Lunatic Interview

SE RAPPROCHER LE PLUS POSSIBLE DE LA NATURE

Elle expose ses œuvres au Cupper Café, à Liège. Elle anime des soirées DJ. Elle dépeint un univers psychédélique et coloré. Elle se nomme Lunatic. Un entretien s’impose afin de comprendre les tréfonds de l’art abstrait !

Comment est né Lunatic ?

J’étais à Liège 1 de ma première à ma troisième. En quatrième, il m’ont dit: “Vas te faire foutre”. En gros, soit je doublais encore une fois, soit j’allais en qualif. Du coup, je suis allée à Saint Luc. Je voulais aller en photo mais il n’y avait plus de place. Je me suis alors inscrite en infographie, sans vraiment savoir ce que c’était, en attendant qu’il y ait une place qui se libère en photo. Au final, j’ai beaucoup aimé l’infographie. On a appris à gérer les logiciels Illustrator Design et Photoshop, des trucs assez basiques, pas très artistiques. En deuxième, on a eu un stagiaire qui venait de Saint Luc supérieure. Il parlait de choses un peu plus abstraites. Notamment du Bam Festival. C’est un festival à la caserne Fonck se déroulant une fois par an et mettant en avant l’art numérique. Il m’a montré quelques techniques dans Photoshop, pour être plus artistique, plus abstrait. J’ai commencé à faire plusieurs fonds d’affiches. Puis, en première supérieure, à Saint Luc supérieure, j’ai commencé à en faire de plus en plus et à ajouter des logiciels et plein de fonctions différentes. J’ai ensuite créé une page pour partager.
On est plein d’élèves à avoir les mêmes outils dans les mains mais chacun aura des réglages différents. Tout dépend de ce que l’on veut. J’adore les astuces qu’use un graphiste lié à Tame Impala. Il a fait beaucoup de pochettes d’album et également des clips. Il a toujours des univers hyper colorés. Ce qu’il poste sur Instagram ou sur Facebook, c’est un peu dans le même genre: des couleurs assez saturées, beaucoup de mouvements, tout en restant hyper abstrait.

Quels sont tes outils ?

Mon outil principal était Photoshop. En ce qui concerne le dessin, je suis vraiment nulle, ça me saoule. Je ne suis pas assez patiente pour ça. J’aime Photoshop et dupliquer plein de calques, les saturer et voir ce que ça donne. Dès que je commence, je n’ai pas une idée de ce que ça va donner. Je teste et quand ça rend bien, je l’enregistre et je le garde de côté. Là, ça fait un an que mes outils commencent à se multiplier. J’utilise du glitch avec de nombreuses applications sur ordi ou iPad. C’est ce qui provoque des bugs comme des séparations de couleurs. Récemment, j’ai acheté l’iPad Pro. Il est muni d’un stylet et tu peux dessiner tout ce que tu veux. C’est assez pratique parce que les tablettes graphiques externes, c’est 1200€ pour l’A4. L’iPad coûte 600€. Je l’utilise tous les jours et il me permet des modifications plus précises comparé à Photoshop. Ces outils me servent à obtenir une meilleure ligne conductrice et à savoir ce que je veux.

Il y a quand même une part de hasard liée aux logiciels. Tu as une idée en tête mais tu ne prévois pas où va tomber le trait.

C’est ça. Le premier album que j’ai créé s’appelait Kaléidoscope. D’ailleurs, le nom que je donne souvent à la photo c’est celle de l’image de base. Par exemple, pour Fruit, c’était une photo de fruit un peu nulle, trouvée sur Google Images. Junk était une photo d’ordure. Ou Arc-en-ciel, c’est celui que j’ai vu sur ma manche. Après ça, l’arc-en-ciel ne ressemble plus à sa forme initiale.

Maintenant, tu fonctionnes autrement. Tes idées sont plus claires à visualiser.

Oui. Avant ce n’était pas le cas.

Es-tu autodidacte ?

Oui. Parfois, je créé des photos une fois par jour, mais il y a des mois où je n’en fais pas du tout. Ça dépend du temps. Avant d’avoir l’iPad Pro, je commençais un peu à m’ennuyer, à faire tout le temps la même chose, alors j’ai attendu que l’inspiration vienne à moi. Là, je varie pas mal. Pour mon expo, j’avais essayé de me mettre à la peinture. C’est une technique qui consiste à prendre un gobelet, y mélanger des couleurs et les renverser sur une toile. C’était chouette. Via la peinture, j’obtenais un effet similaire au digital. L’expo permettait d’alterner entre le digital et la peinture.

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Pense-tu reproduire ça plus tard ?

J‘en fais de temps en temps. C’est cool à faire. Même s’il faut de la patience.

Envisages-tu d’exposer à l’étranger ?

Avec les cours, le taff, c’est compliqué d’organiser ça. Mais ça me plairai, c’est sûr.

