Jovanotti à Rocella Ionica

Il faut souffrir pour être belle. Une expression à laquelle on pense fortement, lorsqu’on passe ses vacances d’été dans le Sud de l’Italie. C’est comme si Greta Thunberg se cachait derrière nos têtes pour rappeler qu’il n’y a pas que les banquises qui croulent… puis, arrive ce jour où l’on m’annonce que je pars assister au Jova Beach Party de Jovanotti, à Rocella Ionica (Calabre). Je pensais avoir fumé la moquette. Pourtant, ça n’avait rien d’irréel. J’allais voir l’artiste italien le plus inspirant et inspiré de ces dernières années !

Jovanotti, ou Lorenzo Cherubini de son vrai nom, est un faiseur de miracle. Tout au long de sa carrière, il ne cesse de jouer diverses musiques : rap, rock, hip hop, électro, jazz. Admettons un fait. Ses créations font la richesses culturelle en Méditerranée.

L’enthousiasme pour les nouveautés fait partie de notre système opératif aussi bien que la peur du neuf. Entre ces deux fonctions, nous nous dirigeons vers le futur. -Jovanotti in Sbam

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En 2019, Lorenzo, 53 ans, 14 albums derrière lui et exalté dans les veines, lance un projet hors norme : Jova Beach Party. Il s’agit d’installer des villages sur diverses plages italiennes, en 15 dates estivales ! Imaginez un festival visant plus haut qu’un concert de stade ! Quel est le but ? Emmener le public vivre une expérience naturelle, inoubliable. De quoi fusionner avec le sable et se baigner entre 2 concerts. Notre poète en profite également pour inviter différents invités de renom : de Caparezza à Alborosie.

Mais une chose à la fois. Il est temps de décrire une odyssée complètement folle…

Si je m’apprête à écrire une flopée de louanges propres à Jova Beach, n’oublions pas l’enfer de son trajet. En voiture, on ne savait pas où se garer, sans qu’une arnaque pointe le bout son nez. Si vous savez. Ces enflures qui vous font croire qu’ils travaillent pour le festival, proposant une place de parking plus chère que votre vie. Une fois la bécane en lieu sûr, on devait se taper un peu plus de 3 kilomètres à pied, sous un Soleil de midi (celui qui amène à voir double). Ce périple, digne d’un mythe grec, s’achevait près de la plage de Rocella Ionica.

La musique envahit déjà les nombreuses infrastructures. Jovanotti, habillé tel un cowboy inca, chante avec son groupe des versions acoustiques de ses titres. Toujours prêt à enthousiasmer et remercier son public, il enchaîne les mélodies devant 25 000 personnes. Aux premiers abords, le son ambiant donne envie de danser et nous suit à chacun de nos pas.

Que serait une fête sans un heureux évènement ? Un mariage est prévu à chaque date de la tournée. Allons-nous voir un prêtre ? Nenni ! Lorenzo fait l’affaire et s’entoure de son groupe, tout en bénissant les jeunes mariés de sa musique sacrée !

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S’ensuivent les Palestiniens de 47 Soul sur scène. L’air devient oriental. Un mix entre la bande son des Mystérieuses Cités d’or et l’imagination d’un Bombino. Le duo DJ, Ackeejuice Rockers, chauffe ensuite l’audience, avant l’arrivée du romain sur scène.

Qui admire la fontaine de jouvence ? Cette soirée est d’une certaine fraîcheur musicale. Nous avons droit à un spectacle de presque 3 heures, où Jovanotti mêle l’art DJ aux pures prerformances instrumentales. L’artiste mixait des tubes ultras connus (« Alors on danse », « I Gotta Feeling », « Around the World ») et les incruste entre ses chansons. Il s’élance derrière sa platine. Il bondit, une guitare en main. Une seule idée me vient en tête : Lorenzo Cherubini est à la quintessence de son art. Lui qui commence comme DJ en boîte de nuit et qui joue en cette nuit d’août, devant des milliers de fans.

Quand j’ai commencé à travailler dans les clubs, les DJ étaient derrière leurs platines dans le noir. Personne ne s’enfuyait. La musique était tout. En quelques années, Tomorrowland réalisait des nombres plus importants que Glastonbury, jusqu’au paradoxe de la fiction totale dans laquelle la console est devenue un autel où se célèbre une fonction souvent pré-produite qui manque toujours d’une véritable vibration.
La musique pour le public est le prétexte pour se mettre en scène. Il en a toujours été ainsi. A l’ère numérique et sociale, elle l’est plus radicalement.
-Jovanotti in Sbam

Chaque morceau s’imbriquait de façon inattendue. Derrière sa table de mix, le quinquagénaire offrait des hymnes à la jeunesse et à l’amour. Sans oublier deux invités de luxe venus le rejoindre : Brunori Sas et Toto Cutugno. L’un, symbole d’une nouvelle génération de paroliers. L’autre, grand compositeur de la botte méditerranéenne. Toto prenait tout suite les commandes des musiciens sans problème. Assurance et professionnalisme devant nos yeux.
Dès lors, le show ne semblait jamais finir et les classiques de la musique italienne résonnaient partout sur la plage. Fumées colorées, chants et lumières scéniques fusionnaient afin d’entrer en communion, le temps d’une fête d’une incroyable modernité.

Tout se terminait via « Fango ». La guitare de Riccardo Onori grondait sous les étoiles. Un solo qui restera gravé à jamais dans ma mémoire. De nombreux applaudissements pleuvaient alors face à une telle prouesse de la part de Jovanotti et sa bande. Nous repartions les jambes essoufflées et le mental émerveillé. Qui sait s’il sera possible de revivre une telle claque ? Pour l’instant, félicitons le talent de Jovanotti à rarement décevoir.

E questa la vita che sognavo da bambino. -Extrait de « Megamix »

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brunoaleas – Photos ©Michele Lugaresi

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