Imaginez-vous prêts à vous battre. Imaginez-vous au bord de la falaise, sans aucune possibilité de faire demi-tour. Imaginez-vous dans un monde aussi dark qu’un film DC. Que vous soyez un guerrier, un gladiateur, un vampire, un pirate, un héros intergalactique… Peu importe l’univers qui vous branche le plus. Imaginez l’envie de vous battre, le refus de courber le dos, le regard fixé sur l’horizon, les poings serrés. Maintenant, ajoutez à votre scène une musique épique.
J’avoue n’en avoir rien à faire de ce qui vous est passé à l’esprit. Une et une seule sensation importe ! Une musique épique qui donne la chair de poule et qui fait frissonner. La même qui parvient à nous convaincre qu’on peut accomplir n’importe quoi. Le secret de cette musique, Saint Mesa (Danny McCook pour les intimes) l’a percé.
Dans son EP Nocturne, mais aussi dans le titre « Lion », il nous « fout les poils », comme on dit. Il nous fait relever la tête et nous rend prêts à affronter le monde. Une voix éthérée, des textes imagés, un fond musical mouvementé, presque tribal : ce sont les ingrédients réunis par Saint-Mesa dans cet EP de 2019. Il ne résume clairement pas toutes les facettes de l’artiste, mais il est clair qu’il déploie son savoir-faire en termes de production. Car oui, même si les instruments et la voix impressionnent, c’est bien le travail studio fourni qui remplit nos oreilles et notre esprit d’images et de plans-séquence badass. Un mélange d’écho, de reverb et de ce je-ne-sais-quoi qui gonflent notre courage. Mention spéciale à « Lion », « Throne » et « Murky », dont le clip dévoile toute cette dimension tribale, chamanique.
Mais Saint Mesa a plusieurs cordes à son arc. S’il maîtrise ces dimensions sombres et martiales, il ne s’y limite pas. Avant Nocturne, il avait déjà sorti un EP, Jungle. McCook possédait déjà son talent pour évoquer des mondes dans l’esprit de quiconque l’écoute. Via Nocturne, il suggère un tout autre univers. En clair, quand vous déprimez, soit vous voulez vous relever et combattre le monde avec Nocturne, soit vous souhaitez rire et vous poser sur une plage avec Jungle. La distinction est un peu facile, voire carrément cliché, mais ça marche.
Plus récemment, après une reprise de « Smells Like Teen Spirit », où il parvient à mettre sa patte sans manquer de respect à Nirvana, il sort une nouvelle chanson, « Watermark ». Dans le même esprit que Jungle, ce titre délie tout autant l’imagination, mais nous emmène dans une autre dimension, nettement moins guerrière que Nocturne, pourtant plus fraîche sur les platines de Saint-Mesa. Peut-être que depuis, on a fait la paix. Peut-être qu’on a oublié pourquoi on se battait. Peut-être qu’au final, les batailles se déroulent toutes dans nos têtes, comme des millions de voix hurlant dans une même cacophonie. Une chose est sûre, le saxophone nous fait voyager sur des îles où les nuages n’ont plus rien de menaçant, où le soleil commence même à percer. Alors, c’est enfin le moment de se poser à l’ombre des cocotiers (ou des saules, ou des chênes, enfin, de se poser quoi !).
C’est enfin le moment de quitter la terre vers des Mondes Imaginaires.
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Photo ©Saint Mesa