Est-ce qu’on t’as déjà proposé des collaborations ? D’autres artistes sont venus vers toi ?

A Saint Luc supérieure, la plupart de mon entourage fait de l’art. La peinture, on l’a fait à deux avec d’autres compositions. Aucun artiste étranger n’est venu à moi. Il y a plusieurs comptes Instagram que j’adore. Il y a une fille qui se fait appeler Mala Vida. Sa technique est d’user de techniques proches de la peinture puis, de les scanner et de les retravailler à fond sur l’ordinateur. Ça fait des effets très stylés. Ca serait cool de travailler avec elle mais je ne sais pas si ça pourrait être possible.

Tu as peut-être déjà répondu à cette question… Mais allez posons la.
Qu’est ce qui est le plus séduisant dans le type d’art que tu pratiques ?

Au lieu de faire un truc totalement abstrait, j’efface un peu certains éléments. Prenons l’exemple de la photo de bus modifiée par mes soins. Au départ, c’est une photo de bus que j’ai transformé à mort. Puis, j’ai effacé toute modifications à certains endroits.

J’ai essayé de retrouver cette photo parce qu’elle ma marquée.

Ca m’intéressait de rendre la chose un peu abstraite, tout en utilisant la technique d’une espèce de pluie. Prendre les pixels et faire tomber les gouttes grâce à l’iPad. C’est cool parce que y a du glitch, de la couleur et un peu d’abstrait mais aussi un univers et une ambiance.

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Cela ne tente pas d’interpréter l’imagination de quelqu’un ?
On croirait que c’est une illusion, une vision de l’avenir…

J’y ai jamais pensé mais c’est intéressant. Je fais des rêves très très bizarres. Je racontais mes rêves à un pote et on se disait que ce serait drôle de l’illustrer en BD.

Cette question est longue. Prépare-toi mentalement. Dominik Lange modifie totalement l’environnement qu’il prend en photo. Il a déclaré en interview qu’il ne peut pas révolutionner le monde dans lequel il vit. C’est pourquoi, il le transforme symboliquement dans ses films. Est-ce que tu penses pareillement par rapport à tes œuvres ? Souhaites-tu bouleverser les sens et les esprits ? Veux-tu provoquer des émotions chez le spectateur ?

Dans ce qu’il exprime, il y a une démarche artistique, ce que je n’ai pas encore. Ce qu’on peut me reprocher, même si cela semble inconscient de ma part. Je fais juste du visuel. Oui, je veux que ça touche ceux qui voient mes œuvres. Il me plaît de voir ceux qui se perdent dans le visuel. Ceux qui y le fixent assez longtemps et qui y voient différentes choses. J’aime quand on me parle de formes différentes et distinguées. J’ai juste envie que cela provoque quelque chose, que ce soit chaleureux. J’utilise très rarement des couleurs froides ou du noir et blanc.

L’interactivité avec les spectateurs pourraient fonctionner pour tes expos.

Oui, j’allais y venir. Pour ce soir, j’aide un DJ à La Zone, grâce à un logiciel qui permet à une boule de réagir selon le son qui passe. Ca déclenche une activité interactive avec le son. Mon but  serait de brancher une Kinect et d’obtenir différents effets selon nos mouvements. Ça peut aller loin, et c’est pour ça que je suis à fond là-dedans. Installer des attractions interactives, plutôt que des posters.

As-tu un prochain projet sur le feu ? D’autres idées ?

L’interactivité. A Saint Luc, chaque fin d’année, il y a un jury. Pour ma première et deuxième, le sujet était de “visualiser le son”. L’objectif était de savoir ce que les vibrations sonores peuvent créer comme visuel. Il n’y a qu’à penser à l’expérience d’Ernst Chladni. Tu poses une plaque de métal sur une haut-parleur et il fera vibrer la plaque de métal. Tu mets du sable dessus et les vibrations vont faire des patterns de dingue.

Comme pour « High Ball Stepper » de Jack White.

Oui, exactement.

Encore une fois, c’est l’aléatoire qui joue.

Il intervient beaucoup moins. Selon la fréquence, les patterns diffèrent. C’est fou ! A ma deuxième année, j’ai utilisé un haut-parleur qui faisait vibrer un ballon où se trouvait un miroir. Un laser s’était projeté sur le miroir et était dévié sur le mur

Les Totally Spies !

Oui ! Des ronds parfaits apparaissaient sur certaines fréquences.

Utilises-tu de la gelée ou des liquides ?

On a fait ça avec de la maïzena, c’était drôle. Vu que mon copain a fait des formations d’ingénieur du son, il m’apporte tout le côté technique des sonorités. On applique un mix entre le son et le visuel. On vise à se rapprocher le plus possible de ce que nous montre la nature.

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DRAMA
Interview réalisée le 02/09/18, à Liège / Illustrations ©Lunatic

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