué tard avec des gens qui avaient envie de faire la fête et ça tombait bien vu que nous aussi on en avait envie. Bref, il y avait une symbiose de fou car tous ceux qui voulaient faire la fête étaient là.

N’aviez-vous pas trop de pression de jouer après Bloc Party ?

Alexis : Ce n’était pas la même scène.

Alexis : Il y a toujours la pression lorsque tu passes après de gros artistes.

Je n’aime plus trop le son de Bloc Party. Leur dernier album me fait mal. Je sais pas si c’est à cause de la carrière solo du chanteur qui s’est tourné vers un genre beaucoup plus électro, amenant de nouvelles approches au groupe, ou si c’est parce que Bloc Party a changé de batteur, mais franchement, je ne trouve plus aucun intérêt à les écouter.

Alexis : C’est vrai. Maintenant, on peut pas nier qu’en live ça envoie du décibel.

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Il ne faut pas interpréter ce que je vais vous dire comme un reproche. Votre musique me fait penser à celle de Pink Floyd et de Tame Impala. Est-ce que vous n’avez jamais eu peur de faire un son qui ressemble à un autre déjà trop entendu ?

Alexis : Bien sûr !

Thomas : On a des morceaux où on ne réfléchit pas et où l’on s’empêche de les sortir. Parfois, même si une de nos chansons est top, on ne la sort pas car elle ressemble déjà à une autre. On a nos gardes fous à ce niveau là. Après, il y a une part de vérité dans les sorties de morceaux et s’ils ressemblent à d’autres sons, c’est pas grave. On a toujours eu envie de faire de nouvelles choses qui puissent auss nous surprendre nous-même. Quand on fait des choses trop proches d’autres, ça nous emmerde. Ça ne m’étonne pas que tu voies des liens entre nous et ces groupes. Par exemple, Pink Floyd était notre première référence. On écoutait tous ce groupe. A 12 ans, découvrir et écouter Pink Floyd, c’était incroyable. 20 ans plus tard, ça reste quand même dans nos racines.

Il est normal d’observer que dans l’Art, tout le monde se copie vu que chaque jour il y a de nouvelles créations. Ça doit être une sacrée préoccupation de se dire : « Au final, je ne suis qu’une copie d’autre chose. »

Alexis : Ça c’est une hantise mais je sais qu’on peut pas tout contrôler. Tu peux pas faire une chose nouvelle sans coller de références. Ce qui est hyper dur, c’est d’être à la fois mélomane, c’est-à-dire un type qui adore la musique et on l’est tous ici, et en même temps musicien, en faisant passer un bout de ton cerveau à l’autre. Le vrai musicien, un peu fou, isolé et qui écoute rien, a de la chance quelque part, parce qu’il est pas là-dedans. Ça reste un système hyper relatif. Quand on a un son qu’on aime bien, alors ça nous suffit. Après si certains sons se rapprochent du style de Tame Impala, c’est du aux phasers ou encore aux delays courts. C’étaient des choses qui étaient à la mode il y a quelques années et qu’on a reçu. Puis, pour en revenir à Pink Floyd, ce n’est pas le seul groupe à utiliser une guitare dans une reverb. Par contre, je comprends la raison pour laquelle tu nous connectes à eux, rien que dans notre composition psychédélique qui voyage beaucoup. Certains morceaux n’ont pas de structure A/B, A/B, si tu vois ce que je veux dire.

Thomas : Je trouve que c’est un compliment quand tu nous compares à ces groupes et en rien un reproche.

J’avais montré la question à un ami (Cymophan) et il m’avait conseillé de faire gaffe avec ce genre de question parce que parfois, selon lui, les artistes aiment proposer quelque chose qui leur semble original. En ce qui me concerne, je n’aime pas utiliser le mot « originalité ».

Thomas : Parfois, les personnes ne parlent pas de morceaux « originaux » ou des références liées à ce même morceau, ça leur passent par au-dessus aussi.

Pour moi, « être original » ne veut rien dire.

Alexis : En effet, ça veut rien dire. C’est relatif. C’est toujours relatif à quelque chose.

Thomas : Il n’y a qu’à penser aux milliards de groupes et de morceaux qui paraissent sur la Terre et qu’on ne connaît pas. On ne connaît que le dixième de ce qui existe aujourd’hui. Il y a des gens qui font des trucs supers et que personne n’écoute…

Alexis : Je pense qu’il y a des artistes qui détestent être comparés car ça frotte leur ego. Il faut juste s’en rendre compte. A l’époque de Canopy, certains magazines belges disaient de nous qu’on était les Phoenix belges. C’est une façon pour les gens d’avoir une sorte de repère comme un code couleur.

Thomas : C’est une porte d’entrée.

Et vous, ça vous va ?

Tommy : Ce qui nous va surtout, c’est d’avoir été comparé à d’autres groupes et pas à un et un seul groupe. Évidemment, je pense qu’on ressemble un peu à ce qui peut tourner actuellement, vu qu’on fait partie d’un embranchement musical, d’une époque et société particulières. Tout ne relève que de l’inconscient. On est juste inspiré par les mêmes personnes. Tous les jeunes groupes ont été inspirés par les mêmes thèmes et gros courants. Ce qui est cool, c’est d’apporter par la suite, son « schmilblick », sa pierre, sa « définition de », sa propre direction, en d’autres mots, ce qu’on cherche tous. Ce qui est vrai, c’est qu’être le plus loin des autres, c’est le plus important.

