Flavier Mazier s’occupe de groupes de musique. Elle ne cache pas à quel point Internet bouleverse nos habitudes et codes sociaux. Une question n’est donc pas à écarter. Que signifie être attachée de presse, aujourd’hui ? Réponses sincères d’une passionnée !
Comment choisis-tu les groupes avec qui tu aimerais bosser ?
J’ai lancé officiellement mon auto-entreprise de chargée de relations médias, en mars 2022. Au fil des mois, j’ai vite compris que le principal, pour moi, c’est l’humain. J’ai besoin que les choses se fassent avec respect, bienveillance, confiance. Il faut aussi bien sûr que l’esthétique me parle et me plaise, j’ai un spectre assez large qui peut aller de la chanson au punk, en passant par la pop, la folk et le rock mais toujours avec une couleur indé, voire lofi.
Avec le temps, j’ai aussi choisi de ne travailler qu’avec des projets en développement qui en sont à leur premier album, premier EP, voire premier single. J’aime être là au tout début, faire partie des premiers soutiens et ensuite, voir les projets grossir et voler vers d’autres horizons plus confirmés.
Nous vivons l’ère numérique. Internet bouffe notre attention. Est-ce difficile, aujourd’hui plus qu’hier, de rendre visible le travail des musiciens dont tu t’occupes ?
Même avec seulement quelques années d’expérience, je vois la différence, oui. Les médias papiers sont de moins en moins nombreux, ceux qui sortaient toutes les semaines ne sortent plus que tous les mois, par exemple. Les gens écoutent de moins en moins la radio en direct. Les blogs sont moins consultés, mais de plus en plus sollicités, donc beaucoup arrêtent tout simplement, et peu se créé. Il n’y a presque plus de place pour la musique à la télé, en dehors du mainstream et de la variété.
De nouvelles pratiques se développent mais, en tant qu’attaché.es de presse, on n’a pas vraiment la main dessus. On ne peut pas contacter les programmateur.rices des playlits Spotify, Deezer, etc. Parfois les labels, les managers ou artistes nous demandent si on connait des influenceur.ses, des youtoubeur.ses etc. Mais il y en a peu qui parlent de musique indé et la plupart aiment diger par leurs propres moyens. De plus en plus de “médias” ne sont que sur Instagram par exemple Pour les médias présents, ils demandent à faire payer un relais en story ou un post. Sans parler de Groover (ndr : site web où les médias et professionnels écoutent les morceaux des artistes).
Les choses évoluent et très vite. A titre perso, ce n’est pas comme ça que j’imagine mon activité. La charge de travail est de plus en plus conséquente, mais les relais, les chroniques, les interviews sont de plus en plus difficiles à obtenir – pour les raisons évoquées et pour pleins d’autres, comme les équipes qui sont réduites au sein des médias, les médias bénévoles qui ne sont pas assez reconnus et soutenus, le nombre incalculable de nouveaux projets, et j’en passe –. Il faut soit s’adapter, soit s’accrocher ou, c’est mon cas, songer à une autre activité. Car en plus des retombées qui diminuent, en étant indépendante, il est difficile de se dégager un salaire correct car les budgets de tout le monde se réduisent.
Quel conseil donner aux personnes souhaitant réaliser ton travail ?
Bien se renseigner, avoir bien conscience de la conjoncture actuelle du secteur musical. Tous les parcours sont différents, certain.es se lancent en sortant de l’école mais je conseille de bien connaître l’entièreté du secteur musical, et de, si possible, varier les activités et passer par le bénévolat. C’est mon cas, je me suis formée sur le tas, à travers mes diverses expériences bénévoles, en organisation de concerts, en festival avec des expériences allant de bénévole au bar à la co-orga, j’ai fait une formation de chargée de production en musique actuelle, j’ai fait du booking, du management.
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Interview organisée par brunoaleas – Photo ©Romain Berger