Melting God

Coldplay – Everyday Life

Coldplay revient avec un huitième album éminemment politique. Everyday Life se sépare en deux parties distinctes remplies de messages de paix : Sunrise et Sunset. Chris Martin et sa bande partent d’ailleurs en Jordanie, près de nombreuses terres de conflits, afin de présenter l’œuvre (un magnifique concert autour de ruines d’un autre temps).

La musique des Britanniques était morte à mes yeux après Viva la Vida or Death and All His Friends (2008). Suite à cet opus, nous n’avions plus droit qu’à une série de tubes pop sans charme. Plus aucune comparaison avec la délicatesse d’un Jeff Buckley. Nul plaisir à écouter des nappes de synthés n’ayant rien de novateur. Les fameux cris de Martin en devenaient même caricaturaux.
Autre péché mignon: ma préférence au Coldplay mélancolique à celui festif. Ces dernières années, ils participaient à un bonheur… artificiel et mal branlé. Bien sûr, mes arguments sont plus que subjectifs. Leurs deux premiers albums ont bercé mon enfance. Une période de ma vie où l’émotion se glissait à mes oreilles via des chansons aux tristes compositions.

Mais avons-nous là un nouveau Coldplay ?

Il fallait attendre 2019 pour que le quatuor revienne aux bonnes vieilles sources. Piano et guitare sèche sont mis à l’honneur. Tout comme l’univers oriental, ayant énormément apporté à la musique dans sa globalité (rien que la guitare inventée par les Egyptiens).

Si certains se lasseront des mélodies de Everyday Life, je les encourage à l’écouter plusieurs fois. Histoire de saisir ce qui nous dépasse (‘Guns’), l’incompréhensible haine des femmes et hommes (‘Trouble in Town’), ainsi que ces instants fédérateurs, où la musique devient l’arme du futur (‘Arabesque’).
Certes, les paroles de Chris Martin semblent parfois mielleuses ou simplistes. Cependant, en ces temps de troubles politiques, de telles chansons sont plus que nécessaires. La démarche est intelligente. Oublions les sons trop électroniques et désincarnés des Londoniens. Ils gagnent en humanité grâce à leur pacifisme. Une lyrique d’autant plus attachée à une utilisation efficace de purs instruments: guitare, piano, saxophone, violons.

Difficile de savoir laquelle des deux parties l’emporte sur l’autre. Ce qui importe : un projet tenant la route, chapeauté par de très bons musiciens.

Comment conclure un article que je ne pensais jamais écrire ? Plusieurs hommages s’insèrent à Everyday Life. Choisissons le poème de Saadi Shirazi (1210-1291), Les Enfants d’Adam, prononcé dans ‘Bani Adam’. Des mots qui marquent l’esprit ad vitam æternam.

Les êtres humains sont membres d’un tout

Dans la création d’une essence et d’une âme

Si un membre souffre de douleur

Les autres membres inquiets resteront

Si vous n’avez aucune sympathie pour la douleur humaine

Le nom de l’homme vous ne pouvez le retenir

brunoaleas – à Giovanna

Embrace Your Punishment – Honor Before Glory

Il est vrai que la musique est un vecteur d’émotion. Ainsi, il n’est pas rare de ressentir cette petite étincelle lorsqu’on écoute un album ou bien quand on voit un groupe en concert.

Pour vous faire partager ce sentiment, je vais vous faire entrer dans le monde peu connu du Slamming Brutal Death Metal à travers l’album Honor Before Glory du groupe français Embrace Your Punishment, sorti en octobre 2014. Continuer la lecture

Thom Yorke – ANIMA

Sommes-nous contents de vivre l’instant présent ? On nous enquiquine souvent en nous affirmant que c’était mieux avant… sauf que l’époque des hippies testant les premières drogues dures est révolue. Depuis des années, on délaisse les studios et les vieilles méthodes d’enregistrement pour ne faire plus qu’un avec les machines.
Dans ce contexte, un homme offre une autre dimension à l’électronique. Thom Yorke, chanteur des Radiohead, modernise le 4e art. Sa recette ? Nervosité. Sensibilité. Complexité.

L’énergumène pousse ses limites à l’infini en tant que musicien. Via ses albums solos, il confectionne des projets assez transcendants. D’une collaboration visuelle avec Paul Thomas Anderson (There will be blood, Magnolia) naît ANIMA. Il s’agit d’une boîte à surprises sonores. Dès qu’on l’ouvre, on souhaite lâcher prise. Se lancer dans le vide, bercé par des nappes de synthétiseurs et des percussions aux rythmes imprévisibles.

A quoi bon comprendre les paroles ou ce qu’on entend ? Ce n’est pas de la paresse. C’est répondre à l’invitation du mélomane cinquantenaire. Celle de sentir une nouvelle expérience nous traverser.

Thom Yorke semble indomptable. Lui, qui comme Beck, se fraye un chemin tout en gardant une touche individuelle d’année en année. Rien ne sonne faux dans ANIMA. Basse, batterie et voix fusionnent afin de plonger dans des échos bipolaires d’un chant unique. On confondrait le thé par du goudron, en écoutant les sombres imageries du britannique. Il ne reste plus qu’à s’incliner face à tant de recherche et de maîtrise.

Ces derniers lustres ne se résument pas à des artistes incapables d’inventer quoi que ce soit. Merci Thom.

Drama

Mike Patton & Jean-Claude Vannier – Corpse Flower

Plus qu’un mythe du rock actuel, Mike Patton (Mr. Bungle, Faith No More, Tomahawk) est le meilleur magicien pour mélomane. Chaque année, il surprend avec un nouveau projet. Il reprend notamment des classiques de la musique italienne avec Mondo Cane (2010). Sans compter Fantomas, où il délivre des prestations iconoclastes, en se jouant des codes rock/métal. Personne n’arrête Mikey !

Alors quand on apprend que Jean Claude Vannier (auteur-compositeur-interprète et arrangeur musical français) s’entretient avec Mike Patton via mails… Comment ne pas sauter de joie ?! Cloclo Vannier n’est pas n’importe qui. Papa entre autres de l’Histoire de Mélody Nelson (Serge Gainsbourg, 1971), il compose autant au cinéma, en télévision qu’au théâtre !

mikepatton-jean-claudevannier-c-renaudmonfourny-width_4919_height_2677_x_0_y_6©Les Inrocks

La fusion Patton/Vannier semble improbable. Pourtant, Monsieur Vannier aime l’humour du chanteur américain… Une porte s’ouvre dès lors à cette collaboration.

L’opus Corpse Flower sonne comme une lettre d’amour aux styles respectifs des deux artistes. Si l’on retrouve de méticuleux violons ou des guitares rockabilly pour Vannier, les chœurs (‘Chansons D’Amour’) et cris glaçants (‘Ballade C.3.3’) de Patton ne passent pas inaperçus !
La classe et la fantaisie. Le rire et la tétanie. Le café et le sang.

Encore une fois, Mike Patton prouve qu’il ne joue pas dans la même cour que ses contemporains. C’est une ballade mi-française, mi-anglaise, qu’il nous demande d’écouter…
Une orchestration millimétrée et transcendante.

Je me méfie des faiseurs de systèmes et m’écarte de leur chemin. L’esprit de système est un manque de probité. -Friedrich Nietzsche

brunoaleas