Les classes dominantes s’affairent, inquiètes seulement d’une chose : que la fin d’un modèle de production fondé sur les énergies fossiles amène à une nouvelle répartition des ressources défavorable à leurs intérêts. Ces classes, qui se sont gavées de l’exploitation des masses, faisant du charbon la clef de leur ascension, avant que les coulées de pétrole et les flambées de gaz ne viennent les installer en une abondance qui toujours aux damnés de la terre a manquée, paniquent aujourd’hui à l’idée de perdre leurs privilèges, et de se voir à leur tour soumis à l’économie de la rareté. Ces seigneurs de la terre redoutent de se voir transformés en serfs ou décapités. -Extrait de Coup d’état. Manuel insurrectionnel, écrit par Juan Branco
Ce passage, rédigé par l’avocat français, est un merveilleux parallèle à faire avec une œuvre cinématographique. Pas n’importe laquelle !
La deux parties de Dune, réalisées par Denis Villeneuve, sont de superbes évènements artistiques. Pourquoi ? Toutes les conditions sont réunies pour nous faire rêver : casting 5 étoiles, décors époustouflants, scènes homériques, thèmes toujours aussi pertinents. Quant au travail sonore, les mots me manquent, tant le résultat est fou. La recette est parfaite pour embarquer dans un univers singulier ; pour mémoriser chaque action à l’écran.
Que nous conte cette œuvre si fascinante ? La famille de Paul Atreides subit un massacre. Les soldats Harkonnen sont les coupables. Ils ont soif de pouvoir, tuent et poursuivent le jeune homme et sa mère. Ces derniers fuient vers Arrakis, la planète la plus dangereuse de l’univers. Là-bas, ils y trouvent une source exclusive, la ressource la plus précieuse qui soit, l’Epice.
Au premier volet, des forces sinistres déclenchent un conflit. Qui survivra ? Les personnes sachant maîtriser leurs peurs. Puis, le second film se focalise sur Paul et sa revanche contre la Maison Harkonnen.
Souvent, la fiction dépasse la réalité. L’Epice est comparable à notre pétrole. Si on souhaite pousser la réflexions plus loin, l’Epice pourrait symboliser l’envie de conquête. Aujourd’hui, on ne compte plus les détraqués bouleversant l’ordre international. Le génocidaire Benjamin Netanyahou. Des pourritures belliqueuses nommées Bush et Sarkozy. La liste est trop longue.
Les actes de ces ordures prouvent qu’on n’a pas à suivre un messie – ou en tout cas, des hommes de pouvoirs –. Le mot messie est une référence directe au roi David : c’est l’homme choisi par Dieu pour mener le peuple vers le bonheur terrestre, explique le père Yves-Marie Blanchard, prêtre du diocèse de Poitiers. Timothée Chalamet incarne brillamment un chef, prêt à tout pour défier les futures menaces. Son personnage, Paul, gagne la confiance du peuple des sables. Ensuite, il joue avec son côté mystique afin de lancer les foules vers une guerre sans nom. Denis Villeneuve ne dissimule pas sa veine dénonciatrice.
C’est un film sur les dangers du fanatisme, les figures charismatiques, messianiques. J’ai essayé de suivre les intentions initiales de Frank Herbert, quand il a écrit son premier roman, Dune. (…) Le film se veut être une réflexion sur l’aliénation du pouvoir religieux, sur la colonisation religieuse et sur les dangers de marier la religion et la politique.
Le cinéaste rappelle que Paul est un anti-héros. Dune 2 est le miroir de notre époque. Il n’y a pas plus moderne. Comment nier les conflits contemporains, lorsque Paul se présente tel un shaman aboyant la Vérité ?
Ce long métrage est une totale réussite, sur le fond et la forme. Il éclipse d’autres titres qui souhaitaient transmettre des morales fortes – fuck Pauvres Créatures –.
Qui sait si le réalisateur soulignera un fait avéré ? Parfois, on a beau suivre un homme providentiel, rien ne remplacera la force du collectif.
brunoaleas