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Est-ce qu’on aura droit à un album unplugged de Sundogs ?

(rire d’Alexis)

Thomas : On a déjà fait des versions unplugged en radio mais on ne pense pas faire ça pour cet album. Jouer des unplugged, ça nous plait assez bien. C’est chouette de partager la musique de manière super simple, ce qui existe beaucoup moins aujourd’hui. C’est très électrique de se retrouver à jouer de cette façon pour des gens de notre âge. Présenter d’autres facettes, c’est agréable aussi. On n’est pas du tout contre mais l’idée de Sundogs était reliée à une tournée, à des concerts et à toutes nos autres idées. On préféré créer et continuer notre route plutôt que de perdre un an pour une version unplugged.

C’est vrai que ça demande quand même du travail.

Alexis : On n’a pas le niveau des réels musiciens. On est plutôt autodidacte, du coup on fait ce qu’on peut. On n’aurait pas la capacité spontanée de prendre tout un arrangement acoustique. On n’est pas des techniciens…

Tommy : On l’a fait.

Alexis : Ouais, on l’a fait. C’était un solide défi. On était centré sur l’écriture des partitions. C’était une belle expérience.

Thomas : On avait l’impression qu’en Belgique, il n’y avait pas vraiment d’artistes qui avaient fait d’unplugged et après avoir vu les séries MTV qui en mettaient en honneur, on a alors trouvé ça musicalement intéressant de faire cela. C’est parfois un peu risqué de s’exposer ainsi mais ça révèle juste l’écriture de la chanson.

Alexis : Mais genre aux Francofolies, c’était une catastrophe.

Pourquoi ?

Alexis : En fait, il y a un tel enjeu technique pour faire sonner des instruments acoustiques et spéciaux comme des sitars ou un harmonium, que le temps imparti est un vrai obstacle. On revenait du Paléo, on avait bien la tête dans le cul. (rire)

Tommy : On était même 12 musiciens sur scène.

Alexis : Oui, c’était tout un bazar bien compliqué.

Antoine : On a vécu en l’espace de 12 heures, notre pire et notre meilleur moment en concert.

Alexis : C’était embarrassant.

Antoine : Avec du recul, je trouvais ça assez sympathique.

Tommy : Par rapport à l’acoustique, on a fait le Cirque Royal qui a été pour nous, l’osmose de l’acoustique. On a vraiment eu toute la journée pour s’installer là-bas et on avait bien tripé. Il y avait également un super piano sur scène.

Thomas : On a eu aussi un échange de fou aussi avec des musiciens géniaux. On était vachement libre.

Y a-t-il des choses que vous avez toujours rêver de faire en tant qu’artiste ? Par exemple, Muse a toujours voulu aller faire concert dans l’espace. Et vous ?

(rire)

Alexis : Le rêve de Muse, c’est un rêve capitaliste!

Thomas : On a toujours voulu se cloner et faire une méga, méga big band. Avec 4 Tommy, 4 Antoine, 4 Alex, 4 Moe, 4 Thomas.

Antoine : Pour ce qui est de faire un concert dans une zone géographique particulière, on avait tripé sur des déserts.

Connais-tu Young The Giant ?

Antoine : Non.

C’est un groupe qui s’est amusé à tourner des vidéos où ils exécutent leurs chansons, en version acoustiques, dans des endroits atypiques. Ils ont joué notamment au sommet d’une montagne, près d’un lac ou encore dans un désert. Je vous conseille de les écouter, c’est pas mal.

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Antoine : Cool, ça doit surement donné une émotion par chanson.

Alexis : Ça me fait penser à Antoine qui a eu la chance d’entendre un super bel écho dans un cratère de volcan. C’est un écho hyper défini.

Tommy : C’était parti d’une flatulence.

(rire)

Antoine : Je me suis retrouvé au milieu d’un cratère de volcan et entouré de parois de montagnes, il y avait un écho naturel et merveilleux. Je m’étais pris une grosse claque.

L’as-tu enregistré ?

Antoine : Oui je l’ai enregistré, j’ai une trace. Faire de la musique là-dedans, ça doit être merveilleux et splendide. L’écho se propage comme dans un amphithéâtre.

Alexis : L’écho forme une espèce de rond parfait.

Antoine : Ça donne un effet de malade. En gros, je pense que si on joue là-dedans, ce sera un peu le bordel mais ça peut être très intéressant à exploiter.

Alexis : Ce qui nous intéressait avec Sundogs, c’était d’enregistrer des instruments dans des lieux spécifiques qui donnent une couleur sonore. On peut y retrouver de nombreux claviers, des voix ou des sons de synthés qui ont été enregistrés dans un couloir ou encore un hall spécial. Il y avait donc des répercussions très précises. L’enregistrement doit savoir imprimer la façon dont on se sert de l’espace.

Tommy : Je me souviens qu’en acoustique, une batterie extérieure avait finalement un son très mate. C’était vraiment tout le contraire de ce que l’on pouvait pensé.

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DRAMA – Photo : Alexis Docquier (Reflektor, le 01/12/16) / Interview faite le 01/12/16

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